Habitat participatif. A Grenoble, le projet Graine de bitume est en panne

Par Edouard Schoene

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Un rassemblement festif avec un objectif : que le dossier remonte au sommet dans la pile des priorités.

Le collectif « Graine de bitume » a organisé le 22 janvier un rassemblement sur le terrain qui devrait accueillir la construction d’un immeuble en habitat groupé participatif. Un projet dont l’origine remonte à 2010, approuvé par la ville en 2014, et qui se heurte depuis deux ans à une inertie administrative qui met en cause sa réalisation.

Pour­quoi ça n’avance pas ? C’est la ques­tion que se posent les ini­tia­teurs du pro­jet « Graine de bitume ». Ce pro­jet , c’est celui de la construc­tion d’un immeuble en habi­tat coopé­ra­tif qui résulte d’un appel à pro­jet lan­cé par la ville de Gre­noble et la métro­pole en 2014. Il est situé dans le quar­tier Beau­vert, rue Alfred de Vigny. Le ter­rain appar­tient à la ville.

Le dos­sier adop­té à l’époque pré­voit la signa­ture d’un bail à construc­tion : les futurs habi­tants – treize loge­ments dont quatre loge­ments sociaux – seront pro­prié­taires de parts sociales d’une coopé­ra­tive à laquelle la ville concè­de­ra l’oc­cu­pa­tion du ter­rain pen­dant soixante ans. A charge à la coopé­ra­tive – avec l’argent appor­té men­suel­le­ment par les habi­tants – de régler le paie­ment des emprunts et des charges com­munes, ain­si que de pro­vi­sion­ner les tra­vaux d’entretien à pré­voir sur le long terme. Ce sys­tème est ain­si une pro­tec­tion contre les hausses spé­cu­la­tives : si une famille sou­haite démé­na­ger, les parts sociales peuvent être reven­dues à leur prix d’achat mais pas davan­tage.

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Le pro­jet conçu par les archi­tectes payés par Graine de bitume.

Depuis 2014, les familles asso­ciées au pro­jet ont beau­coup tra­vaillé. « Nous créons notre socié­té coopé­ra­tive, enga­geons nos éco­no­mies (achat de parts sociales dans la socié­té), recher­chons un bailleur par­te­naire (notre pro­jet ne déchaîne pas leur enthou­siasme), puis un archi­tecte, une banque, et des per­sonnes inté­res­sées par notre pro­jet… », pré­cise l’association.

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Un dos­sier aujourd’­hui admi­nis­tra­ti­ve­ment en panne.

Mais c’est lorsque le moment arrive de concré­ti­ser que les obs­tacles se dressent sur la route des coopé­ra­teurs. L’association met en cause le manque de coopé­ra­tion entre les ser­vices de la métro­pole – aujourd’hui com­pé­tente en matière de loge­ment – et ceux de la ville de Gre­noble – qui pos­sède le ter­rain.

Le col­lec­tif Graine de bitume com­mente : « L’habitat coopé­ra­tif croise les poli­tiques du loge­ment, de l’économie sociale et soli­daire et de la soli­da­ri­té. Mais le fonc­tion­ne­ment « en silo » des poli­tiques publiques ne favo­rise pas la réa­li­sa­tion de ces opé­ra­tions. L’État porte trop peu ces ini­tia­tives, ce qui per­met aux col­lec­ti­vi­tés « pru­dentes » de ne rien faire… Gre­noble fait par­tie des col­lec­ti­vi­tés pru­dentes et tra­vaille aus­si « en silo » » . Et ajoute : « Gre­noble et la Métro parlent beau­coup de co-construc­tion, de par­ti­ci­pa­tion habi­tante » sans que cela se tra­duise dans les faits pour le pro­jet Graine de bitume.

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Gwenn Bous­sard, l’un des membres de la coopé­ra­tive.

Gwenn Bous­sard, l’un des membres de la coopé­ra­tive, regrette même ce qu’il estime être une « marche arrière des élus de la ville et de la métro » tan­dis qu’il dénonce l’attitude de Plu­ra­lis, le bailleur social « qui ne nous répond même plus » alors que Plu­ra­lis et Graine de bitume ont signé une conven­tion. Or le bailleur détient l’une des clés d’un déblo­cage poten­tiel : c’est cet orga­nisme qui devait garan­tir les emprunts néces­saires à la construc­tion.

Le col­lec­tif demande donc à la ville et à la métro­pole de prendre en charge cette garan­tie d’emprunt au nom du res­pect de pro­messes faites et de tra­vailler avec Graine de bitume au règle­ment des aspect admi­nis­tra­tifs du dos­sier.

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L’im­pa­tience des coopé­ra­teurs… douze ans après les pre­mières études sur le pro­jet.

Le blo­cage du pro­jet inter­vient dans un contexte plus large. La droite gre­no­bloise en a fait une illus­tra­tion de son « com­bat pour les espaces verts ». En sep­tembre der­nier, Alain Cari­gnon est venu sur place dénon­cer « la béto­ni­sa­tion » de la ville. Vive oppo­si­tion éga­le­ment de la part de Pierre Hum­bert, pré­sident de l’union de quar­tier et can­di­dat en vue sur la liste d’extrême-droite conduite par Mireille d’Ornano lors de la der­nière élec­tion muni­ci­pale gre­no­bloise. Des oppo­sants à l’o­ri­gine d’un recours en jus­tice for­mé en 2018… et dont les membres de Graine de bitume n’ont eu connais­sance que ces jours der­niers.

Aujourd’hui, le col­lec­tif Graine de bitume espère bien que la mise du dos­sier sur la place publique va per­mettre de faire évo­luer la situa­tion. Ses membres n’ont peut-être par tort : Graine de bitume a été invi­té à par­ti­ci­per à une réunion le 1er février avec élus et ser­vices de la ville de Gre­noble et de la métro­pole.

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La batu­ka­vi de Gre­noble, groupe de per­cus­sions de jeunes connu inter­na­tio­na­le­ment.

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