Elections départementales. Tour d’horizon à Charvieu-Chavagneux, Grenoble III et Fontaine-Seyssinet avec les candidats du Printemps isérois

Par Luc Renaud

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Charvieu-Chavagneux, dans le Nord-Isère. Le canton compte un triste privilège : l’un de ses élus a été candidat Front national en 2017. Face à l’extrême-droite, le Printemps isérois relève le défi. Là peut-être plus encore qu’ailleurs, les Isérois ont besoin d’un conseil départemental qui tisse des liens, plutôt que de favoriser l’exclusion.

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La ronde de la collusion entre la droite et l'exrême-droite... le quotidien d'un canton, Charvieu-Chavagneux, dans le Nord Isère.

Le qua­dri­nome a fière allure. Cécile Dhai­naut, ensei­gnante et co-secré­taire de la sec­tion com­mu­niste locale. Denis Pau­get, éco­lo­giste, élu d’opposition dans son vil­lage de Jan­ney­rias. Comme sup­pléants, Isa­belle Sades­ki, can­di­date éco­lo­giste lors de la légis­la­tive de 2017. Et Pierre-Yves Bois, syn­di­ca­liste, can­di­dat sur la liste d’opposition lors de l’é­lec­tion muni­ci­pale à Cré­mieu. Quatre can­di­dats et un point com­mun : ils croient à ce qu’ils font. Cécile et Isa­belle ont mili­té ensemble pour amé­lio­rer le sort des jeunes migrants. Cadre dans une entre­prise de logis­tique, Denis y anime un groupe de tra­vail sur les moda­li­tés de la tran­si­tion éner­gé­tique. Tan­dis que Pierre-Yves, ingé­nieur à Bio­Mé­rieux, s’est lar­ge­ment impli­qué à Pont-de-Ché­ruy dans le mou­ve­ment pour le droit à la retraite. Avec Cécile, natu­rel­le­ment. Tous quatre por­te­ront les cou­leurs du Prin­temps isé­rois dans le can­ton de Char­vieu-Cha­va­gneux, ce can­ton qui jouxte le Rhône et l’aéroport de Lyon Saint Exu­pé­ry.

Leur mis­sion, ils l’ont accep­tée. Empê­cher l’élection d’un can­di­dat d’extrême droite. Car le risque existe. Les deux élus sor­tants de ce can­ton sont le maire de Char­vieu-Cha­va­gneux, Gérard Dezempte et Annick Merle. Le pre­mier siège sur les bancs des non ins­crits, la seconde est la troi­sième vice-pré­si­dente du conseil dépar­te­men­tal.

 

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Cécile Dhai­naut, PCF, can­di­date pour le Prin­temps isé­rois dans le can­ton de Char­vieu-Cha­va­gneux.

Gérard Dezempte s’est fait un nom tris­te­ment célèbre au niveau natio­nal. Depuis long­temps. En 1989, une pel­le­teuse dépê­chée par le maire détrui­sait « acci­den­tel­le­ment » le bâti­ment abri­tant une salle de prière en pré­sence de fidèles musul­mans. En 2015, il était néan­moins élu sous l’étiquette de l’union de la droite conduite par Jean-Pierre Bar­bier. En 2017, une ligne est fran­chie : Gérard Dezempte se déclare can­di­dat du Front natio­nal – en attestent les docu­ments publiés par le minis­tère de l’Intérieur – lors de l’élection légis­la­tive dans la 6e cir­cons­crip­tion.

Autant dire aujourd’hui que le renou­vel­le­ment de sa can­di­da­ture sans oppo­si­tion de la droite dépar­te­men­tale aurait une signi­fi­ca­tion : celle d’un pont jeté entre la droite et l’extrême-droite. Dans un cour­rier adres­sé à Jean-Pierre Bar­bier, l’actuel pré­sident du conseil dépar­te­men­tal, Jéré­mie Gio­no, secré­taire dépar­te­men­tal du PCF, l’a mis en garde contre les consé­quences d’une telle atti­tude. « La droite répu­bli­caine réha­bi­li­te­rait ain­si quelqu’un qui a clai­re­ment fait le choix d’un autre camp poli­tique, hors du champ répu­bli­cain », écri­vait-il le 27 mars der­nier. Pour l’heure, Jean-Pierre Bar­bier s’est conten­té de bot­ter en touche.

