Nord-Isère. Les salariés de Carrefour ne sont pas à vendre ni à louer !

Par Didier Gosselin

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Des salariés de Carrefour L'Isle-d'Abeau, soutenus par la CGT, étaient en grève vendredi 31 janvier contre le système de location-gérance.
La CGT organisait ce vendredi 31 janvier une journée d’action au sein même de l’hypermarché Carrefour de L’Isle-d’Abeau, pour dénoncer auprès des clients et salariés le passage en location-gérance. Une mobilisation qui faisait suite à celles menées à Givors et à Salaise-sur-Sanne les deux jours précédents.

Depuis 2018, le groupe Car­re­four cède la plu­part de ses maga­sins en loca­tion-gérance : 280 maga­sins, 185 super­mar­chés et 95 hyper­mar­chés, alors que Car­re­four vient de rache­ter 60 hyper­mar­chés Cora, 115 super­mar­chés Match et 11 hyper­mar­chés Casi­no.

Les mili­tants CGT ont notam­ment dis­tri­bué des tracts aux sala­riés et clients ren­trant dans l’hy­per­mar­ché Car­re­four. © Didier Gos­se­lin

La fina­li­té de ce pro­jet, dit de « redres­se­ment du groupe », impo­sé par les action­naires, est de réduire les coûts pour aug­men­ter les divi­dendes. En quatre ans, le PDG Alexandre Bom­pard a mis en place une stra­té­gie qui s’est tra­duite par : des sup­pres­sions mas­sives des postes (dans les sièges) ; des plans de pro­duc­ti­vi­té dans les maga­sins qui ont  consi­dé­ra­ble­ment dégra­dé les condi­tions de tra­vail des mil­liers de sala­riés, comme le pro­jet TOP (ges­tion for­ce­née des équipes de maga­sin) pour lequel Car­re­four a été condam­né ; une dimi­nu­tion signi­fi­ca­tive des inves­tis­se­ments ; une géné­ra­li­sa­tion de la loca­tion gérance des maga­sins.

« On va appauvrir un peu plus des salariés qui l’étaient déjà »

Nico­las Proiet­ti, délé­gué CGT de Car­re­four L’Isle‑d’Abeau, dénonce « une poli­tique de mana­ge­ment cri­mi­nel, dans le sens où on va appau­vrir un peu plus des sala­riés qui l’étaient déjà ». En effet, pré­cise-t-il, « on va être cédé à un repre­neur et ce sera lui désor­mais qui nous rému­né­re­ra. Car­re­four nous lâche et s’occupera juste de récu­pé­rer les béné­fices. J’appelle ça de l’esclavage moderne ! », s’indigne le syn­di­ca­liste.

Selon ce der­nier, « la perte esti­mée pour les sala­riés de Car­re­four s’élèvera entre 2000 et 2500 euros annuels, ce qui revient à tra­vailler gra­tui­te­ment deux jours par mois. Et ce, sans comp­ter la pro­bable aug­men­ta­tion de la mutuelle, voire la remise en cause de tous les acquis sociaux comme la sixième semaine de congés, les jours de carence ou d’enfant malade… », sou­ligne-t-il.

Nico­las Proiet­ti (à gauche), délé­gué syn­di­cal CGT de Car­re­four L’Isle-d’A­beau. © Didier Gos­se­lin

Nico­las Proiet­ti s’appuie sur les retours de ter­rain depuis que Car­re­four a mis en loca­tion-gérance nombre de maga­sins depuis six ans un peu par­tout en France : « Ce sont les sala­riés des maga­sins pas­sés en loca­tion-gérance qui nous font remon­ter les effets sociaux de la stra­té­gie patro­nale. » Le repre­neur, dont on ne connaît pas le nom pour l’instant, « ne pour­ra, pour gagner de l’argent, que faire pres­sion sur la masse sala­riale et les quelques acquis sociaux », explique le délé­gué CGT.

« Notre objec­tif, au-delà de cette jour­née d’action et d’information, c’est d’organiser la lutte en s’appuyant sur les accords de branche, celle du com­merce, plus que sur la conven­tion col­lec­tive de Car­re­four, pour négo­cier avec l’aide et l’appui des sala­riés afin de perdre le moins pos­sible », conclut Nico­las Proiet­ti, qui ne craint pas d’évoquer le risque d’un grave déclas­se­ment des sala­riés.

Les com­mu­nistes sont venus sou­te­nir les sala­riés, à l’ins­tar de Fré­dé­rique Pena­vaire, ici aux côtés de Yann Bar­reau (CGT). © Didier Gos­se­lin

Au cours de cette action, les mili­tants CGT de Car­re­four ont reçu le sou­tien de leurs cama­rades d’autres filières ou entre­prises. Sans oublier celui de mili­tants des par­tis de gauche, notam­ment des com­mu­nistes venus en nombre.

Mobi­li­sa­tion éga­le­ment à Car­re­four Salaise-sur-Sanne

Venues de Givors, L’Isle-d’A­beau, Mey­lan, Aix-en-Pro­vence ou encore de Vitrolles, les délé­ga­tions CGT du groupe Car­re­four ont appor­té leur sou­tien aux sala­rié-es de l’é­ta­blis­se­ment de Salaise-sur-Sanne, en grève ce jeu­di 30 jan­vier contre le plan de loca­tion-gérance. Natio­na­le­ment, ce sont quinze maga­sins qui sont concer­nés cette année. Des membres de l’u­nion locale de Roussillon/Beaurepaire ain­si que le maire de la com­mune, Gilles Vial, étaient pré­sents.

Le PDG et les action­naires de ce groupe en veulent tou­jours plus dans leurs por­te­feuilles. Les capi­ta­listes n’hé­sitent pas à uti­li­ser tous les stra­ta­gèmes et tous les moyens pour aug­men­ter leurs divi­dendes. Cette loca­tion-gérance — pour ne pas dire vente — est en fait un plan social éco­no­mique (PSE) dégui­sé qui va induire, au delà de la baisse des effec­tifs, la perte de conquis sociaux : perte de deux semaines de congés payés ; perte de salaire esti­mée à 2500 euros annuel­le­ment, due au chan­ge­ment de conven­tion col­lec­tive ; perte de deux jours rému­né­rés d’ab­sence pour enfant malade ; aug­men­ta­tion du tarif de la mutuelle de 40 euros par mois.

La mani­fes­ta­tion d’une cin­quan­taine de syn­di­qué-es a cir­cu­lé dans le maga­sin au son de tam­bours et cornes de brume, appe­lant les sala­rié-es à se mettre en grève… Mal­heu­reu­se­ment sans grand résul­tat. Les sala­rié-es au tra­vail qui ont bien vou­lu répondre à notre demande ont par­lé de dégout, abat­te­ment, décou­ra­ge­ment. Ils attendent avec angoisse de connaître le sort qui leur sera réser­vé.

Daniel Oriol

Des sala­riés de Car­re­four Salaise-sur-Sanne étaient éga­le­ment en grève jeu­di 30 jan­vier. © Daniel Oriol

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