ZFE grenobloise : une fausse solution écologique et une vraie injustice sociale

Par Edouard Schoene

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Au soir du 8 novembre, devant l’ancien bâtiment de la CCI, aujourd’hui siège de la métropole dans l’attente de la fin des travaux rue Malakoff.

Le Collectif pour la gratuité des transports publics de l’agglomération grenobloise appelait à un rassemblement mardi 8 novembre devant le siège de la métropole, place André Malraux à Grenoble.

Une pre­mière zone à faibles émis­sions (ZFE) a été mise en place en février 2020 par Gre­noble Alpes métro­pole. Elle régle­mente la cir­cu­la­tion des poids lourds et des véhi­cules uti­li­taires pro­fes­sion­nels dans vingt-sept com­munes. La loi cli­mat, adop­tée par l’Assemblée natio­nale le 22 août 2021, impose désor­mais la créa­tion de ZFE qui vont inter­dire la cir­cu­la­tion de tous les véhi­cules (y com­pris ceux des par­ti­cu­liers) clas­sés comme étant les plus pol­luants : véhi­cules Crit’air 5 inter­dits en 2023, Crit’air 4 en 2024 et Crit’air 3 en 2025. Cela repré­sente 30 % du parc auto­mo­bile à rem­pla­cer d’ici 2025. Dans l’ag­glo­mé­ra­tion treize com­munes figurent dans le péri­mètre de cette ZFE à venir.
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Une petite cen­taine de per­sonnes se sont ras­sem­blées devant le siège de la métro­pole.

Ce 8 novembre, les inter­ven­tions de repré­sen­tants du col­lec­tif pour la gra­tui­té des trans­ports, de la CGT, du NPA, d’Attac et du PCF se sont suc­cé­dées. Il en res­sort un consen­sus : il est urgent d’agir tout en reje­tant les fausses solu­tions et les demi-mesures ; l’efficacité réelle est le déve­lop­pe­ment et la gra­tui­té des trans­ports en com­mun dans l’agglomération. Les res­pon­sables, sou­te­nus par les mili­tants pré­sents, inter­pellent les pou­voirs publics et en par­ti­cu­lier les élus de la métro­pole pour que des dis­po­si­tions soient prises pour aller en ce sens. Car, de fait, la pol­lu­tion est une réa­li­té. La pol­lu­tion aux par­ti­cules fines est res­pon­sable de 300 décès par an dans la cuvette gre­no­bloise aux­quels s’ajoutent les 145 décès dus aux dioxydes d’azote. Les émis­sions de CO2 contri­buent au réchauf­fe­ment cli­ma­tique. Les trans­ports consti­tuent, der­rière le chauf­fage au bois non conforme, les pre­mières causes de pol­lu­tion atmo­sphé­rique.
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Dif­fi­cul­tés de finan­ce­ment d’un côté, super­pro­fits de l’autre.

Agir est donc un impé­ra­tif. La ZFE n’est pour­tant pas la bonne solu­tion.

La res­tric­tion d’u­ti­li­sa­tion des voi­tures Crit’air 5, 4 et 3 à par­tir de 2025 impac­te­ra direc­te­ment 50000 véhi­cules sur les 150 000 enre­gis­trés sur le ter­ri­toire de la ZFE. Tout en étant éco­lo­gi­que­ment inef­fi­cace.

Un béné­fice éco­lo­gique dis­cu­table

Pro­vo­quer le rem­pla­ce­ment des véhi­cules les plus anciens par des voi­tures neuves (ther­miques ou élec­triques) a un coût car­bone éle­vé : il faut rou­ler des dizaines de mil­liers de kilo­mètres pour com­pen­ser les émis­sions liées à la construc­tion d’une voi­ture. D’autre part, les grosses ber­lines ou les SUV neufs seraient auto­ri­sés à se dépla­cer alors qu’ils sont lourds : ce poids entraîne une consom­ma­tion de car­bu­rant plus impor­tante, de même qu’une émis­sion de par­ti­cules fines accrue (usure des pneus et des pla­quettes de frein). Le gain envi­ron­ne­men­tal entre SUV neufs auto­ri­sés et petites voi­tures anciennes et inter­dites reste à démon­trer.

Une grave injus­tice sociale

Les per­sonnes aux reve­nus les plus faibles ont des véhi­cules moins bien clas­sés par Crit’air. Elles sont péna­li­sées alors qu’en moyenne elles se déplacent moins et uti­lisent des voi­tures moins puis­santes. Com­ment vont faire les aides à domi­cile, ou les per­son­nels du net­toyage, qui roulent avec leurs propres véhi­cules ?

La ZFE est d’au­tant plus injuste que l’argent public va sub­ven­tion­ner les plus aisés, eux qui pour­ront se payer une voi­ture hybride ou élec­trique.

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Laurent Ter­rier, secré­taire de l’u­nion dépar­te­men­tale de la CGT et l’un des res­pon­sables du col­lec­tif pour la gra­tui­té.

Le col­lec­tif gre­no­blois pro­pose donc une solu­tion : l’extension des réseaux de trans­port public et leur gra­tui­té dans l’agglomération. Ce qui entraî­ne­ra une dimi­nu­tion du nombre de voi­tures en cir­cu­la­tion, comme dans toutes les agglo­mé­ra­tions où cela se pra­tique déjà – trente-cinq en France aujourd’hui. Une zone à forte explo­sion sociale ? Com­ment accep­ter, dans le contexte d’une ZFE appli­cable aux Crit’air 3 en 2025, que le RER gre­no­blois ne soit pré­vu au mieux qu’en 2035 ? Dix ans de déca­lage. La prio­ri­té devrait être de per­mettre à ceux qui tra­versent chaque jour l’agglomération pour aller tra­vailler de le faire en train. Ce qui repré­sente 350 000 véhi­cules, chaque jour. Face à une ZFE puni­tive et sans alter­na­tives pour se dépla­cer en ville ou pour se rendre en ville, « allons-nous connaître un nou­vel épi­sode de gilets jaunes ou d’actions qui vou­dront dénon­cer la lutte contre les pol­lu­tions et pour le cli­mat en s’ap­puyant sur l’in­jus­tice de la ZFE ? », s’interrogeait l’un des par­ti­ci­pants au ras­sem­ble­ment du 8 novembre.
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