Pont-de-Claix. Les salariés de Vencorex défilent, après une semaine de grève

Par Manuel Pavard

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Feu de palettes devant la plateforme chimique de Pont-de-Claix, avant le départ de la manifestation.
Entre 700 et 800 personnes se sont réunies ce mercredi 30 octobre devant la plateforme chimique de Pont-de-Claix, bloquée depuis une semaine. Les salariés en grève de Vencorex, soutenus par des élus locaux et des camarades d'autres entreprises, ont ensuite défilé dans les rues de la ville, déterminés à sauver leurs emplois et plus largement l'industrie de la chimie.

Tous sont una­nimes. La réunion orga­ni­sée ven­dre­di 25 octobre entre les repré­sen­tants syn­di­caux de Ven­co­rex et le ministre délé­gué à l’Industrie Marc Fer­rac­ci a été « extrê­me­ment déce­vante », estime Adrien Poi­rieux, réfé­rent dépar­te­men­tal de la Fédé­ra­tion natio­nale des indus­tries chi­miques (FNIC-CGT). « La ren­contre a refroi­di nos attentes », abonde Séve­rine Dejoux, élue CGT au CSE, iro­ni­sant sur les pro­messes de « réin­dus­tria­li­ser la France. Il faut espé­rer que ces inten­tions soient mises en œuvre car pour l’instant, on ne les voit pas », déplore-t-elle.

La tech­ni­cienne R&D à Ven­co­rex Saint-Fons s’exprime devant les quelque 700 mani­fes­tants ras­sem­blés ce mer­cre­di 30 octobre, devant la pla­te­forme chi­mique de Pont-de-Claix. Un site blo­qué depuis une semaine – tout comme la pla­te­forme voi­sine de Jar­rie. La consé­quence de la grève illi­mi­tée lan­cée par les sala­riés de Ven­co­rex, imi­tés par leurs cama­rades d’Arkema, le 23 octobre. Et ce, en réac­tion à la clô­ture des offres de reprise de l’entreprise, pla­cée en redres­se­ment judi­ciaire le 10 sep­tembre.

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Syn­di­ca­listes et élus ont pris la parole à tour de rôle.

L’information, par­ve­nue aux repré­sen­tants du per­son­nel le 22 octobre, a fait l’effet d’une « douche froide », recon­naît Séve­rine Dejoux. « On a décou­vert qu’il y avait une seule offre dépo­sée, pour un seul ate­lier repre­nant 25 per­sonnes », ajoute-t-elle. Ce qui lais­se­rait ain­si près de 440 sala­riés sur le car­reau. Cerise sur le gâteau, ce repre­neur n’est autre que la socié­té hon­groise Bor­sod­Chem, filiale du groupe chi­nois Wan­hua… Soit pré­ci­sé­ment « celui qui nous a cou­lés et qui a fait en sorte qu’on en arrive là : notre prin­ci­pal concur­rent », grince l’élue CGT.

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Ambiance brû­lante sur la pla­te­forme, blo­quée depuis le 23 octobre.

Face au sta­tu quo et à l’enlisement des dis­cus­sions, l’intersyndicale (CGT, CFDT, CCFE-CGC) et les sala­riés en grève avaient donc pré­vu une nou­velle jour­née de mobi­li­sa­tion ce mer­cre­di, en pré­sence d’élus locaux. Par­mi eux, plu­sieurs élus PCF qui défendent notam­ment l’option de la natio­na­li­sa­tion.

Les communistes prônent une « renationalisation temporaire »

« Les séna­teurs com­mu­nistes vont por­ter la ques­tion au gou­ver­ne­ment de la rena­tio­na­li­sa­tion tem­po­raire », indique le conseiller régio­nal Éric Hours. « Mais aus­si une nou­velle gou­ver­nance où les sala­riés sont asso­ciés aux déci­sions », pour­suit-il. Sans eux en effet, « il n’y a pas d’entreprises », rap­pelle-t-il. « On peut se pas­ser des patrons, mais pas des sala­riés ! »

Aman­dine Demore abonde : « Au-delà du sou­tien, on a éga­le­ment des pro­po­si­tions à por­ter auprès de nos par­le­men­taires. C’est aus­si notre rôle », affirme la maire PCF d’Échirolles, « convain­cue que le pas­sage par la natio­na­li­sa­tion est la solu­tion pour trou­ver un repre­neur… Et pour que cette indus­trie reste fran­çaise. »

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Le cor­tège a défi­lé à Pont-de-Claix, der­rière la ban­de­role des élus.

