La Rampe-Echirolles. Les Femmes de Barbe-Bleue, cinq femmes questionnent le mécanisme d’emprise

Par Régine Hausermann

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Elles miment la mise à mort par le prédateur. © Simon Gosselin

Mardi 11 mai – Retour de l’hiver ! Et de la pluie qu’on avait presque oubliée. Le public se presse pour partager le récit de cinq victimes d’un Barbe-Bleue d’aujourd’hui, tueur en série. Comment et pourquoi le féminicide ? Pourquoi accepter la domination masculine ? Comment s’en affranchir ?

Un pla­teau qua­si nu pour cinq jeunes comé­diennes toniques A tour de rôle, les cinq femmes de Barbe-Bleue — « res­sus­ci­tées » — racontent leur rôle actif dans l’expérience qui les a conduites à la mort. Elles ont été séduites par cet homme-là. Elles l’ont désiré.Elles ont accep­té de se retran­cher du monde pour lui. Elles ont vécu des semaines, des années heu­reuses, jusqu’au jour où, las­sé d’elles, le mari s’absente pour quelques jours en leur inter­di­sant d’ouvrir la porte du cabi­net dont il leur a pour­tant lais­sé les clefs ! Le scé­na­rio final est le même – la mort — mais le temps de l’idylle dif­fère, comme celui de l’essouflement du couple. Cinq chaises pour tout élé­ment de décor. A tour de rôle, chaque femme raconte le scé­na­rio qui l’a conduite à la mort : qu’elle ait ou pas ouvert la porte du cabi­net secret. Cer­taines miment des séquences de leur vie avec le mari domi­na­teur, violent. Le méca­nisme d’emprise ana­ly­sé post-mor­tem Des spec­ta­trices – et je pense aus­si, des spec­ta­teurs — s’interrogent sur tant de dévo­tion à l’homme, tant de consen­te­ment à l’humiliation, tant de sou­mis­sion. Elles et ils com­mencent à s’agiter sur leur fau­teuil, pen­sant : « Rebelle-toi ! riposte ! quitte-le ! » Lorsque, sur le pla­teau, une femme puis l’autre se mettent – post mor­tem – à ana­ly­ser leur com­por­te­ment, leur dépen­dance, les rouages du piège auquel elle se sont lais­sé prendre. On res­pire ! Aux mono­logues suc­cède le dia­logue qui les aide à y voir clair, à com­prendre com­ment elles ont pu consen­tir à deve­nir les proies de ce mâle, for­ti­fié par des siècles de patriar­cat. Elles le font avec rage, avec humour, jusqu’à leur ultime libé­ra­tion. Ensemble, elles quittent le lieu de la séques­tra­tion, célé­brant leur soro­ri­té. Est-ce la pro­po­si­tion rete­nue par le groupe de créa­tion du spec­tacle ? Pour évi­ter la domi­na­tion, res­tons entre femmes ? On s’interroge… Une écri­ture diri­gée par Lisa Guez. Extraits de la note d’intention. « A cha­cune de se défaire de « son » Barbe-Bleue » «  Der­rière toute porte qu’on a peur d’ouvrir, toute ques­tion qu’on refuse de se poser, toute liber­té à laquelle on accepte de renon­cer, il y a un désir mort, une femme mise à mort par le pré­da­teur en nous : La Barbe-Bleue. » On se prend à ima­gi­ner un col­lec­tif mas­cu­lin s’emparant de ces ques­tions, les tra­vaillant, les met­tant en scène. Chiche !
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Tableau final, le moment de la libé­ra­tion. © Simon Gos­se­lin

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