Philippe Poutou à Vencorex : « Construire l’unité la plus large possible »

Par Manuel Pavard

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Philippe Poutou s'est exprimé devant les salariés de Vencorex, rassemblés devant l'entrée nord de la plateforme chimique.
Philippe Poutou est venu soutenir les salariés de Vencorex sur le piquet de grève, ce lundi 18 novembre, sur la plateforme chimique de Pont-de-Claix. L'occasion pour le porte-parole du NPA - l'Anticapitaliste de dénoncer les plans de licenciements et fermetures d'usine survenus récemment, tout en lançant un appel à l'unité pour mener la lutte et proposer des alternatives.

« Pour les plus vieux, ça doit faire au moins quarante ans qu’on subit des plans de licenciements successifs, des liquidations de site industriel. » Si son constat, lucide, peut provoquer « une certaine résignation et un sentiment d’impuissance », Philippe Poutou assure garder une détermination intacte. Et ce, à l’instar des salariés de Vencorex, en grève illimitée depuis le 23 octobre. Un combat que le porte-parole du NPA – l’Anticapitaliste a salué, ce lundi 18 novembre, lors de sa visite sur le piquet de grève, à l’entrée de la plateforme chimique de Pont-de-Claix.

Philippe Poutou a lancé un appel à élargir la lutte, pour Vencorex comme pour d’autres entreprises.

Philippe Poutou se sent comme un poisson dans l’eau dans ce type de lutte qui lui « fait du bien ». Un clin d’œil à celle menée durant 13 ans, avec ses camarades, contre la fermeture de l’usine Ford de Blanquefort (Gironde). In fine pourtant, « on a perdu », rappelle-t-il. L’ancien candidat à la présidentielle n’est donc « pas là pour conseiller » les grévistes de Vencorex, se décrivant un peu « comme un loser », plaisante-t-il. « Moi, j’apporte juste une petite lumière. (…) Mais la moindre petite lumière compte ! »

« Arrêter la spirale infernale des défaites »

« Sa venue est importante », abonde Séverine Dejoux, élue CGT au CSE. Elle espère que le « soutien affiché » de Philippe Poutou permettra de jeter un coup de projecteur sur le mouvement, l’objectif étant de parvenir à une « prise de conscience » de la part du gouvernement, face à « la casse industrielle et sociale qui s’annonce ».

Séverine Dejoux, élue CGT au CSE et représentante des salariés devant l’administration judiciaire.

Le porte-parole du NPA dénonce ainsi « une boîte qui décide de sacrifier des emplois, une structure ». Avec un impact dépassant largement le cadre de l’entreprise : « Ce n’est pas que Vencorex. Cela touche toujours du monde bien au-delà des entreprises : les emplois indirects, la sous-traitance… Et en haut, de la part des patrons comme des pouvoirs publics ou des services de l’État, on voit bien une certaine indifférence à ce que l’on est en train de subir », déplore-t-il.

Dès lors, la question se pose : « Comment être efficace dans une résistance ? », s’interroge Philippe Poutou, appelant à « arrêter la spirale infernale des défaites ». Selon lui, « une victoire sociale et hautement symbolique serait d’empêcher des licenciements et la fermeture ou liquidation d’un site ».

Pour mener cette lutte, à Vencorex comme chez Michelin ou Auchan, il faut « construire l’unité la plus large possible au sein de la population et des travailleurs et travailleuses ». Mais aussi « l’unité des organisations du mouvement social », souligne le militant, félicitant les syndicats de Vencorex pour s’être organisés en intersyndicale (CGT, CFDT, CFE-CGC).

« Le seul repreneur viable, ce serait l’État »

À l’instar des élus communistes et de la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet qui ont défendu cette solution devant les salariés, Philippe Poutou prône lui aussi la nationalisation… Ou plutôt « la socialisation » – terme que préfère le NPA. « Le seul repreneur viable, ce serait l’État », affirme-t-il. « Malheureusement, le coup du repreneur qui reprend un petit bout d’activité et du nombre de salariés, c’est souvent juste un report d’une fermeture totale. Il y a plein d’expériences comme ça. »

Philippe Poutou a échangé avec des salariés de Vencorex réunis sous le barnum du piquet de grève.

Pour l’ex-ouvrier chez Ford, « certains secteurs économiques doivent être socialisés », donc « complètement publics » afin, explique-t-il, « d’enlever les moyens de nuire au privé ». À quels domaines songe-t-il ? « Il y a des secteurs, comme la santé, qui sont évidents. Mais la chimie, ça peut se discuter également. Quand ça concerne la protection de l’environnement et de la population, on pourrait imaginer qu’il ne faut pas laisser ça à des boîtes privées qui vont et viennent comme bon leur semble. »

Philippe Poutou expose ainsi une évidence : « On a besoin d’un contrôle des salariés qui sont quand même les mieux placés pour savoir comment on peut protéger et défendre un outil de travail, et comment le rendre non dangereux pour l’ensemble de la population et pour l’environnement. »

Le porte-parole du NPA – l’Anticapitaliste a notamment salué l’unité syndicale existant chez Vencorex.

Ses propos ont été largement plébiscités par les salariés venus l’écouter sous le barnum installé devant les grilles. En ce 27e jour de grève, tous se disaient prêts à continuer, sans cacher pour autant leur inquiétude grandissante. Si le tribunal administratif leur a en effet accordé un sursis en prolongeant la période d’observation jusqu’au 6 mars 2025, les discussions avec la direction sont actuellement au point mort et de plus en plus tendues. Ce qui n’empêche pas Philippe Poutou d’espérer des lendemains qui chantent. Et celui-ci de lancer, sous les acclamations : « Je ne vais pas le dire ouvertement mais nous, on pense qu’il faut se révolter ! »

Le conseil municipal de Vizille lance un appel à l’État

Parmi les délibérations à l’ordre du jour du conseil municipal de Vizille, ce mardi 19 novembre, figurait un vœu, adopté à l’unanimité, concernant la situation de Vencorex et des plateformes chimiques du sud grenoblois. Après avoir rappelé le contexte et les conséquences potentielles d’une fermeture, les élus réaffirment leur « totale solidarité » avec le combat mené par les salariés.

Ils soutiennent également la demande de ces derniers et des représentants syndicaux de « voir l’État s’emparer en urgence de ce dossier ». Ceci afin « d’aller, comme c’est demandé si d’autres solutions ne sont pas trouvées, jusqu’à la nationalisation provisoire de Vencorex pour préserver la chaîne d’activité de la chimie sur notre territoire ».

Le conseil municipal de Vizille appelle enfin, conclut-il, « l’ensemble des acteurs privés et publics concernés à s’engager résolument dans la recherche de solutions pérennes pour assurer un avenir à la chimie du sud grenoblois ».

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