GHM de Grenoble. Le parquet requiert le renvoi de Bernard Bensaid devant la justice

Par Manuel Pavard

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Le GHM devra sans doute renoncer à récupérer les 6,4 millions d'euros détournés par Bernard Bensaid (sur 8 millions à l'origine) pour renflouer d'autres cliniques du groupe.
Le parquet de Grenoble a requis, mardi 30 septembre, le renvoi en correctionnelle du groupe Avec (anciennement Doctegestio) - propriétaire du Groupe hospitalier mutualiste (GHM) - et de son ex-PDG Bernard Bensaid. Ceci, pour "détournement de fonds publics et privés" et "prise illégale d'intérêts", au détriment de la Mut', a annoncé le procureur de la République lors d'une conférence de presse, ce jeudi 2 octobre. L'audience pourrait avoir lieu en septembre 2026.

Nou­vel épi­sode dans l’in­ter­mi­nable saga judi­ciaire du Groupe hos­pi­ta­lier mutua­liste (GHM) et du groupe Avec, repre­neur de la cli­nique mutua­liste gre­no­bloise en 2020 — alors sous le nom de Doc­te­ges­tio. Il s’a­git cette fois des suites de l’in­for­ma­tion judi­ciaire ouverte en 2023 et ayant conduit à la mise en exa­men de l’ex-PDG Ber­nard Ben­said et de sa socié­té. L’une des mul­tiples pro­cé­dures visant actuel­le­ment le sul­fu­reux indus­triel.

Le pro­cu­reur de la Répu­blique de Gre­noble Étienne Man­teaux l’a annon­cé ce jeu­di 2 octobre, lors d’une confé­rence de presse : « Mar­di, le par­quet a remis au juge d’ins­truc­tion un réqui­si­toire défi­ni­tif aux fins de ren­voi de M. Ben­said et de la socié­té Avec devant le tri­bu­nal cor­rec­tion­nel. » Le tout sous deux qua­li­fi­ca­tions dif­fé­rentes : le « détour­ne­ment de fonds publics et pri­vés » et la « prise illé­gale d’in­té­rêts ».

Étienne Man­teaux, pro­cu­reur de Gre­noble, a tenu un point presse pour annon­cer la demande de ren­voi en cor­rec­tion­nelle de Ber­nard Ben­said adres­sée par le par­quet.

Le par­quet de Gre­noble a éga­le­ment pro­po­sé une date d’au­dience, à savoir le 8 sep­tembre 2026. Ber­nard Ben­said est en effet « déjà pour­sui­vi dans le cadre d’une convo­ca­tion en jus­tice à cette audience », pré­cise le magis­trat. Et ce, pour des faits d’a­bus de bien social concer­nant la cli­nique de Char­treuse, à Voi­ron. Pour le reste, la balle est désor­mais dans le camp du juge d’ins­truc­tion, « qui déci­de­ra des suites à don­ner à ce dos­sier à la lumière de notre réqui­si­toire défi­ni­tif », indique Étienne Man­teaux.

« Des fonds étaient pré­le­vés dans des struc­tures appa­rais­sant plu­tôt en bonne san­té finan­cière, comme le GHM, pour ren­flouer les comptes de socié­tés en dif­fi­cul­té. »

Étienne Man­teaux, pro­cu­reur de la Répu­blique de Gre­noble

Le par­quet a en tout cas consi­dé­ré que les infrac­tions étaient « lar­ge­ment consti­tuées ». Pour le détour­ne­ment de fonds, le pro­cu­reur pointe ain­si une « confu­sion des patri­moines » de la part de Ber­nard Ben­said, auquel il est repro­ché d’a­voir, dans le cadre de la ges­tion du GHM, trans­fé­rer 8 mil­lions d’eu­ros à Doc­to­care. Une socié­té sans sala­riés, qua­li­fiée par la Métro­pole de Gre­noble de « mutuelle de façade », qui avait « pour but de refi­nan­cer dif­fé­rentes cli­niques éga­le­ment déte­nues par M. Ben­said » (dans l’Aube, dans la Manche, en Seine-et-Marne), explique Étienne Man­teaux.

Autre­ment dit, tra­duit ce der­nier, « des fonds étaient pré­le­vés dans des struc­tures appa­rais­sant plu­tôt en bonne san­té finan­cière, comme le GHM, pour ren­flouer les comptes de socié­tés en dif­fi­cul­té ». Des éta­blis­se­ments qui se sont d’ailleurs tous retrou­vés en redres­se­ment judi­ciaire, voire en liqui­da­tion pour cer­tains.

« Très peu d’espoir que ces fonds soient reversés au GHM »

Sur ces 8 mil­lions d’eu­ros, envi­ron 1,6 mil­lions ont pu être rever­sés, à la demande de la jus­tice, au pro­fit de la Mut’. Mais « il reste un trou esti­mé de 6,4 mil­lions d’eu­ros qui, compte tenu de la situa­tion finan­cière des socié­tés (…), laisse très peu d’es­poir que ces fonds soient rever­sés au GHM », affirme le pro­cu­reur de la Répu­blique.

Le GHM est aujourd’­hui géré par deux admi­nis­tra­teurs pro­vi­soires, dont le main­tien a été confir­mé par la cour d’ap­pel en avril 2025.

Quant à la prise illé­gale d’in­té­rêts, celle-ci est liée au contrat conclu par la cli­nique mutua­liste avec Doc­te­ges­tio (deve­nu depuis Avec) pour la four­ni­ture de ser­vice sup­port. Soit vingt-deux fac­tures réglées par le GHM pour un mon­tant total de 4,2 mil­lions d’eu­ros. Ciblée dès l’o­ri­gine par le col­lec­tif des sala­riés et usa­gers, cette conven­tion a été annu­lée par la cour d’ap­pel de Gre­noble en 2022, pour avoir été « conclue de manière tout à fait irré­gu­lière », sou­ligne le magis­trat.

Ber­nard Ben­said a en outre fait l’ob­jet de « sai­sies patri­mo­niales », pour­suit-il. À savoir 700 000 euros pré­le­vés sur ses comptes per­son­nels, ain­si qu’un cau­tion­ne­ment de 500 000 euros dans le cadre de son contrôle judi­ciaire.

Quelles peines risque-t-il ? Ber­nard Ben­said encourt dix ans d’emprisonnement et un mil­lion d’eu­ros d’a­mende pour le détour­ne­ment de fonds, cinq ans d’emprisonnement et 500 000 euros d’a­mende pour la prise illé­gale d’in­té­rêts. Pour le groupe Avec, les amendes encou­rues en tant que per­sonne morale sont res­pec­ti­ve­ment de 5 mil­lions et 2,5 mil­lions d’eu­ros. L’an­cien PDG a par ailleurs éco­pé d’une inter­dic­tion de ges­tion pour six ans, pro­non­cée le 27 mai der­nier par le tri­bu­nal cor­rec­tion­nel de Bobi­gny.

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