Gratuité des transports en commun. L’urgence, climatique et sociale

Par Edouard Schoene

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Laurent Terrier, représentant de l’union départementale CGT au sein du collectif grenoblois pour la gratuité des transports en commun.

A l’issue de la rencontre nationale des collectifs pour la gratuité des transports qui a eu lieu dernièrement à Grenoble, Laurent Terrier constate tout à la fois un double langage au niveau national et un manque de volonté politique au niveau de la grande agglomération grenobloise, du Voironnais au Grésivaudan.

La gra­tui­té des trans­ports en com­mun, c’est désor­mais un objec­tif pour des col­lec­tifs dans de nom­breuses vielles de France. Treize d’entre eux se coor­donnent au niveau natio­nal. Citons par­mi eux, ceux d’Aubagne, de Cham­bé­ry, Gre­noble, Rou­baix, Lyon, Metz, Nan­cy, Rouen et Stras­bourg. Le col­lec­tif natio­nal s’est réuni à Gre­noble, capi­tale verte euro­péenne. A cette occa­sion, un appel a été lan­cé pour aler­ter en par­ti­cu­lier les can­di­dats en cam­pagne pré­si­den­tielle sur l’urgence d’une mise en œuvre large, sur le ter­ri­toire natio­nal de la gra­tui­té des trans­ports en com­mun.

La gra­tui­té des trans­ports en com­mun, c’est déjà une réa­li­té dans trente-cinq agglo­mé­ra­tions du pays.

Nous avons ren­con­tré Laurent Ter­rier, repré­sen­tant l’UD CGT Isère dans le Col­lec­tif pour la gra­tui­té des trans­ports publics de l’agglomération gre­no­bloise, pour faire le point sur le dos­sier.

« Le 15 jan­vier, c’était l’inauguration de « Gre­noble capi­tale verte euro­péenne ». Pour­tant, le bilan de la Métro­pole en matière envi­ron­ne­men­tale n’est pas brillant : le Conseil d’État a condam­né l’État en août 2021 à ver­ser 10 mil­lions d’euros pour action insuf­fi­sante contre la pol­lu­tion de l’air dans cinq métro­poles, Paris, Lyon, Mar­seille-Aix, Tou­louse… et Gre­noble », constate-t-il.

Or les trans­ports repré­sentent 30% des émis­sions de gaz à effet de serre, et on estime qu’il fau­drait dou­bler la part modale des trans­ports en com­mun d’ici 2030 pour res­pec­ter les cri­tères de la COP21. « Dix ans, c’est très court, nous n’avons plus le temps pour des demi-mesures. »

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Dans trente-cinq agglo­mé­ra­tions, la gra­tui­té est deve­nue une réa­li­té. D’autres sont sur la voie, dont Mont­pel­lier.

Pour Laurent Ter­rier, il faut chan­ger de bra­quet. « Il nous faut chan­ger pro­fon­dé­ment nos modes de trans­ports, en déve­lop­pant mas­si­ve­ment les bus, les trams, ren­for­cer mas­si­ve­ment la des­serte fer­ro­viaire du ter­ri­toire, amé­lio­rer sa fia­bi­li­té et les fré­quences. »

Pour y par­ve­nir, Laurent Ter­rier sug­gère de modi­fier l’approche du pro­blème. «  Pou­voir se dépla­cer sur le ter­ri­toire est une néces­si­té pour tous, cela doit deve­nir un droit, en met­tant en place la gra­tui­té des trans­ports. La gra­tui­té est un signal envoyé à la popu­la­tion pour lais­ser la voi­ture et prendre les trans­ports publics ! Ce qui réduit les embou­teillages, la pol­lu­tion, ce qui est bon pour la san­té et la tran­quilli­té quo­ti­dienne. Tout le monde en pro­fite, il est donc nor­mal que ce soit pris en charge col­lec­ti­ve­ment, comme la san­té ou l’école. »

Pour­tant, sou­ligne Laurent Ter­rier, « qua­si­ment rien n’a bou­gé depuis 10 ans ». Il estime que « les res­pon­sa­bi­li­tés sont d’abord natio­nales, avec un pou­voir d’État qui manie le double dis­cours en per­ma­nence, avec des décla­ra­tions d’intention ver­tueuses d’un côté, et la pour­suite des poli­tiques d’austérité de l’autre. » Ain­si du che­min de fer : «  Non seule­ment il n’y a pas d’effort bud­gé­taire pour déve­lop­per mas­si­ve­ment le fer­ro­viaire, mais le PDG de la SNCF a annon­cé en sep­tembre 2021 la sup­pres­sion de 2000 à 3000 postes en 2022. La fer­me­ture des gares et des gui­chets conti­nue et n’est frei­née que lorsqu’il y a mobi­li­sa­tion des usa­gers et des che­mi­nots. L’ouverture à la concur­rence nous amène dou­ce­ment à la pri­va­ti­sa­tion, les petites lignes sont mena­cées (à Gre­noble, il faut remer­cier la téna­ci­té et la déter­mi­na­tion du col­lec­tif de défense de la ligne Gre­noble Gap sans lequel la ligne aurait déjà dis­pa­ru ! ».

Réduc­tion de la pol­lu­tion et des bou­chons : tout le monde en pro­fi­te­rait, logique que la gra­tui­té soit prise en charge col­lec­ti­ve­ment

Mais, pour le porte-parole du col­lec­tif gre­no­blois pour la gra­tui­té des trans­ports, ce sont éga­le­ment les déci­sions prises au niveau local qu’il faut inter­ro­ger. Laurent Ter­rier évoque la néces­si­té d’un « sys­tème de RER Gre­no­blois, avec des trains toute la jour­née, sur une ampli­tude horaire large, et des fré­quences éle­vées, pas seule­ment aux heures de pointe (un train tous les quart d’heure par exemple) ». De fait, si tous les acteurs poli­tiques locaux en sou­lignent la néces­si­té, « c’est comme s’il n’y avait pas d’urgence, et main­te­nant on nous parle de 2035, voire encore plus tard. Par contre, nous aurons dès cette année une troi­sième voie d’autoroute. Cerise sur le gâteau, le SMMAG (qui gère les trans­ports publics du voi­ron­nais au Gré­si­vau­dan) vient d’annoncer que les tarifs des trans­ports urbains vont aug­men­ter et leur fré­quence dimi­nuer pour les deux ans qui viennent. Il faut croire que les com­munes et la métro­pole ont elles aus­si été gagnées par le « en même temps » ! »

Laurent Ter­rier rap­pelle que « la gra­tui­té des trans­ports publics existe déjà dans 35 villes en France, et bien­tôt dans des villes com­pa­rables à la nôtre, comme Mont­pel­lier ». Et il s’interroge : « Pour­quoi ne serait-ce pas pos­sible dans la région gre­no­bloise ? Pour­quoi ce manque de volon­té poli­tique dans une métro­pole où la majo­ri­té est à gauche et éco­lo­giste ? »

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