Impossible, en ces temps difficiles, de mettre en marche sa radio, sa télé, d’ouvrir son journal, sans être noyé sous une avalanche d’informations, de reportages, d’interventions d' »experts », de recommandations … concernant la deuxième vague de Covid-19. Et pourtant, nombreux sont celles et ceux qui ont le sentiment d’un évitement par les médias de questions qu’ils se posent légitimement face aux contradictions qui apparaissent au sein même du discours dominant.

Les moyens de faire la classe

On nous dit que « les jeunes ne sont pas les plus grands propagateurs de la maladie » et en même temps que « 35,3% des clusters* sont dans le milieu scolaire et universitaire » (Le Monde du 13 octobre), que « le nombre de clusters identifiés (est) probablement largement sous-estimé » (Santé publique France) et qu’à la fin de l’été, « le nombre des infections est reparti à la hausse sur des sujets jeunes ». Est-il donc possible de se demander si la décision de faire rentrer les élèves dans les lycées et collèges avec parfois 35 par classe, foule à l’entrée des établissements, dans les couloirs, dans les files de cantine, d’accueillir les étudiants par centaines dans les amphis, si cette décision n’a pas eu pour conséquence la diffusion du virus mortel sur tout le territoire, dans les plus petites communes, les plus isolées, via leurs jeunes habitants? Dans l’Académie de Grenoble, à la mi-novembre, on nous informe d’« une augmentation des cas positifs dans les établissements », de la fermeture d’un lycée, de deux écoles, de classes en école et en collège … Si les enseignants restent favorables au retour au présentiel, ils assortissent cette demande de moyens permettant d’affronter l’épidémie: demi-groupes, recrutement de personnels d’enseignement, d’administration et de service, locaux (provisoires) supplémentaires … Où sont ces moyens indispensables?

« il n’y a plus de refus d’hospitalisation quand c’est nécessaire »

On imprime : « Les établissements pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) gèrent mieux la deuxième vague » (Dauphiné libéré du 15 novembre). Mais dans le même DL le 28 octobre on affirmait que « le nombre de clusters dans les Ehpad explose ». Quinze établissements déjà concernés dans le sud-Isère contre neuf en tout lors de la première vague. La liste s’allonge : Le Pont de Beauvoisin, Voiron, Le Pont de Claix, Noyarey, Froges, Voreppe, Saint-Martin-d’Hères … Santé publique France note « une forte augmentation depuis la mi-octobre de la mortalité dans les Ehpad ». 62 résidents décédés pour cause de Covid dans les Ehpad isérois entre le 3 et le 9 novembre. Les établissements « gèrent mieux » mais les résidents moins bien? Malgré les affirmations de dirigeants d’établissements privés pour personnes âgées selon lesquelles « il n’y a plus de refus d’hospitalisation quand c’est nécessaire », on peut, en notant au passage cet aveu de refus d’hospitalisation lors de la première vague, se demander si les moyens de réanimation qui manquent tant dans les hôpitaux sont maintenant dans les Ehpad puisque, pour ces très nombreuses personnes âgées décédées, l’hospitalisation n’était apparemment pas « nécessaire ». A l’heure où ces lignes sont écrites, et face à la saturation du système hospitalier, la question de la prise en charge des personnes « trop âgées » ou qui ont « certaines pathologies » est carrément et cyniquement posée dans les médias.

Il y a encore bien d’autres questions, mais arrêtons-nous sur celle-ci pour aujourd’hui: est-ce que « old people lives matter** »?

* En français: foyers
** En français: les vies des vieux importent

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