Grenoble. La mobilisation paye : le bureau de poste Jean-Perrot va rouvrir

Par Manuel Pavard

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Syndicalistes, habitants, représentants des unions de quartier et élus, réunis au sein du collectif "J'aime ma poste", se sont rassemblés devant la poste Jean-Perrot le 21 mars au matin.
Le collectif "J'aime ma poste" organisait un rassemblement, vendredi 21 mars, devant le bureau de poste Jean-Perrot, au croisement des quartiers Malherbe et Teisseire. Fermé depuis l'incendie lié aux émeutes urbaines de juin 2023, celui-ci doit enfin rouvrir cet été. Une victoire de la mobilisation - des syndicats, des unions de quartier, de la municipalité - saluée par les manifestants, qui guettent néanmoins les décisions de La Poste concernant d'autres bureaux grenoblois.

« Nous ne pou­vions pas ne pas valo­ri­ser l’im­por­tance de cette déci­sion pour les habi­tants du quar­tier Mal­herbe Teis­seire, qui vont pou­voir retrou­ver leur ser­vice public de la poste en plein exer­cice. » Comme l’a expli­qué Fran­çois Auguste, membre du col­lec­tif « J’aime ma poste », celui-ci se mobi­li­sait, une fois n’est pas cou­tume, pour célé­brer une vic­toire, ce ven­dre­di 21 mars. Et non contre une fer­me­ture, à l’ins­tar des der­niers ras­sem­ble­ments devant le bureau d’Al­sace-Lor­raine, qui a bais­sé le rideau le 15 novembre der­nier. Le col­lec­tif sou­hai­tait ain­si annon­cer le démar­rage des tra­vaux au bureau de poste Jean-Per­rot et son ouver­ture pro­bable « cet été, voire fin juin ».

Fran­çois Auguste a pris la parole devant les autres membres du col­lec­tif. © Manuel Pavard

C’est peu dire que cette nou­velle était atten­due avec impa­tience par les syn­di­cats de pos­tiers (Sud PTT et CGT), usa­gers, unions de quar­tier et élus, réunis au sein du col­lec­tif « J’aime ma poste ». Car au moment de sa réou­ver­ture, cela fera deux ans que le bureau Jean-Per­rot a fer­mé ses portes au public. Le bâti­ment avait été incen­dié dans la soi­rée du 30 juin 2023, lors des émeutes urbaines qui avaient embra­sé Gre­noble et l’en­semble des villes fran­çaises, à la suite de la mort du jeune Nahel, tué par un poli­cier à Nan­terre.

« Cette déci­sion est le résul­tat com­bi­né de l’im­por­tante mobi­li­sa­tion des usa­gers et des com­mer­çants, sous l’im­pul­sion de l’u­nion de quar­tier, et en même temps, du véto oppo­sé par le maire de Gre­noble Éric Piolle à cette fer­me­ture. »

Fran­çois Auguste, col­lec­tif « J’aime ma poste »

Depuis, mal­gré de nom­breuses ini­tia­tives, la direc­tion de La Poste n’a­vait pas bou­gé… Jus­qu’à l’an­nonce, il y a quelques jours, d’une pro­chaine réou­ver­ture. « Cette déci­sion est le résul­tat com­bi­né de l’im­por­tante mobi­li­sa­tion des usa­gers et des com­mer­çants, sous l’im­pul­sion de l’u­nion de quar­tier, et en même temps, du véto oppo­sé par le maire de Gre­noble Éric Piolle à cette fer­me­ture », a sou­li­gné Fran­çois Auguste dans son dis­cours. Les maires dis­posent en effet de cette pos­si­bi­li­té de véto lors­qu’un bureau de poste mena­cé est situé en quar­tier prio­ri­taire poli­tique de la ville (QPV).

La pre­mière adjointe Isa­belle Peters repré­sen­tait la mai­rie de Gre­noble, aux côtés des repré­sen­tants des unions de quar­tier et de Fran­çois Auguste, porte-parole du col­lec­tif. © Manuel Pavard

Dans le cas de Jean-Per­rot, Éric Piolle, repré­sen­té au ras­sem­ble­ment par la pre­mière adjointe Isa­belle Peters, a donc uti­li­sé cette dis­po­si­tion pré­vue par le contrat reliant La Poste, l’É­tat et l’As­so­cia­tion des maires de France. De Fran­çois Auguste à Isa­belle Peters, en pas­sant par Jean-Marc Rosel­li et Jean-Noël Pusel, pré­si­dents res­pec­tifs des unions de quar­tier Mal­herbe et Abbaye-Jou­haux, ou le conseiller régio­nal Sté­phane Gem­ma­ni, tous les ora­teurs pré­sents ven­dre­di matin se sont féli­ci­tés de ce « suc­cès ». Tous ont aus­si insis­té sur l’im­por­tance de cette mis­sion de ser­vice public, « un tré­sor de notre Répu­blique », selon Sté­phane Gem­ma­ni.

