Isère. Les communistes présentent leur plan d’action contre « le fléau du narcotrafic »

Par Manuel Pavard

/

Image principale
Danièle Berthollet, Serge Benito, Jérémie Giono et Simon Gensburger devant la préfecture, avec le tract des communistes sur le narcotrafic.
Les communistes isérois ont annoncé ce mardi 17 juin le lancement de leur campagne contre le narcotrafic. Fustigeant la politique démagogique et inefficace de la droite, ils proposent un plan d'action basé sur des solutions concrètes, mettant notamment en avant les résultats des municipalités PCF d'Échirolles et Saint-Martin-d'Hères.

C’est devant la pré­fec­ture de l’I­sère que les com­mu­nistes ont déci­dé d’an­non­cer le lan­ce­ment de leur cam­pagne contre « le fléau du nar­co­tra­fic », ce mar­di 17 juin. Un lieu qui n’a pas été choi­si au hasard. « C’est le sym­bole de la poli­tique de l’É­tat et de sa défaillance, en matière de stra­té­gie glo­bale et de baisse des moyens », explique Jéré­mie Gio­no, secré­taire dépar­te­men­tal du PCF Isère. L’i­dée, elle, est née lors de la visite de Fabien Rous­sel, en novembre der­nier. Et ce, dans une période où les règle­ments de comptes et fusillades se suc­cé­daient sur les points de deal locaux, pla­çant Gre­noble sous les feux des pro­jec­teurs.

Les com­mu­nistes ont choi­si de lan­cer leur cam­pagne devant la pré­fec­ture, qui sym­bo­lise « la défaillance de l’É­tat ».

Der­rière la démarche de la fédé­ra­tion de l’I­sère, la volon­té de « ne pas lais­ser les habi­tants seuls avec uni­que­ment le dis­cours de la droite et de l’ex­trême droite ». Les­quelles sont « une par­tie du pro­blème et pas la solu­tion », tacle le res­pon­sable com­mu­niste, poin­tant leurs contra­dic­tions entre les dis­cours et les actes. « La poli­tique de la droite, c’est briller devant les camé­ras, faire des opé­ra­tions spec­tacles… Mais côté moyens, sur la durée, on n’y est clai­re­ment pas », assène-t-il.

« La politique de la droite, c’est briller devant les caméras »

Jéré­mie Gio­no déplore ain­si « la sup­pres­sion de la police de proxi­mi­té par Nico­las Sar­ko­zy ». Avec depuis, un défi­cit d’une cen­taine de poli­ciers natio­naux sur la zone police de l’ag­glo­mé­ra­tion gre­no­bloise. Sans oublier, plus récem­ment, la réforme de la police judi­ciaire, mar­quée par « un détri­co­tage des filières d’en­quête ». Un tableau glo­bal bien sombre, qui « pro­voque une crise des voca­tions », pré­cise-t-il, s’ap­puyant sur les échanges conduits par le PCF avec cer­tains syn­di­ca­listes poli­ciers (de la CGT Inté­rieur, mais pas seule­ment).

Fus­ti­geant une doc­trine « tota­le­ment inef­fi­cace », Jéré­mie Gio­no dénonce la « poli­tique du chiffre » menée par les ministres de l’In­té­rieur suc­ces­sifs depuis vingt ans. Une poli­tique qui « per­met d’af­fi­cher de belles opé­ra­tions ‘place nette’, avec des déploie­ments de forces de l’ordre, de belles images »… Pro­blème, « der­rière, il n’y a plus rien », sou­ligne le secré­taire dépar­te­men­tal. Car la logique est tou­jours la même. Pour avoir des chiffres rapi­de­ment, « il vaut mieux arrê­ter les petits dea­lers et taper en bas de la chaîne » que viser le haut du spectre, ces « gros bon­nets rela­ti­ve­ment épar­gnés », accuse le PCF.

Des propositions pour les classes populaires

Alors que la gauche est, selon eux, trop sou­vent cari­ca­tu­rée sur les ques­tions de sécu­ri­té, les com­mu­nistes entendent por­ter un ensemble de pro­po­si­tions poli­tiques « auprès des classes popu­laires, qui sont les pre­mières vic­times des tra­fi­quants » de par leurs lieux de vie, sou­vent au plus près des points de deal.

Le PCF Isère pré­sente donc sur ses tracts un plan natio­nal d’ac­tion. Un vaste pro­gramme, décli­né en huit points : réta­blir la police de proxi­mi­té, « pilier de la sécu­ri­té du quo­ti­dien » ; frap­per la tête de la « pyra­mide du crime » ; ren­for­cer les contrôles doua­niers ; lut­ter réel­le­ment contre le blan­chi­ment ; faire de la consom­ma­tion « un sujet de san­té publique » ; se réap­pro­prier l’es­pace public ; repen­ser le sys­tème péni­ten­tiaire ; don­ner aux poli­ciers les moyens de se recen­trer sur leurs mis­sions.

Aman­dine Demore à la tri­bune lors du ras­sem­ble­ment pour l’ou­ver­ture d’un com­mis­sa­riat de plein exer­cice à Échi­rolles, en novembre 2024.

