Chartreuse libre !

Par Pierre-Jean Crespeau

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Une large mobilisation, ce dimanche 15 octobre.

Un propriétaire interdit aux randonneurs d’accéder à son domaine en Chartreuse. Une manifestation a rassemblé près d’un millier de personnes ce dimanche 15 octobre pour exiger une « Chartreuse libre ».

15 octobre. Le temps est autom­nal sur le pla­teau des Petites Roches et le col de Mar­cieu est plus fré­quen­té que d’habitude. Autant de monde pour une petite ran­don­née domi­ni­cale, ce n’est pas banal. Mon­sieur de Quin­so­nas mobi­lise les gueux contre lui, et l’affaire fait grand bruit. Ima­gi­nez 750 hec­tares d’espaces natu­rel clas­sé, un site excep­tion­nel jalon­né de nom­breuses de curio­si­tés géo­lo­giques, inter­dit d’accès par le pro­prié­taire des lieux. Le Mar­quis, de son sur­nom – le titre de noblesse n’ayant plus cours en Répu­blique –, aime orga­ni­ser pour une clien­tèle for­tu­née col­lec­tion­neuse de tro­phées, des safa­ris aux cha­mois. Pour envi­ron 10 000 euros le week-end cer­tains font même le dépla­ce­ment depuis l’autre côté de l’océan.

Rassemblement-Chartreuse/

Au départ du défi­lé, le suc­cès au ren­dez-vous.

Vers 11h, le cor­tège s’élance dans la mon­tagne, petits et grands unis pour un libre accès à la réserve natu­relle de Char­treuse. Où donc se cache le domaine du mar­quis ? L’info est men­tion­née sur des pan­neaux d’interdiction, non loin du départ de la mani­fes­ta­tion. Là-bas nous attend un per­son­nage bien entou­ré : un faux mar­quis rétro-roya­liste que l’on retrou­ve­ra plus tard au bas des pistes. On peut dire que son inter­ven­tion s’est heur­tée à d’autres opi­nions !

Après la décou­verte des limites du domaine, la des­cente se fera par les pistes de ski encore bien vertes pour aller for­mer en bas une chaîne humaine et ins­crire « Char­treuse Libre ». Des drones sont là pour prendre des images. Sui­vant les comp­tages on dénombre entre 500 et 1000 par­ti­ci­pants pour l’ensemble de l’action.

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Une chaîne humaine pour for­mer les mots « Char­treuse libre ! ».

Le pique-nique sur l’herbe fraîche est bien méri­té et à par­tir de 13h30 quelques prises de paroles.

Yan­nick Val­len­çant s’est expri­mé au micro nom du syn­di­cat inter­pro­fes­sion­nel de la mon­tagne, et a annon­cé qu’une action judi­ciaire a été inten­tée par le syn­di­cat et jus­ti­fie la démarche : « le ter­rain judi­ciaire est un pilier essen­tiel de la démo­cra­tie et de la Répu­blique ». Quoi d’illégal chez mon­sieur de Quin­so­nas ? Plu­sieurs élé­ments ont été iden­ti­fiés comme poten­tiel­le­ment illé­gaux dans les chasses com­mer­ciales : elles se déroulent sur les ter­rains les plus escar­pés de Char­treuse dont l’encadrement rému­né­ré est réser­vé aux guides de haute mon­tagne, or per­sonne par­mi ces guides de chasse ne dis­pose de cette qua­li­fi­ca­tion. Défaut de diplôme donc. Pire encore, ces fameux guides ne sau­raient pas assu­rer cor­rec­te­ment leurs clients. Mise en dan­ger d’autrui. Enfin cer­tains de ces opé­ra­teurs ne pos­sé­de­raient pas d’agrément et assu­rance d’opérateur de tou­risme alors qu’ils orga­nisent des pres­ta­tions tout com­pris. Pour conclure son inter­ven­tion il met en avant des convic­tions répu­bli­caines : « Qu’on ait un titre de noblesse, qu’on ait de l’argent, de l’entre gens ou des pro­tec­tions poli­tiques, ou qu’on ait une arme, on doit res­pec­ter les lois de la Répu­blique. »

Adrien-Vassard/

Adrien Vas­sard, président du comité Isère de la Fédération française des clubs alpins et de mon­tagne (FFCAM).

Si le droit de pas­sage sur les pro­prié­tés fores­tières et rurales étaient tolé­ré, ce n’est plus le cas depuis la loi du 2 février 2023. Sen­sée lut­ter contre l’engrillagement des pro­prié­tés pri­vées en obli­geant les pro­prié­taires à enle­ver les grillages, cette loi a comme contre­par­tie la pos­si­bi­li­té d’interdire le pas­sage, sous peine d’une contra­ven­tion de 135 euros si le domaine est déli­mi­té. C’est ce qu’a rap­pe­lé le dépu­té de la cin­quième cir­cons­crip­tion de l’Isère, Jéré­mie Ior­da­noff. « Dans la Char­treuse un pro­prié­taire a uti­li­sé cette dis­po­si­tion pour mettre des pan­neaux et inter­dire l’accès. Si tout le monde fait ça, 75 % de la forêt fran­çaise étant pri­vée, on ne pour­ra plus se bala­der nulle part », s’insurge-t-il. Et ajoute qu’une pro­po­si­tion de loi pour sup­pri­mer cette dis­po­si­tion sera dépo­sée. Le dépu­té prône la dis­cus­sion avec l’ensemble des acteurs et tra­vaille avec la dépu­té de la Vienne, Lisa Bel­lu­co, pour un droit d’accès à la nature.

Randonnee-Chartreuse/

Il s’a­git bien de sen­tiers de ran­don­née.

S’ensuivent des ate­liers-débats sur accès à la nature et la réso­lu­tion de cette pro­blé­ma­tique locale, avant de retour­ner chez soi.

Defile/
Chanson-Chartreuse/

Les associations qui constituent le collectif Chartreuse

Comi­té de l’Isère des clubs alpins de mon­tagne
Mon­tagne esca­lade comi­té Isère
Syn­di­cat inter­pro­fes­sio­nel de la mon­tagne
Union natio­nale des accom­pa­gna­teurs en mon­tagne
La fon­da­tion Petzl
Moun­tain wil­der­ness (co-orga­ni­sa­teur de la mani­fes­ta­tion)
France nature envi­ron­ne­ment, sec­tion Auvergnes-Rhône-Alpes
GRENE Gré­si­vau­dan Nord envi­ron­ne­ment
AJAS Asso­cia­tion jus­tice ani­maux Savoie

Site du col­lec­tif Char­treuse : http://droit-a-la-nature.org/
Mani­feste du col­lec­tif Char­treuse : http://manifeste.droit-a-la-nature.org/

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