Grenoble. Devant ST, les communistes mobilisent pour la journée de l’industrie

Par Manuel Pavard

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Les communistes ont tracté à l'entrée de STMicroelectronics, sur la presqu'île scientifique, mardi 1er avril, en début de matinée.
Les militants communistes étaient présents ce mardi 1er avril devant STMicroelectronics, à Grenoble, pour distribuer le tract appelant à la journée d'échanges sur l'industrie, organisée par la fédération du PCF de l'Isère le 17 mai prochain. Venus en soutien, les représentants syndicaux de la CGT ST - qui participeront à ces débats - ont fustigé quant à eux la stratégie du groupe franco-italien.

Ven­co­rex, Arke­ma, Pho­to­watt, Atos, Valeo, Logi­plast-Team Tex… Depuis des mois, pla­ce­ments en redres­se­ment judi­ciaire, plans de sup­pres­sion d’emploi, fer­me­tures — par­tielles ou totales — de site et liqui­da­tions se suc­cèdent par­tout en Isère. Une « vague de fer­me­tures sans pré­cé­dent qui frappe l’in­dus­trie dans notre dépar­te­ment et plus lar­ge­ment dans l’en­semble du pays », sou­ligne Jéré­mie Gio­no, secré­taire dépar­te­men­tal du PCF Isère. Un contexte qui a pous­sé les com­mu­nistes isé­rois à lan­cer l’or­ga­ni­sa­tion d’une grande jour­née sur le thème « Indus­trie : construire face aux défis d’au­jourd’­hui », le 17 mai pro­chain, dans les locaux de la fédé­ra­tion, à Gre­noble.

Éric Hours, conseiller régio­nal, Cécile Dhai­naut, membre de l’exé­cu­tif dépar­te­men­tal, et Jéré­mie Gio­no, secré­taire dépar­te­men­tal du PCF, ont sol­li­ci­té les sala­riés de STMi­croe­lec­tro­nics.

Plu­sieurs temps forts ryth­me­ront cette jour­née d’é­changes. Un pre­mier débat sur « le capi­ta­lisme néo­li­bé­ral contre le déve­lop­pe­ment indus­triel », avec des élus syn­di­caux de la chi­mie et de Pho­to­watt. Un second inti­tu­lé « Construire une indus­trie qui réponde aux besoins sociaux », assor­ti du témoi­gnage d’une syn­di­ca­liste de Thales-Trixell sur le pro­jet de pla­te­forme « ima­ge­rie médi­cale » por­té par la CGT. Sans oublier une table ronde sur la sou­ve­rai­ne­té numé­rique, avec les repré­sen­tants syn­di­caux d’A­tos, Soi­tec et STMi­croe­lec­tro­nics. Ces der­niers étaient d’ailleurs pré­sents ce mar­di 1er avril, sur la pres­qu’île scien­ti­fique, aux côtés des mili­tants com­mu­nistes venus faire la pro­mo­tion de l’é­vé­ne­ment.

Le conseiller régio­nal com­mu­niste Éric Hours dis­tri­bue des tracts aux auto­mo­bi­listes à l’en­trée de l’u­sine ST de Gre­noble.

Dès le début de mati­née, Jéré­mie Gio­no, Éric Hours, conseiller régio­nal com­mu­niste, et Cécile Dhai­naut, res­pon­sable du pôle indus­trie — ser­vices publics du PCF Isère, ont ain­si dis­tri­bué le tract appe­lant à la jour­née devant le site STMi­croe­lec­tro­nics de Gre­noble. Si le fabri­cant fran­co-ita­lien de semi-conduc­teurs ne fait pas par­tie des entre­prises concer­nées à très court terme par ces fer­me­tures, il n’en reste pas moins l’un des acteurs indus­triels majeurs de la cuvette gre­no­bloise.

Un nom qui a fait la une de l’ac­tua­li­té à plu­sieurs reprises au cours des der­nières années. Direc­te­ment d’une part, avec le pro­jet d’ex­ten­sion de l’u­sine STMi­croe­lec­tro­nics de Crolles, annon­cé en grande pompe par Emma­nuel Macron en juillet 2022 et visant à dou­bler la capa­ci­té de pro­duc­tion sur le site, pour un coût esti­mé de 7,5 mil­liards d’eu­ros (dont 2,9 mil­liards de l’É­tat fran­çais). Indi­rec­te­ment d’autre part, avec l’op­po­si­tion du col­lec­tif STop­Mi­cro et des Sou­lè­ve­ments de la Terre, qui ont de nou­veau mobi­li­sé près de 3 000 per­sonnes, venues mani­fes­ter dimanche 30 mars, à Ber­nin, contre « l’ac­ca­pa­re­ment de l’eau » par les géants de la micro­élec­tro­nique et contre les pro­jets d’a­gran­dis­se­ment de ST et Soi­tec.

La CGT craint des réductions d’effectifs chez STMicroelectronics

Chris­telle, élue CGT chez STMi­croe­lec­tro­nics, apporte un regard plus nuan­cé sur les thèmes sou­le­vés par les mani­fes­tants. Une grande par­tie des sala­riés, assure-t-elle, sont « conscients du pro­blème de l’eau potable, de son uti­li­sa­tion pour la fabri­ca­tion des puces et du fait que cette eau potable soit pol­luée par des PFAS. C’est un com­bat qu’on mène au sein de l’en­tre­prise mais qui n’est pas facile car on manque de chiffres et de trans­pa­rence. » Sur un plan plus glo­bal, en revanche, dif­fi­cile de trou­ver un ter­rain d’en­tente avec ces mili­tants : « Eux, ils veulent tout arrê­ter ! For­cé­ment, nous, syn­di­ca­listes CGT, on n’est pas d’ac­cord », explique Chris­telle.

Outre l’as­pect éco­lo­gique, la dimen­sion sociale pré­oc­cupe éga­le­ment les sala­riés. Selon le comi­té de groupe euro­péen (CEE), qui réunit les syn­di­cats fran­çais (CFDT, CFE-CGC, CGT, UNSA) et ita­liens ain­si que leurs homo­logues d’autres pays euro­péens, l’en­tre­prise son­ge­rait, mal­gré l’im­por­tant sou­tien finan­cier des pou­voirs publics, à « des réduc­tions d’effectifs en Europe et dans le monde ». STMi­croe­lec­tro­nics, ajoute le CEE dans un com­mu­ni­qué daté du 24 mars, « envi­sage de mettre en place des accords de ges­tion des emplois et des car­rières dans les pays où cela est pos­sible (déjà ini­tié en France dans le cadre du dis­po­si­tif GEPP), ain­si que des départs volon­taires ciblant prin­ci­pa­le­ment les employés seniors ».

La CGT redoute de voir le site de Crolles tou­cher par des sup­pres­sions de postes, mal­gré l’in­ves­tis­se­ment public de 2,9 mil­liards d’eu­ros dans le pro­jet d’ex­ten­sion. DR

Pour­tant, « ST navigue à vue ou presque », accuse Guy, éga­le­ment repré­sen­tant syn­di­cal CGT. « Quand on fait une ges­tion de l’emploi et des par­cours pro­fes­sion­nels, on est quand même cen­sé avant faire les car­to­gra­phies sur les types d’emplois qui pour­raient être à risques, étu­dier la situa­tion éco­no­mique de l’en­tre­prise, faire des ana­lyses sur com­ment amé­lio­rer la ges­tion et le déve­lop­pe­ment des com­pé­tences et for­ma­tions en interne… Toutes ces étapes n’ont pas été faites. »

« On est inquiets pour deux sites, dont Crolles 200 »

Côté chiffres, STMi­croe­lec­tro­nics pré­voit un seul rem­pla­ce­ment pour trois départs, dans les trois pro­chaines années. « Le compte n’y est pas », déplore San­dy Bel, délé­guée syn­di­cale cen­trale. Et ce, d’au­tant que les ambi­tions affi­chées par le groupe n’ont, elles, pas chan­gé. Les pro­pos de la direc­tion évo­quant de plus en plus sou­vent « une rup­ture conven­tion­nelle col­lec­tive » ne sont pas non plus de nature à ras­su­rer la syn­di­ca­liste. « On est inquiets pour au moins deux sites en France : Tours et Crolles 200 », pour­suit-elle. « Ce qui est par­ti­cu­liè­re­ment scan­da­leux quand on se sou­vient de M. Macron annon­çant 2,9 mil­liards de sub­ven­tion publique… sans contre­par­tie obli­ga­toire mais il devait y avoir mille emplois créés. »

Aujourd’­hui, constate San­dy Bel, « on est loin de ces mille emplois ». En atten­dant de connaître les décla­ra­tions de la direc­tion ain­si que la pro­por­tion de sala­riés trans­fé­rés de Crolles 200 à Crolles 300 (l’en­tre­prise pas­sant de la pro­duc­tion de tranches de 200 mm à 300 mm), la CGT table sur envi­ron 300 emplois mena­cés dans cette usine.

Le syn­di­cat dénonce par ailleurs l’ab­sence de réponse du gou­ver­ne­ment fran­çais aux sol­li­ci­ta­tions. A contra­rio, « en Ita­lie, nos homo­logues ita­liens ayant réus­si à avoir un front inter­syn­di­cal, ont contraint l’É­tat à deman­der des comptes à ST », indique San­dy Bel. Une ren­contre était ain­si pré­vue ce jeu­di 3 avril à Rome. Les repré­sen­tants syn­di­caux fran­çais atten­daient donc un compte-ren­du des diri­geants fran­çais dans la fou­lée, via un CSE extra­or­di­naire. Affaire à suivre…

Le pro­gramme de la jour­née du 17 mai

Ren­dez-vous au 20 rue Émile-Guey­mard, à Gre­noble (en face de la gare).

9h : accueil café & vien­noi­se­ries
9h30-11h : « Le capi­ta­lisme néo­li­bé­ral contre le déve­lop­pe­ment indus­triel » ; avec des représentant·e·s syn­di­caux de la chi­mie et de Pho­to­watt, qui témoi­gne­ront de l’actualité récente dans leurs filières et des logiques à l’œuvre.
11h-12h30 : « Construire une indus­trie qui réponde aux besoins sociaux » ; avec le témoi­gnage d’une repré­sen­tante syn­di­cale de Thales-Trixell sur le pro­jet de pla­te­forme « ima­ge­rie médi­cale » por­té par la CGT.
12h30-14h : repas sur place
14h-15h30 : « Sou­ve­rai­ne­té numé­rique : maî­tri­ser toute la filière » ; table ronde avec des représentant·e·s syn­di­caux de STMi­croe­lec­tro­nics, de Soi­tec et d’Atos.

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