Sassenage. Les 50 ans du lycée Roger Deschaux
Par Jean-Claude Lamarche
/
Emmanuelle Vernet Abaibou, proviseure du lycée, lors de sa prise de parole.
Le 11 avril dernier, le lycée des métiers Roger Deschaux soufflait ses cinquante bougies. L’occasion d’un peu d’histoire et aussi de souligner le rôle d’un établissement d’enseignement professionnel qui offre des formations du CAP à la licence.
Egale dignité ?
C’est en 1985 que fut ouvert à Seyssinet-Pariset le lycée Aristide Bergès et l’on a pu entendre, à cette occasion, le recteur de l’académie de Grenoble se féliciter de l’implantation du premier lycée de l’agglomération grenobloise sur la rive gauche du Drac. Ce fut l’occasion, pour les représentants syndicaux des personnels, d’informer le recteur qu’il y avait depuis 1974 à Sassenage un « lycée du bâtiment et des travaux publics », lycée technologique avec des sections professionnelles, dont il semblait ignorer l’existence. Une ignorance qui aurait intéressé les psychanalystes car, malgré les beaux discours des responsables au plus haut niveau de l’Education nationale sur « l’égale dignité » des enseignements, il restait dans leur inconscient, des enseignements plus, et donc aussi moins, égaux que d’autres. Les moins étant justement ces enseignements délivrés dans les lycées techniques et professionnels, et les moins des moins étant les enseignements des métiers du bâtiment. D’ailleurs, sauf exception confirmant la règle, on ne rencontre aucun de leurs enfants dans ces filières de formation.
Des infos sur le lycée, pour cette journée portes ouvertes et festive.
Un peu d’histoire
Jusqu’au début des années 70, des sections professionnelles du bâtiment existaient au lycée Ferdinand Buisson de Voiron et d’autres étaient accueillies dans des locaux de l’ancienne mairie de Sassenage, le château des Blondes, et ce fut la volonté du maire de l’époque, Roger Deschaux, de créer un lycée technologique regroupant les formations aux CAP et BEP (y compris en remontées mécaniques) et de nouvelles filières conduisant aux baccalauréats technologiques Génie civil, Chauffage et climatisation, ainsi qu’au brevet de technicien du bâtiment, puis, au-delà, vers des brevets de technicien supérieur. C’est ainsi qu’apparurent dans le paysage ces immeubles bleus, à la limite de Fontaine et Sassenage, pour lesquels beaucoup de béton fut coulé (bonjour le bilan carbone !), revêtus de mosaïque couleur de ciel, bâtiments aujourd’hui bien dégradés et dont la destruction suivie d’une nouvelle construction semble programmée par la Région Rhône-Alpes. C’est Roger Deschaux lui-même, par ailleurs membre de l’Education nationale, qui devint le premier proviseur du lycée, deuxième raison pourquoi son nom fut donné au lycée quelques temps après sa mort.
L’internat et la cour du lycée.
Malgré les vicissitudes, cinquante ans d’une vie bien remplie
Le proverbe dit « quand le bâtiment va, tout va ! ». Il exprime une réalité que chacun doit avoir en tête, le bâtiment c’est 50% des emplois industriels en temps normal, et c’est un secteur qui en tire beaucoup d’autres derrière lui : matériaux de construction, métallurgie, appareils de chauffage, menuiserie et charpente, vitrerie, matériel électrique, peinture… et maintenant pompes à chaleur, panneaux solaires, isolation… C’est un secteur qui subit parfois des crises, mais qui reste riche en emplois et qui recrute. Et, l’évolution des technologies fait que là aussi, les emplois sont de plus en plus qualifiés. Pendant 50 ans, le lycée de Sassenage a répondu à ces besoins de qualification et beaucoup d’entreprises, des plus grosses aux plus artisanales n’ont eu qu’à s’en féliciter. Longtemps, ce lycée du bâtiment a été une exception dans le sud-est de la France et son recrutement géographique s’étendait très loin, d’où la nécessité d’un internat important, avec beaucoup d’élèves pensionnaires et demi-pensionnaires, beaucoup de surveillants d’externat et d’internat. Et des problèmes de mixité car il y avait aussi des filles et il y en a toujours.
Quant aux problèmes d’intendance, ils ont été permanents, notamment du fait de la collecte de moyens pour le bon fonctionnement de l’établissement par le biais de la taxe d’apprentissage versée par les entreprises qui ont une tendance naturelle à la conserver pour financer des formations par apprentissage qu’elles peuvent parfois mettre en place ou pour favoriser tel ou tel établissement de formation pas nécessairement laïque ou public. Ce qui pouvait transformer des enseignants, chefs de travaux, chefs d’établissement… en collecteur d’impôts. Ils étaient pourtant beaucoup plus dans leur rôle quand ils créaient de nouvelles voies de formation, de nouveaux contenus pour de nouveaux diplômes, quand ils contribuaient ainsi à créer de nouvelles voies de réussite pour les élèves, de nouvelles voies d’accès à l’enseignement supérieur, à la démocratisation de l’enseignement.
L’externat et la cour du lycée.
Une bonne partie des élèves, dans toutes les sections, étaient des enfants de professionnels du bâtiment, motivés, mais il a toujours été difficile de faire venir d’autres élèves, pour cause de mauvaise réputation (pour des raisons diverses) des métiers du bâtiment et beaucoup sont venus à la suite d’une « orientation par défaut ». Mais ne l’ont pas regretté en général. La présence, lors de cet anniversaire, d’anciens élèves a confirmé la qualité de la formation donnée, professionnelle mais aussi générale qui permet à ceux qui l’ont reçue de s’adapter à de nouvelles fonctions, des fonctions d’encadrement ou commerciales, ou de s’installer comme artisan, de devenir chef d’entreprise… Ceux qui sont venus, nombreux, sont heureux de revoir les anciens professeurs ou personnels d’administration et de service qui sont en retraite et qui n’ont pas manqué cet événement où la nostalgie est palpable.
Aujourd’hui, les voies technologiques spécifiques du bâtiment et des travaux publics ont pratiquement disparu pour des raisons d’économies budgétaires, mais le lycée permet aux jeunes d’accéder à des diplômes professionnels qui vont du CAP au BTS, et même à la licence. Avec une rénovation des locaux qui semble actée, avec un large éventail de formations existantes ou à créer, l’avenir du lycée Roger Deschaux semble bien assuré. Ceux qui prendront la bonne décision d’y effectuer leurs études ne manqueront pas de débouchés. N’hésitez pas jeunes gens !
Les élèves avaient réalisé une enseigne géante dont les caractères ont été fabriqués grâce aux techniques enseignées.
Le public présent
Il y avait du monde pour fêter cet anniversaire, avec des enseignants, des personnels de toutes catégories, beaucoup de retraités qui adhèrent presque tous à l’Association des personnels retraités de l’enseignement technique de Sassenage (APRETS), sans doute la seule association de retraités d’un lycée de l’académie de Grenoble aussi nombreuse et dynamique. Il y avait la proviseure Emmanuelle Vernet-Abaibon agréablement surprise de la réussite de cette célébration, l’adjoint du recteur (directeur académique adjoint), des représentants de la municipalité, des professionnels et des parents, beaucoup d’élèves qui avaient aussi travaillé à la préparation de cette journée, en particulier en réalisant une enseigne géante pour le lycée dont les caractères ont été fabriqués grâce aux techniques enseignées… et bien d’autres.