Pont-de-Claix. Jean-Luc Mélenchon à la rencontre des salariés de Vencorex
Par Manuel Pavard
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Les salariés de Vencorex auront vu défiler une succession de personnalités politiques et syndicales, au cours des derniers mois. Après Sophie Binet, Philippe Poutou, Fabien Roussel, Manuel Bompard, Pierre Jouvet ou encore Arnaud Montebourg — sans compter tous les parlementaires et autres élus locaux -, c’était au tour de Jean-Luc Mélenchon de se rendre sur la plateforme chimique de Pont-de-Claix, ce mercredi 12 mars. Le leader de la France insoumise répondait à l’invitation des deux députées LFI de l’Isère, Élisa Martin et Sandrine Nosbé. Ceci moins d’une semaine après le sursis accordé à l’entreprise.

Jeudi 6 mars, le tribunal de commerce de Lyon a en effet décidé de prolonger de six mois la période d’observation de Vencorex, repoussant le spectre de la liquidation judiciaire. L’audience a aussi vu la CGT présenter sa proposition de reprise via une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), portée avec les salariés et soutenue par plusieurs collectivités territoriales. Un projet que les représentants de l’intersyndicale ont exposé à Jean-Luc Mélenchon, lors d’un temps d’échange organisé à son arrivée sur le site.
« Le ministre de l’Industrie n’y comprend rien »
Saluant l’idée et ses objectifs, l’ex-candidat à l’élection présidentielle a insisté sur la remise en cause de la « propriété capitaliste des moyens de production », tout en indiquant ne pas vouloir s’exprimer à la place des salariés concernant cette potentielle reprise en coopérative. De fait, sa venue à Pont-de-Claix visait prioritairement à « aider à la visibilité du conflit », et surtout à « interpeller le gouvernement et le mettre en cause, c’est-à-dire le confronter à ses contradictions ».

Jean-Luc Mélenchon a ainsi tiré à boulets rouges sur l’exécutif, à commencer par le Premier ministre François Bayrou et son ministre de l’Industrie Marc Ferracci. Il a notamment fustigé le dédain du gouvernement, dont aucun membre n’a pris la peine de se déplacer à Vencorex — ni à Arkema d’ailleurs. « J’ai moi-même été ministre. Je vous garantis qu’on trouve toujours le temps dans une semaine pour aller voir ceci ou cela, ce qui permet de compléter sa propre compréhension », a‑t-il assuré.
« Le ministre de l’Industrie ne sait rien du tout de ce qui se passe ici et n’y comprend rien », a poursuivi le chef de file des insoumis. Avant de s’adresser au Premier ministre : « M. Bayrou, si vous avez un bon à rien, changez-le et envoyez-nous quelqu’un qui soit capable de discuter avec des gens et de leur répondre. »
« Assez de baratin sur la souveraineté et la réindustrialisation »
Jean-Luc Mélenchon s’est également indigné que Matignon ait fermé la porte à une nationalisation temporaire de Vencorex. Une décision qui nuit directement à « l’intérêt national », selon lui. « Assez de baratin sur la souveraineté, la réindustrialisation, etc, quand dans le même temps, on laisse s’écrouler des pans entiers de la production et surtout des endroits comme celui-ci. » Un site qu’il a décrit « comme une sorte de gare de triage du reste de l’industrie chimique ».

Le responsable LFI a détaillé le fameux effet domino, maintes fois évoqué par les syndicats, d’une disparition de Vencorex pour l’ensemble de la filière chimique et même au-delà. Avec l’impact sur la fusée Ariane, les centrales nucléaires ou le secteur de l’armement. Pour lui, le refus de la nationalisation résulte, d’une part, d’un « manque de volonté politique ». Car ces membres du gouvernement « ne comprennent rien à la production ». Mais on ne peut pas non plus éluder le lien avec « l’idéologie du président de la République ».
« Le désintérêt, l’incompréhension, le mépris pour les gens… Voilà le cocktail avec lequel est faite la pensée de ces grands stratèges. »
Jean-Luc Mélenchon
Et Jean-Luc Mélenchon de résumer : « Le désintérêt, l’incompréhension, le mépris pour les gens… Voilà le cocktail avec lequel est faite la pensée de ces grands stratèges. » Sa conclusion, visant les ministres comme les industriels, est sans appel : « Nous vous accusons de détruire l’industrie chimique de ce pays ! »

Sur le fond du dossier, la Fédération nationale des industries chimiques (FNIC-CGT) continue, elle, d’affiner son offre de reprise en SCIC. Avec, en ligne de mire, une échéance très proche. Car si la période d’observation est officiellement prolongée de six mois, le tribunal de commerce de Lyon a programmé une audience intermédiaire au 3 avril. Un rendez-vous qui n’est pas à prendre à la légère, prévient l’intersyndicale.