Ces pro­po­si­tions ont par ailleurs été regrou­pées dans une note remise en jan­vier 2025 au ministre de l’In­té­rieur, par une délé­ga­tion d’é­lus com­mu­nistes dont fai­sait notam­ment par­tie Aman­dine Demore. La maire d’É­chi­rolles s’est par­ti­cu­liè­re­ment dis­tin­guée sur le sujet au cours des der­niers mois, mon­tant au front pour la fer­me­ture du Car­rare ou pour récla­mer l’ou­ver­ture d’un com­mis­sa­riat de plein exer­cice dans la com­mune. Un com­bat que l’é­dile a pris à bras-le-corps, avec une péti­tion ini­tiée par la ville recueillant près de 5000 signa­tures ou un ras­sem­ble­ment qui a réuni plus de 400 per­sonnes devant la mai­rie, en novembre 2024.

Échirolles et Saint-Martin-d’Hères, « municipalités communistes qui agissent »

Aman­dine Demore sym­bo­lise ain­si ces « muni­ci­pa­li­tés com­mu­nistes [qui] agissent », vante Jéré­mie Gio­no. Mais si la maire d’É­chi­rolles, apôtre de la « com­plé­men­ta­ri­té entre la police natio­nale et la police muni­ci­pale », a été davan­tage média­ti­sée, Saint-Mar­tin-d’Hères n’est pas non plus en reste avec sa « stra­té­gie par­te­na­riale à bas bruit ». Une méthode « très effi­cace » met­tant en lien « les ser­vices de pré­ven­tion, les bailleurs sociaux, la police natio­nale » et l’en­semble des acteurs impli­qués.

À Saint-Mar­tin-d’Hères, cela a d’ailleurs per­mis « d’é­ra­di­quer cer­tains points de vente ». Vitrine de cette poli­tique, Renau­die, haut lieu tra­di­tion­nel du deal. Un quar­tier aujourd’­hui plus apai­sé, que les habi­tants ont pu en par­tie se réap­pro­prier grâce à cette stra­té­gie glo­bale basée notam­ment sur l’a­mé­na­ge­ment urbain et le retour des ser­vices publics — comme l’illustre la « relo­ca­li­sa­tion du centre de san­té de l’É­toile ».

En rame­nant des ser­vices à Renau­die, à l’i­mage du centre de san­té l’É­toile, la ville de Saint-Mar­tin-d’Hères a contri­bué à paci­fier le quar­tier.

Mal­gré ces réus­sites indé­niables, les com­mu­nistes res­tent tou­te­fois lucides quant aux limites des poli­tiques locales. « S’il n’y a pas l’É­tat qui suit, on est loin du compte », recon­naît Jéré­mie Gio­no. « Dans l’ag­glo­mé­ra­tion, il y a un tel pro­blème de guerre des gangs que la droite fait de la com’ pour essayer de se faire élire des­sus. » Et ce, « alors qu’ils sont eux-mêmes res­pon­sables des poli­tiques qui ont conduit à l’ex­plo­sion de ce tra­fic », ajoute le diri­geant PCF.

« Un combat de longue haleine »

Pour la même rai­son, les com­mu­nistes isé­rois ne sont pas tendres envers la muni­ci­pa­li­té de Fon­taine et l’o­pé­ra­tion d’oc­cu­pa­tion des points de deal menée par la majo­ri­té. Outre « la stig­ma­ti­sa­tion du quar­tier », ils dénoncent la ligne du maire MoDem « Franck Lon­go qui s’ins­crit tota­le­ment dans la stra­té­gie gou­ver­ne­men­tale ». Pour­tant, si la situa­tion s’est dégra­dée à Fon­taine, c’est « en grande par­tie à cause de sa poli­tique », accuse Jéré­mie Gio­no, évo­quant notam­ment « le déman­tè­le­ment des ser­vices de pré­ven­tion ».

Simon Gens­bur­ger, com­mu­niste fon­tai­nois, enfonce le clou. Avec cette opé­ra­tion, affirme-t-il, « le deal s’est dépla­cé de Mai­son­nat aux Fon­tai­nades ». Franck Lon­go aurait même, assure-t-il, « obli­gé des agents de la ville à venir » sur les lieux pour ser­vir sa pro­mo­tion. Un maire qui, d’a­près le mili­tant PCF, « fra­gi­lise le tra­vail des acteurs de ter­rain » et n’é­ta­blit « aucun lien avec les habi­tants ». Soit tout le contraire des mai­ries d’É­chi­rolles et Saint-Mar­tin-d’Hères, qui « tra­vaillent avec les asso­cia­tions, les com­mer­çants, les acteurs du quar­tier ».

« Ce qui fera recu­ler à long terme le nar­co­tra­fic, ce sont les ser­vices publics », estime de son côté Serge Beni­to, conseiller muni­ci­pal mar­ti­né­rois. Un « com­bat de longue haleine » auquel se pré­parent les com­mu­nistes. Et qui pas­se­ra dans un pre­mier temps par la dis­tri­bu­tion, dans l’en­semble des sec­teurs concer­nés, des quelque 20 000 tracts impri­més par le PCF Isère.

Partager cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *