Eybens. Un 11 novembre pacifiste
Par Edouard Schoene
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L’association laïque des amis de Jean-Pierre Raffin-Dugens invitait une nouvelle fois, ce lundi 11 novembre, « les pacifistes et citoyens épris de paix et justice sociale », à deux rendez-vous à Eybens. Un hommage à Jean-Pierre Raffin-Dugens a d’abord été rendu, sur la place qui porte son nom. Avant la projection, dans l’après-midi, à la Grange du château, du film Le ravitailleur – une simple histoire en 1916 à Verdun.
Militant pacifiste de la première heure, Jean-Pierre Raffin-Dugens fut député dès 1910 en Isère. L’un des rares parlementaires socialistes à refuser le renouvellement des crédits de guerre pour la Première guerre mondiale. En avril 1916, (source Le Maîtron) il écrit au gouvernement, lui demandant « quand et comment il pense que la guerre actuelle se terminera » et si les résultats correspondront « aux sacrifices faits en hommes et en argent ».
Les dépenses d’armement dans le viseur des manifestants
Environ 70 manifestations de ce type ont lieu le 11 novembre, sur des lieux de commémoration de la paix, dont des monuments aux morts pacifistes. À Eybens, Jacques Penin, militant de la Libre pensée, a évoqué l’héritage du député socialiste : « Nous continuons en son nom le combat pour la paix, contre l’industrie de l’armement, tandis que la barbarie se déchaîne en Ukraine, au Moyen-Orient. 60 000 Russes, 480 000 Ukrainiens, 50 000 Gazaouis tués . Nous menons également le combat pour la réhabilitation des fusilles pour l’exemple de 14-18, tandis qu’une loi a été votée par le Parlement et retoquée par le Sénat. »
Plusieurs intervenants ont ensuite pris la parole tour à tour : Pascal Costarella (Libre pensée), Jean-Marc Morel pour l’Association nationale des anciens combattants (ANACR), André Sylvestre, président de l’Association laïque des amis de Jean-Pierre Raffin-Dugens… Jean-Paul Vienne, président du comité départemental du Mouvement de la paix, a quant à lui cité un extrait d’une inscription qui figure sur le monument aux morts de Saint-Martin-d’Estreaux (Loire), évoquant « le sort de l’humanité » si tout l’argent dépensé pour la guerre l’avait été autrement. « La misère serait en grande partie bannie de l’univers« , d’après ce texte.
Des propos qui rejoignent l’actualité, à l’aube des débats à venir sur le budget militaire français, doté de 50,5 milliards d’euros. « Son montant, qui était de 32 milliards d’euros en 2017, va atteindre 67,4 milliards en 2030. Il aura doublé en deux mandats d’Emmanuel Macron« , souligne Jean-Paul Vienne. « Au niveau mondial, les dépenses d’armements ont atteint le chiffre exorbitant de 2 443 milliards de dollars, alors qu’elles s’élevaient à moins de la moitié à la fin de la Guerre froide.«
Et le militant pacifiste de s’interroger : « Le monde est-il plus sûr pour autant, sera-t-il plus sûr demain si nous continuons dans cette voie ? » Il appelle à tirer la leçon de « l’échec de toutes les solutions de force, de nature militaire« , ces 25 dernières années, que ce soit en Afghanistan, Irak, Syrie, Libye, Afrique centrale et aujourd’hui en Ukraine ou en Palestine. « Dans tous ces pays, la situation des populations, de la vie quotidienne est bien pire aujourd’hui qu’au début de ces conflits« , constate Jean-Paul Vienne.
Ainsi, selon lui, les « seules issues viables » à ces conflits et crises internationales proviennent de « la mise en œuvre de processus politiques et diplomatiques mettant en place des solutions négociées dans le respect du droit international (cher au Mouvement de la paix) et dans le cadre du multilatéralisme incarné par les Nations unies« .
La cérémonie s’est conclue par la diffusion de la Chanson de Craonne, interdite de diffusion jusqu’en 1974. Son refrain :
« Adieu la vie, adieu l’amour,
Adieu toutes les femmes
C’est bien fini, c’est pour toujours
De cette guerre infâme
C’est à Verdun, au fort de Vaux
Qu’on a risqué sa peau […] »