Législative partielle : Lyes Louffok en mission pour les droits des enfants
Par Manuel Pavard
/
C’est le thème qui l’a plongé dans l’arène politique et c’est celui qu’il a choisi pour sa réunion publique, ce mercredi 8 janvier, à la Maison du tourisme de Grenoble, à quatre jours du premier tour de la législative partielle dans la première circonscription de l’Isère. « J’ai voulu que cette soirée soit consacrée à l’enfance, car c’est un sujet écarté du débat politique et médiatique », explique Lyes Louffok, devant 150 personnes. Aux côtés du candidat du Nouveau Front populaire, Laurence Rossignol, sénatrice PS du Val-de-Marne et ancienne ministre de la Famille, et Marianne Maximi, députée LFI du Puy-de-Dôme.
Éducatrice spécialisée, cette dernière connaît bien le sujet pour avoir travaillé à l’Aide sociale à l’enfance, avant d’être élue insoumise. « Toutes les politiques régressives, qu’elles portent sur le RSA, le logement, les migrants, etc, ont des conséquences directes sur les enfants », souligne ainsi Marianne Maximi.
La sénatrice socialiste, elle, est saluée par Lyes Louffok pour sa loi de 2016 : « C’était la première fois qu’une responsable politique regardait l’enfance et cette loi a ouvert de nouveaux droits aux enfants placés. » Et Laurence Rossignol de faire à son tour l’éloge de l’ancien enfant placé : « Nous avons besoin de Lyes Louffok à l’Assemblée, besoin de garçons comme lui pour s’occuper des droits de l’enfance qui sont aujourd’hui dans un angle mort du débat. »
« Je souhaitais porter mes combats sur la protection des enfants, avec une volonté très forte d’en faire un sujet prioritaire », indiquait Lyes Louffok au Travailleur alpin, quelques heures avant la réunion publique, pour justifier sa candidature. S’il loue aujourd’hui le « beau signal » que constitue ce débat entre deux élues PS et LFI, dans un contexte national souvent tendu entre les deux formations, il n’élude pas pour autant les difficultés.
« J’avais fixé une condition, un cadre unitaire à gauche »
« Sur le papier », le militant des droits de l’enfant partait en effet avec un triple handicap : « être candidat dans une autre région, avec une gauche assez divisée localement, et après un député démissionnaire accusé de violences sexistes et sexuelles ». Pourtant, poursuit-il, « on a surmonté tous ces défis et on a réussi à obtenir une vraie cohésion entre les différents partis politiques » du Nouveau Front populaire.
Concernant la succession d’Hugo Prevost, Lyes Louffok évoque un joli « symbole ». « Un agresseur a été élu grâce au NFP et aujourd’hui, le NFP fait le choix d’investir quelqu’un qui a été victime de violences sexuelles », se félicite-t-il pudiquement. Mais pour le reste, rien n’a été simple. « La proposition faite par La France insoumise a été mise en discussion avec les autres partis. On a beaucoup échangé, mais j’avais fixé une condition, à savoir un cadre unitaire », raconte-t-il. « J’acceptais uniquement si j’étais le seul candidat de gauche. On a travaillé quelques semaines à cette unité, c’est pour cette raison que j’ai tardé à annoncer ma candidature. »
De fait, la réalité locale était compliquée, reconnaît-il, pointant « des divisions assez fortes à gauche, avec des échéances à venir » — en l’occurrence les municipales 2026. Mais pour Lyes Louffok, désigner « une personnalité non encartée, issue de la société civile, a permis de créer les conditions nécessaires à cette union. Si j’avais été un militant insoumis pur jus, ça aurait été plus difficile. » Une allusion notamment aux velléités de la fédération PS de l’Isère, qui a un temps envisagé d’investir Amandine Germain.