« Hors de question qu’il y ait de nouvelles fermetures de bureaux »

Néan­moins, à l’i­mage d’I­sa­belle Peters rap­pe­lant la néces­site de demeu­rer « vigi­lant », per­sonne n’en­tend bais­ser la garde par­mi les repré­sen­tants du col­lec­tif. « On appelle les citoyens et les habi­tants des quar­tiers de Gre­noble à res­ter mobi­li­sés car pour nous, il est hors de ques­tion qu’il y ait de nou­velles fer­me­tures de bureaux de poste », assène Serge Beni­to, pos­tier et élu CGT. « Que ce soit les Eaux-Claires, Sta­lin­grad ou Baja­tière, tous les bureaux doivent res­ter ouverts parce qu’ils cor­res­pondent à un besoin de ser­vice public, notam­ment pour les per­sonnes âgées, les per­sonnes à mobi­li­té réduite, les com­mer­çants… »

Les mani­fes­tants ont éga­le­ment rap­pe­lé leur oppo­si­tion à toute nou­velle fer­me­ture, notam­ment à Sta­lin­grad et Baja­tière. © Manuel Pavard

Fran­çois Auguste a d’ailleurs lui aus­si deman­dé à la direc­tion de La Poste de « renon­cer aux fer­me­tures qu’elle avait envi­sa­gées à Sta­lin­grad et à Baja­tière ». À ce sujet, les der­nières infor­ma­tions semblent plu­tôt ras­su­rantes, du moins à court terme. « On attend confir­ma­tion mais La Poste s’en­ga­ge­rait à ce qu’il n’y ait pas de fer­me­ture de bureaux de poste jus­qu’aux élec­tions muni­ci­pales », rap­porte Serge Beni­to. Un répit assu­ré jus­qu’au prin­temps 2026 donc. Mais après ? « Ça veut dire qu’il y a quand même une épée de Damo­clès sus­pen­due », nuance le mili­tant CGT, pour lequel cette déci­sion ne doit pas dépendre de l’é­ti­quette de la majo­ri­té muni­ci­pale.

Fran­çois Auguste a évo­qué les menaces liées à la nou­velle loi pos­tale. © Manuel Pavard

Le scru­tin à venir n’est tou­te­fois pas le seul sujet d’in­quié­tude du col­lec­tif « J’aime ma poste ». Fran­çois Auguste l’a indi­qué dans sa prise de parole, « en 2025, va être mise en débat une nou­velle loi pos­tale car la mis­sion de ser­vice uni­ver­sel pos­tal confiée à La Poste en 2010 arrive à son terme ». Il redoute le pro­jet pré­vu par le gou­ver­ne­ment, qui veut notam­ment « réduire les dis­tri­bu­tions de cour­rier en sup­pri­mant l’o­bli­ga­tion de le dis­tri­buer six jours sur sept » mais éga­le­ment « ampli­fier encore plus la sup­pres­sion des bureaux de poste qui l’ont été par mil­liers ces der­nières années ».

Le collectif avance ses propositions

Face à ces nou­velles menaces contre le ser­vice public, le col­lec­tif avance ses propres reven­di­ca­tions. Il pro­pose ain­si un mora­toire sur la fer­me­ture des bureaux de poste, un réen­ga­ge­ment finan­cier mas­sif de l’É­tat, la titu­la­ri­sa­tion de tous les per­son­nels pré­caires de La Poste ou encore la co-éla­bo­ra­tion par les pos­tiers, leurs repré­sen­tants syn­di­caux, les col­lec­tifs d’u­sa­gers et les élus locaux du nou­veau plan stra­té­gique de La Poste condui­sant à la nou­velle loi pos­tale. Il évoque enfin la par­ti­ci­pa­tion à la mani­fes­ta­tion natio­nale orga­ni­sée le 25 mai dans le Cal­va­dos, à l’i­ni­tia­tive d’un col­lec­tif local.

Arnaud Vos­sier (Sud PTT) se dit inquiet des futures condi­tions de tra­vail au bureau de poste Jean-Per­rot. © Manuel Pavard

Quant au bureau de poste Jean-Per­rot, sa réou­ver­ture ne signi­fie pas la fin de la mobi­li­sa­tion. De fait, plu­sieurs points res­tent en sus­pens à ce stade, comme le retour d’un dis­tri­bu­teur auto­ma­tique, récla­mé qua­si una­ni­me­ment par les habi­tants des quar­tiers Mal­herbe et Teis­seire. Du côté des sala­riés, Arnaud Vos­sier, gui­che­tier et repré­sen­tant syn­di­cal Sud PTT, avoue « une grosse inquié­tude sur les condi­tions » de la reprise du tra­vail. « Va-t-on reve­nir en sous-effec­tif ? », s’in­ter­roge-t-il. Autant d’élé­ments pour les­quels le col­lec­tif « J’aime ma poste » entend bien main­te­nir la pres­sion sur la direc­tion de La Poste.

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