La montagne orpheline de son hôpital ?

Par Luc Renaud

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L’hôpital Sud, inauguré un mois avant l’ouverture des jeux de 1968.

L’hôpital Sud est à la croisée des chemins. Un engagement pris avec l’agence régionale de santé en 2015 pourrait remettre en cause son statut de centre d’excellence de traumatologie et d’orthopédie. La mobilisation s’organise, et pas seulement à l’hôpital.

Il y avait bien quelque chose. Au point que des groupes de tra­vail tra­vaillent à l’élaboration d’un avis sur le sujet. Le syn­di­cat CGT du CHU de Gre­noble avait donc rai­son de craindre la mise en œuvre d’un pro­jet de réduc­tion de l’activité de l’hôpital Sud. Et la direc­tion de l’établissement avait tort d’affirmer que tout cela n’était plus vrai­ment à l’ordre du jour.

Car les infor­ma­tions filtrent peu à peu.

Tout remonte à 2015. C’est alors que se dis­cu­tait le pro­jet de moder­ni­sa­tion de l’hôpital Nord avec la créa­tion, à la Tronche, d’un nou­veau pla­teau tech­nique, entre autre. Occa­sion sai­sie par le minis­tère de la San­té de l’époque pour un petit chan­tage : les finan­ce­ments par le biais de l’agence régio­nale de san­té contre l’engagement de fer­mer les blocs opé­ra­toires de l’hôpital Sud en 2020.

Aujourd’hui, l’ARS (l’institution qui repré­sente le minis­tère à l’échelon régio­nal) ne fait que récla­mer son dû, le paie­ment d’un tri­but acquis sous pres­sion.
Ce qui est donc en dis­cus­sion, c’est le niveau de main­tien en acti­vi­té des salles d’opération et des ser­vices de l’hôpital Sud. On pour­rait com­men­cer par fer­mer deux blocs sur quatre, ou bien gar­der les blocs mais fer­mer les urgences, intro­duire un par­te­na­riat public/privé — dont on a l’expérience du coût… bref, la réflexion porte sur les moda­li­tés de la dévi­ta­li­sa­tion de l’hôpital Sud.

La clé de voûte d’un pôle d’ex­cel­lence

Sans d’ailleurs que la ques­tion du trans­fert d’activité ne soit réglée. A l’hôpital Micha­lon, la capa­ci­té des salles d’opération serait insuf­fi­sante. Et per­sonne n’imagine que toute la patien­tèle de Sud pour­rait se retrou­ver à Voi­ron – les urgences de l’hôpital Sud enre­gistrent plus de 16000 pas­sages annuels. Tout laisse donc à pen­ser que la dimi­nu­tion de l’activité de Sud entraî­ne­rait une aug­men­ta­tion de celle du pri­vé… et de celle des coûts à la charge des patients.

Et c’est bien l’avenir de l’hôpital Sud, centre d’excellence des soins de trau­ma­to­lo­gie en France, qui est en cause. Les per­son­nels soi­gnants insistent sur la com­plé­men­ta­ri­té des ser­vices d’urgence de trau­ma­to­lo­gie, d’orthopédie et de rhu­ma­to­lo­gie, com­plé­men­ta­ri­té construite au fil des ans pour faire de l’hôpital Sud de Gre­noble le pre­mier « trau­ma cen­ter » du pays. Edi­fice qui ris­que­rait de s’effondrer comme un châ­teau de cartes s’il était pri­vé de sa clé de voûte que sont les blocs opé­ra­toires.

La CGT de l’hôpital n’entend pas lais­ser faire. Une oppo­si­tion à un déman­tè­le­ment qui est d’ailleurs très lar­ge­ment par­ta­gée par les per­son­nels, toutes caté­go­ries confon­dues.

Avec le concours du syn­di­cat, une lettre ouverte au ministre de la San­té a été rédi­gée. « Com­ment envi­sa­ger la fer­me­ture de cette filière sur l’Hôpital Sud qui draine tout le bas­sin sud de Gre­noble et au-delà, qui per­met de for­mer méde­cins de mon­tagne et chi­rur­giens, per­son­nels soi­gnants à la trau­ma­to­lo­gie d’urgence et à l’orthopédie ? », peut-on par exemple lire dans cette mis­sive qui a été signée par des hos­pi­ta­liers de l’ensemble des ser­vices qui com­posent l’établissement.
Une lettre ouverte, des tracts d’information et une péti­tion en ligne… la mobi­li­sa­tion s’organise.

Les per­son­nels ont en outre reçu le sou­tien du maire d’Echirolles, Ren­zo Sul­li, qui a écrit à la direc­trice du CHU Gre­noble Alpes. La réponse offi­cielle reste dans un flou opaque quant à l’avenir des ser­vices de Sud.

Le sys­tème hos­pi­ta­lier gre­no­blois – et dans une cer­taine mesure celui de l’arc alpin – joue gros.

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  • Une approche comp­table décom­plexée dou­blée d’une volon­té cachée de dépor­ter sur le sec­teur mar­chand l’ac­ti­vi­té hos­pi­ta­lière est le cœur de la doc­trine des ARS. Diri­gées par des hauts cadres for­ma­tés à l’i­déo­lo­gie libé­rale, elles ont été conçues pour appli­quer impla­ca­ble­ment les poli­tiques de réduc­tion des coûts. La réforme de ces ins­ti­tu­tions contraires à l’es­prit de ser­vice public est une néces­si­té abso­lue. Dans l’at­tente, la mobi­li­sa­tion des agents hos­pi­ta­liers et de la popu­la­tion est indis­pen­sable. Bra­vo pour les ini­tia­tives en cours.