Grenoble a manifesté pour l’abrogation de la loi asile-immigration, contre l’extrême droite
Par Edouard Schoene
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Lors des prises de parole au départ de la rue Félix Poulat.
Plusieurs centaines de manifestants, dont de nombreux jeunes ont répondu à l’appel de la CISEM (Coordination iséroise de solidarité avec les étrangers migrants) pour manifester à Grenoble, le 12 février, de la rue Félix Poulat à la place Pasteur.
L’appel à cette manifestation est affiché comme la volonté « de manifester avec les étudiants·es et leurs syndicats pour commémorer le 12 février 1934, où, suite à l’émeute fasciste du 6 février, une réaction à la hauteur du danger s’est manifestée par la grève massive et une manifestation d’une centaine de milliers de personnes. »
Parmi les intervenants au départ de la manifestation, des prises de parole de la CISEM, de l’APARDAP, de jeunes étudiants syndicalistes (UEG), du collectif antifasciste de Grenoble, de la CGT.
Anne Villégier (APARDAP).
Anne Villégier (APARDAP, Association de parrainage républicain des demandeurs d’asile et de protection) a fait état des graves atteintes au droit, aux libertés de la préfecture de l’Isère qui anticipe la loi Darmanin avant même la promulgation des arrêtés. Il est ainsi impossible d’obtenir des rendez-vous en préfecture. Les centres de rétention se multiplient scandaleusement aux frontières.
Le syndicaliste étudiant dénonce la façon dont les universités sont complaisantes avec le dépôt de listes d’extrême droite aux élections en se félicitant que celles ci n’ont pas eu d’élus au CROUS (œuvres universitaires). Il souligne la montée des idées de l’extrême droite dans le milieu estudiantin, avec l’aide des gouvernants qui s’approprient les pires propositions racistes, la dernière en date, à Mayotte étant l’affirmation que le droit du sol sera aboli.
Il dénonce les droits d’inscription élevés pour les étudiants étrangers et les retards administratifs pour ces étudiants mis pour nombre d’entre eux en situation sociale très difficile.
Nicolas Benoit, secrétaire départemental de la CGT évoque le combat nécessaire pour le droit des travailleurs immigrés d’être régularisés, évoque le 8 février 1962 où les manifestants pour la paix en Algérie ont été réprimés (8 morts, tous syndicalistes CGT).
Le cortège dans les rues de la ville.
L’appel unitaire à la manifestation indiquait que « nous manifestons pour l’abrogation de la loi « asile immigration », pour exprimer notre solidarité avec les personnes sans papiers et leurs lutte, pour la régularisation de toutes et tous, pour l’égalité des droits, pour l’ouverture des frontières. »
Les manifestants ont parcouru quelques kilomètres à travers Grenoble pour aboutir place Pasteur. Sur cette place, une plaque commémorative rend hommage aux manifestants du 11 novembre 1943 qui ont résisté à l’occupation allemande et aux autorités d’Etat pétainistes.
Une jeune étudiante du syndicat étudiant UEG a pris la parole, un étudiant étranger africain a dénoncé les mesures anti étrangers à l’université.
Antonine Ronseaux dont le père a manifesté le 11 novembre 43 (puis déporté et assassiné dans le camp de travail) a pris la parole pour témoigner.
Antonine Ronseaux.
Le témoignage d’Antonine Ronseaux
Mesdames, Messieurs, chers amis,
Bonsoir,Tout d’abord, je voudrais vous parler de moi, me raconter un peu…
Loi asile immigration, xénophobie, racisme, 12 février 1934, me voilà devant vous, un condensé
Je suis fille d’immigré italien, résistant FTP-MOI et mort pour la France
C’est toujours avec beaucoup d’émotion que je parle de moi, mais je voudrais que vous entendiez tous les enfants, toutes les familles, toutes les personnes qui ont connu cette même vie entre 1939 et 1945 et après…
Pour moi,
lutter contre le racisme, une évidence
lutter contre le fascisme une évidence
lutter contre la loi asile immigration une évidence
faire connaitre et reconnaître l’acte de résistance des manifestants du 11 novembre 1943, est une nécessité.
Aujourd’hui, lier le 12 février 1934 au 11 novembre 1943 honore ces résistants et tous les résistants de la seconde guerre mondiale.
Le 11 novembre 1943 c’est le même sentiment qui a animé les manifestants. Vivre libre.
Ils ne pouvaient vivre libres dans un pays occupé et administré par un gouvernement collaborant avec l’occupant nazi.
11 nov 1918 — 11 novembre 1943, il y a 25 ans que l’armistice mettant fin à la guerre était signé.
11 novembre 1943 , la commémoration de l’armistice est interdite mais un tract signé par « le comité de l’Isère de la France combattante » invite la population à se rendre au monument de la « porte de France » pour rendre hommage aux morts de la guerer 14–18.
Refoulés une première fois avant de franchir le pont de l’Isère, les manifestants décident de se rendre au monument des diables bleus (chasseurs alpins) au parc Paul Mistral.
Les forces de l’ordre françaises tentent de disperser la foule mais les allemands surgissent de partout, encerclent les manifesatnts :
600 personnes sont arrêtées
369 sont déportées
102 en reviendront.
Je ne suis pas témoin de cette manifestation, je suis héritière de cette mémoire, c’est un des legs de mon père.
Je vous ai raconté une tranche de ma vie, un monceau de ma mémoire familiale.
Je n’ai pas participé à la manifestation du 11 nov 1943 mais elle a laissé en moi une trace indélébile.
Cette portion d’histoire de ma famille, je vous la confie, je vous la donne.
Oui les camps de concentration ont existé
Oui les prisonniers ont été maltraités, affamés.
Oui les prisonniers mouraient.
Vous voilà témoins de mon histoire familiale, mais cette histoire devient la vôtre.
Résistons à ce climat de méfiance, de haine.
Battons nous.
Merci de m’avoir écoutée