Ces pauvres dont il ne veut pas

« Nous vou­lons un dépar­te­ment inclu­sif », lance Cécile Dhai­naut face à l’extrême droite. Et avec elle le ras­sem­ble­ment de toutes les forces de gauche du can­ton.
Inclu­sif, c’est-à-dire en rup­ture avec les choix des élus actuels du can­ton. Exemple, le loge­ment. À quelques enca­blures de la métro­pole lyon­naise, ce ter­ri­toire du Nord-Isère est tout à la fois celui de l’agriculture céréa­lière et de la ban­lieue pavillon­naire. « Tout a été fait par la droite locale et Gérard Dezempte pour déve­lop­per les lotis­se­ments et limi­ter le loge­ment social. » C’est que le loge­ment acces­sible est consi­dé­ré par l’élu d’extrême-droite comme sus­cep­tible « d’attirer » une popu­la­tion dont il ne veut pas. « Résul­tat, les jeunes couples doivent s’éloigner pour s’installer ; il n’est pas simple de conti­nuer à vivre ici après une sépa­ra­tion. » Or, le dépar­te­ment, c’est aus­si un office de loge­ment social, Alpes Isère habi­tat.
Un domi­cile loin de l’emploi, c’est dif­fi­cile à vivre quand il faut quo­ti­dien­ne­ment se rendre à Lyon ou dans les zones indus­trielles et logis­tiques de l’Isle d’Abeau ou la Ver­pillière. Dans un contexte où le trans­port en com­mun n’est pas la prio­ri­té. Cécile Dhai­naut et les mili­tants du Prin­temps isé­rois sont enga­gés depuis long­temps dans l’action pour le pro­lon­ge­ment du tram T3, qui s’arrête à Mey­zieu. Une voie fer­rée existe, elle relie Mey­zieu à Cré­mieu. Elle pour­rait accueillir le tram et ain­si des­ser­vir les loca­li­tés les plus impor­tantes du can­ton. Moins de bou­chons et de pol­lu­tion… les enjeux éco­lo­giques sont évi­dents.
Un dépar­te­ment inclu­sif, c’est aus­si une concep­tion ren­ver­sée de l’accès au sport et à la culture. Gérard Dezempte a fer­mé la MJC de Char­vieu-Cha­va­gneux. Inves­tis­se­ment finan­cé avec d’autres com­munes… qui se sont retrou­vées sans droit sur un équi­pe­ment qu’elles avaient payé. Vingt-trois inter­ve­nants sont res­tés sur le car­reau. Déci­sion là encore jus­ti­fiée par l’attrait exer­cé sur « ces gens dont nous ne vou­lons pas » par des acti­vi­tés finan­ciè­re­ment acces­sibles.
Dans ce contexte dif­fi­cile, la cam­pagne élec­to­rale est lan­cée. A Char­vieu-Cha­va­gneux, le Prin­temps isé­rois relève un beau défi.

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Une politique sociale se construit avec les travailleurs sociaux !

Le Prin­temps isé­rois pro­pose de mettre les tra­vailleurs sociaux au cœur du dis­po­si­tif du dépar­te­ment. Ils connaissent leur métier, ils connaissent les publics : ils doivent par­ti­ci­per à l’élaboration des poli­tiques publiques. Lors des assises de la soli­da­ri­té, évi­dem­ment, mais aus­si tout au long du man­dat, avec leurs retours d’expérience sur ce qui marche et ce qui doit être amé­lio­ré.

Simplifier les démarches

Trop de gens aban­donnent devant des dos­siers com­pli­qués, fas­ti­dieux et des délais trop longs. Cher­cher à décou­ra­ger celles et ceux qui ont besoin de la soli­da­ri­té, ce que fait la droite, est mal­sain. Le Prin­temps isé­rois pro­pose de retis­ser des réseaux d’assistants sociaux de proxi­mi­té.

Un service public du troisième âge

Pen­dant le man­dat, des éta­blis­se­ments ont choi­si de décon­ven­tion­ner avec le dépar­te­ment pour mon­ter leurs tarifs, comme celui de Seys­sins. Et pour les rési­dents qui ne pou­vaient pas payer plus de 3 000 euros par mois ? Le dépar­te­ment leur a dit de démé­na­ger, à Saint-Égrève ou ailleurs. Or les gens ne sont pas des pions qu’on déplace comme sur un échi­quier. Dans un Ehpad, il y a des liens sociaux entre rési­dents et avec les soi­gnants : c’est ce qui donne envie à la vie d’être vécue. Quelque chose qui ne doit plus arri­ver.

