GHM de Grenoble. Le parquet requiert le renvoi de Bernard Bensaid devant la justice
Par Manuel Pavard
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Nouvel épisode dans l’interminable saga judiciaire du Groupe hospitalier mutualiste (GHM) et du groupe Avec, repreneur de la clinique mutualiste grenobloise en 2020 — alors sous le nom de Doctegestio. Il s’agit cette fois des suites de l’information judiciaire ouverte en 2023 et ayant conduit à la mise en examen de l’ex-PDG Bernard Bensaid et de sa société. L’une des multiples procédures visant actuellement le sulfureux industriel.
Le procureur de la République de Grenoble Étienne Manteaux l’a annoncé ce jeudi 2 octobre, lors d’une conférence de presse : « Mardi, le parquet a remis au juge d’instruction un réquisitoire définitif aux fins de renvoi de M. Bensaid et de la société Avec devant le tribunal correctionnel. » Le tout sous deux qualifications différentes : le « détournement de fonds publics et privés » et la « prise illégale d’intérêts ».

Le parquet de Grenoble a également proposé une date d’audience, à savoir le 8 septembre 2026. Bernard Bensaid est en effet « déjà poursuivi dans le cadre d’une convocation en justice à cette audience », précise le magistrat. Et ce, pour des faits d’abus de bien social concernant la clinique de Chartreuse, à Voiron. Pour le reste, la balle est désormais dans le camp du juge d’instruction, « qui décidera des suites à donner à ce dossier à la lumière de notre réquisitoire définitif », indique Étienne Manteaux.
« Des fonds étaient prélevés dans des structures apparaissant plutôt en bonne santé financière, comme le GHM, pour renflouer les comptes de sociétés en difficulté. »
Étienne Manteaux, procureur de la République de Grenoble
Le parquet a en tout cas considéré que les infractions étaient « largement constituées ». Pour le détournement de fonds, le procureur pointe ainsi une « confusion des patrimoines » de la part de Bernard Bensaid, auquel il est reproché d’avoir, dans le cadre de la gestion du GHM, transférer 8 millions d’euros à Doctocare. Une société sans salariés, qualifiée par la Métropole de Grenoble de « mutuelle de façade », qui avait « pour but de refinancer différentes cliniques également détenues par M. Bensaid » (dans l’Aube, dans la Manche, en Seine-et-Marne), explique Étienne Manteaux.
Autrement dit, traduit ce dernier, « des fonds étaient prélevés dans des structures apparaissant plutôt en bonne santé financière, comme le GHM, pour renflouer les comptes de sociétés en difficulté ». Des établissements qui se sont d’ailleurs tous retrouvés en redressement judiciaire, voire en liquidation pour certains.
« Très peu d’espoir que ces fonds soient reversés au GHM »
Sur ces 8 millions d’euros, environ 1,6 millions ont pu être reversés, à la demande de la justice, au profit de la Mut’. Mais « il reste un trou estimé de 6,4 millions d’euros qui, compte tenu de la situation financière des sociétés (…), laisse très peu d’espoir que ces fonds soient reversés au GHM », affirme le procureur de la République.

Quant à la prise illégale d’intérêts, celle-ci est liée au contrat conclu par la clinique mutualiste avec Doctegestio (devenu depuis Avec) pour la fourniture de service support. Soit vingt-deux factures réglées par le GHM pour un montant total de 4,2 millions d’euros. Ciblée dès l’origine par le collectif des salariés et usagers, cette convention a été annulée par la cour d’appel de Grenoble en 2022, pour avoir été « conclue de manière tout à fait irrégulière », souligne le magistrat.
Bernard Bensaid a en outre fait l’objet de « saisies patrimoniales », poursuit-il. À savoir 700 000 euros prélevés sur ses comptes personnels, ainsi qu’un cautionnement de 500 000 euros dans le cadre de son contrôle judiciaire.
Quelles peines risque-t-il ? Bernard Bensaid encourt dix ans d’emprisonnement et un million d’euros d’amende pour le détournement de fonds, cinq ans d’emprisonnement et 500 000 euros d’amende pour la prise illégale d’intérêts. Pour le groupe Avec, les amendes encourues en tant que personne morale sont respectivement de 5 millions et 2,5 millions d’euros. L’ancien PDG a par ailleurs écopé d’une interdiction de gestion pour six ans, prononcée le 27 mai dernier par le tribunal correctionnel de Bobigny.