Le 1er février, plus d’une centaine d’enseignants et de parents se sont retrouvés devant le rectorat de Grenoble.
Enseignants et parents des collèges classés en réseaux d’éducation prioritaire protestent contre la diminution des moyens disponibles pour accompagner les élèves en difficulté. Ceux des collèges grenoblois de Lucie Aubrac et Vercors, mais aussi Gérard Philippe à Fontaine, de Louis Aragon à Villefontaine, Elie Cartan à la Tour-du-Pin… D’autres établissements (Vizille, Allende à Bourgoin…) étaient également représentés.
Faut-il choisir entre l’ouverture d’une classe et le maintien des moyens supplémentaires attribués à un collège en réseau d’éducation prioritaire ? C’est l’alternative que propose le rectorat aux enseignants du collège Lucie Aubrac, à la Villeneuve de Grenoble.
À la rentrée prochaine dans ce collège, la fermeture d’une classe de troisième est programmée. Faute d’effectifs, argue le rectorat. L’ouverture d’une classe de sixième est par contre envisagée. « Ce s’explique par la création l’an dernier d’une section ‘’international anglais’’ mais sans ouverture de classe », explique Laurie Salles, professeure au collège. Cette création – un transfert du collège d’Europole sensé favoriser la mixité sociale – n’avait suscité l’inscription que de quatre élèves. L’ouverture d’une sixième supplémentaire en 2023 pourrait favoriser le développement de cette section.

Sur les pancartes, l’incompréhension et l’indignation.
Seulement voilà. Le ministère de l’Éducation nationale fait ses comptes. La fermeture d’une troisième entraîne la diminution du besoin d’heures. Et l’ouverture d’une sixième entraîne un besoin d’heures d’enseignement… qui seront prises sur les moyens qui permettaient aux enseignants de développer des projets spécifiques d’aides aux élèves en difficulté – formation aux secours, théâtre, aides individuelles… Parce que le rectorat considère que cette création est « une fleur » offerte au collège, mais qu’elle ne serait pas indispensable.
« On veut nous faire choisir entre l’aide aux élèves en difficulté et l’ouverture d’une sixième qui développerait la mixité sociale ; c’est inacceptable », résume Laurie Salles.
Et c’est une même logique qui est à l’oeuvre au collège Vercors : le choix entre le maintien d’une classe de sixième menacée – ce qui augmenterait mécaniquement les effectifs par classe – ou la conservation des moyens supplémentaires attribués à l’éducation prioritaire.

Clairevie Heurtebise, professeure à Villefontaine.
Autre situation, toujours en réseau d’éducation prioritaire, celle du collège Louis Aragon, de Villefontaine. Là, ce qui est prévu, c’est la suppression des enseignements de français pour les élèves qui arrivent en France sans maîtriser le français. Ce qui, on en conviendra, les handicape pour suivre leur scolarité.
Au total, c’est bien le coeur de l’éducation prioritaire qui est dans la ligne de mire du gouvernement. Ce dispositif repose sur un constat : les élèves confrontés à des situations sociales ou individuelles difficiles ont besoin de davantage d’aide pour accéder aux mêmes parcours scolaires que tous les autres. On appelle ça la solidarité nationale. Ou l’équité. Les services de l’éducation nationale défendent aujourd’hui une autre conception : celle de l’égalité des moyens attribués. Autrement dit, de la reproduction des inégalités.

Simon Billouet, conseiller départemental, est venu apporter le soutien des élus de la Nupes.
Cette conception ne touche pas uniquement les inégalités sociales. Des enseignants du collège de Vizille – qui n’est pas classé en zone d’éducation prioritaire – participaient au rassemblement du 1er février. Cet établissement – comme d’autres – accueille des élèves en situation de handicap – certains sont affectés par des « troubles envahissant du comportement. Ces élèves sont suivis en classe par des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH). « La suppression d’une classe et l’augmentation des effectifs par classe qu’elle induirait va se traduire par l’impossibilité de faire rentrer tout le monde dans la salle, nous explique une enseignante, sans compter sur l’impossibilité pour le prof de s’occuper de tous dans ce contexte. »
Les moyens pour la solidarité, ce n’est vraiment pas le truc de l’Éducation nationale.

la Batuka VI, de la Villeneuve de Grenoble, est venue clore le rassemblement.
A lire sur le même sujet
Retrouvez les dernières parutions de notre rubrique « Société »
Saint-Martin-d’Hères. Pour la création et la liberté des artistes du monde entier
Isabelle Miroglio, Béatrice Garnier, Jacqueline Madrennes, Isabelle Métral, Claudine Kahane. Le collectif « Culture 38 » tenait une conférence de...
Crolles. Gilets jaunes, cinq ans après
A Crolles, un rond-point sur lequel les militants "gilets jaunes" n'ont cesser de se retrouver.Sur le rond-point, le débat se poursuit avec les...
Des citoyens épris de paix réunis à Eybens
Les participants ont interprété la Chanson de Craonne.L’association laïque des amis de Jean-Pierre Raffin-Dugens invitait ce 11 novembre « les...
Grenoble. 4000 personnes dimanche dernier contre l’antisémitisme
La banderole portée notamment par Marie-Noëlle Battistel, députée; Eric Piolle, maire de Grenoble; Guillaume Gontard, sénateur; Jérémie Iordanoff,...
Fontaine. Un 11 Novembre sous le signe de la Résistance
Une gerbe a été déposée devant le monument du souvenir des victimes de la répression de novembre 1943.L’année 2023 est celle du 80e anniversaire de...
Isère. Six partis de gauche appellent à participer au rassemblement de dimanche
Les six partis de gauche signataires de l'appel.Six partis de gauche appellent à participer à la manifestation contre l'antisémitisme dimanche 12...
Retrouvez les derniers dossiers de notre rubrique "Société"

Violences urbaines. « Nous avons beaucoup discuté avec les habitants ; ce dialogue, nous allons le poursuivre »
La ville d’Échirolles a été relativement épargnée par les violences urbaines de la fin du mois de juin. Et ce n’est pas par hasard. Une volonté de dialogue, un engagement sur le terrain, des politiques municipales de long terme… Reste que tout ne dépend pas de décisions locales. Amandine Demore, première adjointe au maire, nous livre son sentiment.

Vallée du Rhône. « Ce qui caractérise Inspira, c’est peut-être d’abord son intérêt écologique »
Inspira, c’est le projet de création d’une zone industrialoportuaire à Salaise-sur-Sanne, dans la vallée du Rhône, en pays roussillonais. Projet dont le cœur est l’intermodalité fleuve-rail-autoroute. Réduction des émissions de CO2, création d’emplois… et pourtant une DUP annulée par le tribunal administratif de Grenoble. Explications.

La lutte contre le racisme et l’imposture sociale de l’extrême droite
Salima Djidel est une personnalité publique dans l’agglomération grenobloise. Ce qui ne l’empêche pas d’être confrontée au racisme ordinaire. Elle a décidé de ne pas laisser passer. Au nom de tous ceux qui n’ont pas les mêmes possibilités de s’exprimer. Et elle pose une question : le combat antiraciste n’a-t-il pas perdu de sa vitalité ? Témoignage.