Co-construire avec les bénéficiaires

« Faire du social », ce n’est pas faire ce que nous pen­sons être bien pour les autres. Ça, c’est la cha­ri­té. La soli­da­ri­té, c’est construire avec les gens qui en ont besoin une poli­tique pour que les concer­nés puissent s’en sor­tirent tou­jours mieux demain.

Sylvain
Syl­vain Prat, socia­liste, can­di­dat dans le can­ton de Fon­taine-Seys­si­net-Pari­set.

Le social, c’est phénoménal

Sylvain Prat, 31 ans, est vice-président du CCAS de Seyssinet-Pariset. En juin, il sera candidat pour le Printemps isérois.

« Pen­dant six ans, la droite a détri­co­té les poli­tiques sociales menées pen­dant des décen­nies en Isère. La soli­da­ri­té est deve­nue de la cha­ri­té, le dépar­te­ment se conten­tant de res­pec­ter stric­te­ment ses obli­ga­tions légales », constate Syl­vain Prat. La loi pré­voit que le dépar­te­ment doit être le chef de file de l’action sociale, et donc être une loco­mo­tive : « le Prin­temps a pour objec­tif de remettre la soli­da­ri­té au cœur des poli­tiques du dépar­te­ment, et de sor­tir des simples logiques de cha­ri­té ».

Pour lui, la soli­da­ri­té n’est pas un gros mot, contrai­re­ment à ce que pense la droite : c’est créer du vivre ensemble et ne lais­ser per­sonne au bord du che­min. C’est aus­si une valeur, et une envie car on a tous dans notre entou­rage des per­sonnes qui ont besoin de notre soli­da­ri­té : des per­sonnes âgées, qui ont besoin d’être accom­pa­gnées dans la trans­for­ma­tion de leur domi­cile et ain­si conti­nuer à habi­ter chez elles, des enfants, qui ont besoin de pro­tec­tion… On peut soi-même subir des acci­dents de vie.

Trois axes de travail

Pour entrer dans l’action, Syl­vain Prat dresse un che­min : « si la gauche gagne le dépar­te­ment, nous orga­ni­se­rons dès le début du man­dat de grandes assises de la soli­da­ri­té pour jouer notre rôle de loco­mo­tive et réunir tous les acteurs autour d’une même table : asso­cia­tions, dépar­te­ment, État, col­lec­ti­vi­tés locales… « 
Syl­vain Prat met sur la table trois axes de tra­vail. Le pre­mier doit être la pré­ven­tion. « La soli­da­ri­té, c’est aider ceux qui décrochent, mais aus­si faire en sorte que les gens ne décrochent pas. » Per­sonne n’a la pré­ten­tion de vivre avec des aides, tout le monde veut vivre de son tra­vail. Il faut donc pré­ve­nir, don­ner le petit « coup de pouce » pour que les gens ne tombent pas dans la pré­ca­ri­té. Ce sera un fil rouge du man­dat.
Second axe, les per­sonnes âgées. Il faut accom­pa­gner le vieillis­se­ment, en per­met­tant le main­tien à domi­cile. Le sys­tème d’Ehpad est à bout de souffle (voir ci-contre) : il faut réin­ven­ter la manière d’aider nos aînés.
Enfin, le troi­sième sera un tra­vail de construc­tion d’un par­cours pour les mineurs iso­lés. « Le dépar­te­ment doit mettre tout le monde autour de la table pour que le jour de vos 18 ans, vous ne vous retrou­viez pas livré à vous-même ! » affirme Syl­vain.
Une méthode, des pro­po­si­tions. De quoi séduire.

Louis Zarans­ki

Pauline
Pau­line Couvent, can­di­date dans le can­ton de Gre­noble III dans un qua­dri­nome EELV, FI, PCF, Go citoyen­ne­té.

Une nouvelle génération prête à gérer l’Isère

Pauline Couvent, ingénieure de 34 ans, est candidate pour le Printemps isérois dans le canton de Grenoble 3.

Jamais élue, Pau­line est mili­tante éco­lo­giste depuis sept ans. Pour elle, le débat public doit être éclai­ré par une réflexion scien­ti­fique et ration­nelle.

C’est d’ailleurs ce qui lui plaît, dans le Prin­temps isé­rois : « j’ai la chance de me pré­sen­ter avec Simon Billouet de LFI, Syl­vie Ber­ne­zet de Go citoyen­ne­té et Auré­lien Gaillard du PCF : c’est une vraie richesse pour construire du com­mun. Avec le Prin­temps, toutes les for­ma­tions poli­tiques ont su mettre leur égo de côté, et les citoyens s’emparent de la démarche ».