« J’ai estimé que toutes les opportunités liées à mon combat pour les enfants étaient bonnes à saisir. Ce sont des sujets qu’on renvoyait en bas de la pile (…), qu’on a souvent tendance à dépolitiser. »
Lyes Louffok
« J’étais le gage d’union », affirme Lyes Louffok, qui l’admet toutefois : « Ce n’est pas un cadeau. Je leur rends presque un service », plaisante-t-il. Celui-ci venait en outre d’être battu aux législatives dans le Val-de-Marne, en juin dernier, dans « une circonscription très difficile, avec des bastions de droite ». Cette fois-ci, il s’attelle à un nouveau défi, dans un territoire que la gauche a ravi aux macronistes à la faveur d’une triangulaire, mais sociologiquement moins favorable que les autres circonscriptions du Sud-Isère.
Lyes Louffok l’assure néanmoins, il a « pris [sa] décision en connaissance de cause ». « Quand on m’a proposé l’investiture, j’ai bien sûr eu le réflexe d’aller voir les résultats des dernières élections », explique-t-il. « Je savais que ça serait difficile et j’ai d’ailleurs longuement échangé avec Lucie Castets » — pressentie initialement pour représenter le NFP à ce scrutin.
Malgré tout, la tentation de repartir sur le terrain électoral pour porter sa lutte à l’Assemblée nationale a été la plus forte. Lyes Louffok en fait même une mission, un devoir : « J’ai estimé que toutes les opportunités liées à mon combat pour les enfants étaient bonnes à saisir. Ce sont des sujets qu’on renvoyait en bas de la pile. Je voulais donc mener une campagne tournée autour de ces thèmes, qu’on a souvent tendance à dépolitiser. » Et qui sont pourtant, selon lui, éminemment « de gauche ».
« Je ne dévierai pas de mon programme »
Une question vient alors naturellement : comment composer avec son manque d’ancrage local, face aux accusations de parachutage lancées par ses adversaires ? « Venir d’ailleurs, c’était un atout pour mettre tout le monde autour de la table », rétorque le candidat NFP. En étant totalement étranger aux rivalités et bisbilles de la gauche grenobloise, ce dernier a ainsi pu se situer au-dessus de la mêlée.
Lyes Louffok l’avoue cependant, c’était également un « handicap » au départ, pour bien maîtriser les dossiers majeurs de la circonscription. « Mais j’ai rencontré énormément de responsables locaux, de militants, et j’ai réussi à m’approprier ces sujets », confie-t-il, citant notamment « le CHU Grenoble Alpes et les difficultés d’accès aux soins » ou encore « les retards des services de la préfecture pour le renouvellement des titres de séjour ».
À l’approche du premier tour, le candidat du Nouveau Front populaire se dit ainsi confiant. Seul grain de sable dans la machine, la déclaration inattendue de Raphaël Glucksmann annonçant ce mercredi matin, dans une interview au Dauphiné libéré, que Place publique ne soutenait pas Lyes Louffok. « Je l’ai appris ce matin [NDLR : mercredi 8 janvier], comme vous », s’étonne ce dernier. Pour lui, « ce revirement de situation est soit un désaccord entre les directions nationale et départementale, soit un couac ». Il rappelle d’ailleurs qu’il a eu « plusieurs échanges et réunions avec les responsables locaux de Place publique, Maxence Alloto et Charles Priou ».
En cas de victoire, siégera-t-il dans les rangs insoumis, sur les bancs de l’Assemblée ? Lyes Louffok confirme : « Si je suis élu, je serai apparenté au groupe LFI. Je respecte les accords nationaux. » Mais sans faire de compromis sur ses combats de toujours. Il formule ainsi une promesse : « Je resterai fidèle à mes engagements envers les électeurs et je ne dévierai pas de mon programme. »
Tractage sur les marchés avec des députés LFI
Lyes Louffok sera ce vendredi 10 janvier sur les marchés de l’Estacade et de la Halle Saint-Claire, à Grenoble, pour une « action de terrain », à partir de 10 heures. Au programme : une distribution de tracts, en présence de plusieurs députés insoumis. Des figures de marque de LFI sont ainsi attendues à ses côtés, comme Mathilde Panot, Manuel Bompard, Clémence Guetté ou Danièle Obono.