L’enjeu est de taille. Car les quelque 460 sala­riés de Ven­co­rex France ne sont pas les seuls mena­cés. « Sur la pla­te­forme, on a beau­coup d’autres entre­prises qui sont ins­tal­lées ain­si que des sous-trai­tants », sou­ligne Séve­rine Dejoux, évo­quant « envi­ron mille emplois » concer­nés sur le site de Pont-de-Claix. La syn­di­ca­liste pointe par ailleurs l’impact sur l’activité d’Arkema Jar­rie : « Aujourd’hui, si on arrête de leur four­nir le sel, l’électrolyse d’Arkema va s’arrêter. »

Pour Séve­rine Dejoux, l’équation est aus­si lim­pide qu’inquiétante. « Si Ven­co­rex tombe, Arke­ma tom­be­ra aus­si », redoute-t-elle. Et plus glo­ba­le­ment, ce sont « des mil­liers d’emplois » qui se retrou­ve­raient en dan­ger dans l’industrie de la chi­mie. « On se bat pour essayer de rac­cro­cher les wagons et pour que des repre­neurs s’intéressent à notre acti­vi­té », explique-t-elle.

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Plu­sieurs élus com­mu­nistes étaient pré­sents lors de cette jour­née d’ac­tion.

Les sala­riés n’ont ain­si plus le choix. Ils tentent « d’actionner tous les leviers pos­sibles et ima­gi­nables ». La mobi­li­sa­tion de ce mer­cre­di en fait d’ailleurs par­tie, l’objectif étant notam­ment d’interpeller et même de « réveiller les ban­dits enfer­més der­rière les fenêtres », lance Serge Allègre, secré­taire fédé­ral de la FNIC-CGT, en dési­gnant les diri­geants de la pla­te­forme chi­mique pré­sents dans le bâti­ment, à quelques cen­taines de mètres.

Le syn­di­ca­liste tacle vive­ment le patro­nat et les « médias du capi­tal », cou­pables de res­ter silen­cieux sur la « catas­trophe indus­trielle actuelle ». Serge Allègre donne ain­si un chiffre : « Dans la fédé­ra­tion des indus­tries chi­miques, ce sont plus de 7 000 emplois directs détruits depuis le 1er jan­vier 2024. » Soit « près de 35 000 au total », en comp­tant les emplois indi­rects et induits.

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Les mani­fes­tants se sont diri­gés vers le rond-point sur­plom­bant l’A480.

Après ces inter­ven­tions suc­ces­sives, les mani­fes­tants ont quit­té la pla­te­forme chi­mique pour défi­ler à Pont-de-Claix. Mené par les élus — regrou­pés autour de la ban­de­role « Sau­vons la pla­te­forme ; sau­vons les emplois » -, le cor­tège a tra­ver­sé le cours Saint-André et pris la direc­tion du rond-point don­nant sur l’autoroute A480.

« Sophie Binet sur le piquet de grève », le 7 novembre

Une seconde salve de prises de parole était pré­vue à cet endroit. L’occasion pour plu­sieurs repré­sen­tants syn­di­caux (CGT mais éga­le­ment Unef) d’afficher leur soli­da­ri­té avec les sala­riés de Ven­co­rex. Un sou­tien qui, dans cer­taines entre­prises, s’avère indis­pen­sable, comme le mar­tèle Sté­phane, secré­taire du CSE d’Arkema Jar­rie : « Pour tous ceux qui n’ont pas encore com­pris aujourd’hui que les pro­blèmes de Ven­co­rex sont ceux de Jar­rie, c’est le moment de se réveiller ! Demain, il sera trop tard… »

Pro­chaines échéances dans le dos­sier Ven­co­rex, un comi­té de pilo­tage lun­di 4 novembre au soir, sui­vi d’un « pas­sage au tri­bu­nal de com­merce, mer­cre­di 6, pour les offres et la clause de revoyure », pré­cise Adrien Poi­rieux. Un ras­sem­ble­ment devrait d’ailleurs être orga­ni­sé devant le tri­bu­nal. Enfin, jeu­di 7 novembre, la FNIC-CGT pré­voit une nou­velle mobi­li­sa­tion d’envergure à Pont-de-Claix. Avec la pré­sence annon­cée de la secré­taire géné­rale de la CGT « Sophie Binet sur le piquet de grève », informe Serge Allègre. D’ici là, comme le clame l’éternel tube des manifs dans la voi­ture sono : « On lâche rien ! »

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Des repré­sen­tants CGT sont inter­ve­nus près du rond-point.

PSE : l’offre de Vencorex insatisfaisante pour les syndicats

Les syn­di­cats et la direc­tion de Ven­co­rex ont débu­té les négo­cia­tions sur le plan de sau­ve­garde de l’emploi (PSE) et le mon­tant d’é­ven­tuelles indem­ni­tés de licen­cie­ment, ce lun­di 28 octobre. Une réunion peu fruc­tueuse. « Les pro­po­si­tions de la direc­tion ont été refu­sées una­ni­me­ment par les repré­sen­tants des trois syn­di­cats (CGT, CFDT, CFE-CGC) », indique Adrien Poi­rieux, réfé­rent dépar­te­men­tal de la FNIC-CGT.

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