Plus d’un millier de signatures

De fait, depuis la paru­tion de la pre­mière trame pro­gram­ma­tique, un mil­lier d’Isérois ont signé l’appel – fin avril – et se sont inves­tis au tra­vers du site par­ti­ci­pa­tif pour construire le pro­gramme.

La pre­mière res­ti­tu­tion avait lieu same­di 24 avril, et a débou­ché sur trois axes : « rede­ve­nir un dépar­te­ment qui pro­tège, avec la crise sani­taire qui devient chaque jour davan­tage une crise sociale », « assu­rer la tran­si­tion envi­ron­ne­men­tale, avec la crise cli­ma­tique qui est déjà là, et faire du Dépar­te­ment un acteur majeur de la lutte contre le réchauf­fe­ment cli­ma­tique » et « chan­ger les logiques de tra­vail avec les habi­tants et les dif­fé­rents acteurs du dépar­te­ment ».

Face à la droite qui a appli­qué une logique des­cen­dante pen­dant six ans, on com­prend la volon­té d’une logique de co-éla­bo­ra­tion et de démo­cra­tie par­ti­ci­pa­tive.

Louis Zarans­ki

Retisser les liens, préparer demain

Pau­line et ses co-lis­tiers ont des dizaines de pro­po­si­tions, que vous pour­rez retrou­ver sur le site du Prin­temps isé­rois. Elle a tenu à en déve­lop­per quelques-unes :

Créer un RSA jeunes pour les 18–24 ans, oubliés du droit com­mun. Celui-ci doit être un outil pour créer un filet de sécu­ri­té, mais éga­le­ment pour accom­pa­gner ces jeunes vers l’insertion, en don­nant les moyens aux tra­vailleurs sociaux d’être de véri­tables tis­seurs de liens, et pas seule­ment des pres­ta­taires.

Ren­for­cer le Fonds de soli­da­ri­té pour le loge­ment (FSL), dont le bud­get a été dimi­nué de 20 % pen­dant le man­dat

Créer un Plan d’action dépar­te­men­tal pour le loge­ment, en concer­ta­tion avec les bailleurs sociaux, pour assu­rer la suite du par­cours rési­den­tiel à celles et ceux qui sont accueillis en héber­ge­ment d’urgence.

Être capable d’identifier l’impact car­bone de chaque poli­tique, de la même manière qu’on fait des pro­jec­tions bud­gé­taires. Cet outil per­met­tra d’éclairer les élus et les habi­tants pour qu’ils fassent des choix en toute connais­sance des choses.

Iso­ler ther­mi­que­ment tout le parc loca­tif du dépar­te­ment et les bâti­ments publics dont il a la charge, en pre­mier lieu les col­lèges.
Déve­lop­per les pistes cyclables en voie propre et accom­pa­gner les uti­li­sa­teurs du vélo élec­trique, pour en faire, là ou c’est pos­sible, une réelle alter­na­tive à la voi­ture.

Réin­ves­tir le SMMAG et y prendre une place impor­tante pour co-construire avec les autres acteurs les mobi­li­tés de demain.

Démocratie. Faire pour et avec les habitants

Il y a des dépar­te­ments comme le Gers qui pro­posent des bud­gets par­ti­ci­pa­tifs : c’est un bon outil pour choi­sir les pro­jets que les gens veulent voir être mis en place, et ça per­met de faire de la péda­go­gie autour des com­pé­tences du conseil dépar­te­men­tal.

Les élus ne doivent pas déci­der tous seuls. Il faut co-construire avec les agents du dépar­te­ment, en fonc­tion de la thé­ma­tique étu­diée : avec les tra­vailleurs sociaux pour les poli­tiques sociales, etc. Il faut éga­le­ment aller au-delà des enquêtes publiques obli­ga­toires de par la loi, pour que les habi­tants puissent amen­der les pro­jets, pro­po­ser et tirer des bilans une fois les réa­li­sa­tions en place. Le Prin­temps veut aus­si uti­li­ser le réfé­ren­dum local ins­crit dans la loi pour les pro­jets qui impactent le long terme. Avec une telle logique, peut-être enten­drons-nous par­ler du dépar­te­ment entre 2021 et 2027 ?

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