Palestine, dix heures de solidarité

Par Edouard Schoene

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Sur le thème « résistance en Palestine, d’une génération à l’autre », dans le cadre du festival des solidarités, le collectif Isérois pour la Palestine (16 structures) et l’AFPS, ont fait salle pleine à Grenoble au centre œcuménique St Marc.

L’après midi débu­tait sur le thème de l’engagement de la jeu­nesse Pales­ti­nienne. En vidéo, Salam Saho­ri (rete­nue en Pales­tine) s’adressait à la salle. Coor­don­na­trice de pro­jets à la BFTA, ONG de com­merce équi­table, elle a pré­sen­té l’activité qui consiste à com­mer­cia­li­ser à Beth­léem les tra­vaux de 1500 petits arti­sans, acti­vi­té qui a créé six emplois.

Abdal­lah Qadah, coor­di­na­teur du mou­ve­ment des jeunes de la résis­tance popu­laire.

Puis Abdal­lah Qadah, coor­di­na­teur du mou­ve­ment des jeunes de la résis­tance popu­laire a pré­sen­té la situa­tion en Pales­tine (515 colo­nies occu­pées par 800 000 colons), et des actions de jeunes.  Il a carac­té­ri­sé la jeu­nesse par un mot, « incer­ti­tude ».
« Où seras tu dans cinq ans, dans trois jours ? Réponse impos­sible. »
Un mil­lion de Pales­ti­niens sont pas­sés par la pri­son. 6000 pri­son­niers actuel­le­ment dans l’arbitraire abso­lu. 30% des pales­ti­niens ont entre 15 et 29 ans. Ils sont écar­tés de toute déci­sion. Une forme impor­tante d’action des jeunes : tout faire pour res­ter sur leurs terres, empê­cher l’extension bru­tale des colo­nies. Au cours de l’exposé et du débat qui a sui­vi, Salam Saho­ri a sou­li­gné l’importance de l’action BDS (boy­cott, dés­in­ves­tis­se­ment, sanc­tions) et a appe­lé à un réveil des ins­tances inter­na­tio­nales, des gou­ver­nants pour ne pas lais­ser la situa­tion s’empirer et faire appli­quer les réso­lu­tions de l’ONU..

Lei­la Sha­hid et Domi­nique Vidal.

Les cen­taines de par­ti­ci­pants à la ren­contre de soli­da­ri­té ont ensuite vécu un rare moment, « qui rend plus intel­li­gent » comme le sou­li­gnait la pré­si­dente de l’AFPS, Anne Tuaillon, un débat / inter­views croi­sées de Lei­la Sha­hid et Domi­nique Vidal.
Lei­la Sha­hid, per­son­na­li­té de dimen­sion inter­na­tio­nale, a été délé­guée géné­rale de la Pales­tine auprès de l’union euro­péenne de 2005 à 2015.
Domi­nique Vidal, his­to­rien, jour­na­liste est recon­nu comme l’un des plus grands ana­lystes de la situa­tion au Moyen-Orient. Il vient de réa­li­ser son 96e débat autour d’un livre concis, pré­cis, très argu­men­té, Anti­sio­nisme = anti­sé­mi­tisme ? Réponse à Emma­nuel Macron.
Ce livre très mal reçu par le pré­sident de la Répu­blique a contri­bué à ce que Macron renonce à pro­po­ser une loi pour inter­dire toute cri­tique de la poli­tique de Tel-Aviv.
Inter­ro­gé par Leï­la Sha­hid, Domi­nique Vidal, de retour d’un séjour en Israël et en Pales­tine a don­né quelques éclai­rages pour com­prendre la situa­tion com­plexe dans ces ter­ri­toires.

Ce qui a domi­né lors des élec­tions récentes en Israël, c’est le « déga­gisme ». Neta­nya­hu est per­dant. Il vient d’être incul­pé pour une série de faits graves.
Le Likoud n’est plus le pre­mier par­ti, mais la gauche est inexis­tante. Un évé­ne­ment impor­tant : « la liste arabe » uni­fiée a treize dépu­tés (81% des voix arabes, ces der­niers ayant voté à près de 60%).
Les Israé­liens sont aujourd’hui ancrés à droite. En 2016, 70% des Israé­liens étaient contre l’annexion de la Cis­jor­da­nie, aujourd’hui 28 %. En 2016, 63% étaient favo­rables à deux états, aujourd’hui ils ne sont que 34%. Mais les Israé­liens se posent beau­coup de ques­tions sur la situa­tion ; ain­si 78 % consi­dèrent que le conflit fait du tort à Israël.
Leï­la Sha­hid inter­roge Domi­nique Vidal : quelle est la posi­tion de la dia­spo­ra en France ? Domi­nique Vidal répond qu’il est dif­fi­cile de par­ler de la dia­spo­ra juive en France. « Les médias laissent entendre que le CRIF est repré­sen­ta­tif des juifs en France ce qui n’est pas le cas. Le CRIF repré­sente 60 000 per­sonnes sur une com­mu­nau­té de 600 à 700 000 juifs. Les seules per­son­na­li­tés intel­lec­tuelles juives pré­sen­tées par les médias sont celles sou­te­nant le CRIF, les autres ne sont jamais pré­sen­tées comme juives ! ». Aux Etats-Unis, la majo­ri­té de la popu­la­tion juive est hos­tile à Trump et ce sont les évan­gé­listes qui sou­tiennent Israël et sa poli­tique.

Leï­la Sha­hid.

Après qua­rante minutes d’exposé pas­sion­nant, Domi­nique Vidal inter­roge Leï­la Sha­hid. Leï­la Sha­hid : « Une famille de huit per­sonnes a été assas­si­née dans la bande de Gaza, il y a quelques jours, par une frappe aérienne arbi­traire sur déci­sion de Neta­nya­hu . Cette famille « aurait eu en pro­jet un atten­tat ». On assiste à un ter­ro­risme d’Etat ! En Israël il n’y a plus de négo­cia­tions de paix depuis 1995, la mort de Rabin. »

Leî­la Sha­hid fait ensuite un large tour d’horizon inter­na­tio­nal pour dénon­cer toutes les alliances contre nature citant l’Arabie-Séoudite , Trump, Pou­tine, Erdo­gan,…
« Le monde arabe est dis­lo­qué, c’est le talon d’Achille du peuple Pales­ti­nien. » Leï­la Sha­hid salue les luttes des peuples algé­riens, sou­da­nais, liba­nais, les luttes à Hong Kong. Elle donne des infor­ma­tions pré­cises et gra­vis­simes sur les des­sous de l’intervention amé­ri­caine en Irak, sur la situa­tion en Syrie…
Elle pré­cise pour ceux qui condamnent avec rai­son Trump : « le plus dan­ge­reux c’est Pou­tine, que je nomme Ras­pou­tine ».

Le débat se pour­sui­vra avec la salle après ces deux heures d’échanges pas­sion­nants. * Le pro­gramme des 10h pour la Pales­tine s’est ache­vé par un repas puis un concert de grande qua­li­té avec la com­pa­gnie « le cœur allant vers » qui a pré­sen­té à deux voix accom­pa­gnées par oud et per­cus­sion, des poèmes de Mah­moud Dar­wich.

*  les enre­gis­tre­ments audios de la jour­née sont dis­po­nibles auprès de l’AFPS.

Lei­la Sha­hid, Domi­nique Vidal et Anne Tuaillon.
Domi­nique Vidal.
Abdal­lah Qadah et Fran­çoise Guillot.

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