Trois militants d’extrême droite jugés en appel après le « contrôle » de la frontière par Génération identitaire

Par Edouard Schoene

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Trois mili­tants d’extrême droite (GI) ont fait appel du juge­ment inter­ve­nu à Gap en 2019 où ils avaient été condam­nés à six mois de pri­son ferme. Rap­pe­lons qu’ils ont déployé des moyens consi­dé­rables pen­dant plu­sieurs semaines dans le Brian­çon­nais, contre l’entrée en France d’immigrés.
Le pro­cès en appel avait lieu le 21 octobre à Gre­noble tan­dis que deux moments forts de mani­fes­ta­tions anti­fas­cistes ont eu lieu.

A 14h devant le palais de jus­tice bien pro­té­gé par les CRS, les orga­ni­sa­teurs d’une confé­rence de presse pre­naient la parole devant une cen­taine de mili­tants anti­fas­cistes.

« En avril 2018 dans la région de Brian­çon, une cen­taine de militant.es d’extrême droite se reven­di­quant de l’organisation Géné­ra­tion Iden­ti­taire venus de plu­sieurs pays d’Europe arri­vait au col de l’Echelle, lieu de pas­sage des migrant.es ten­tant de fran­chir la fron­tière entre l’Italie et la France. La venue des iden­ti­taires avait pour objec­tif de blo­quer les exilé.es qui ten­taient de fran­chir le col.  Les moyens mis en œuvre par l’organisation étaient déme­su­rés : héli­co­ptère, 4x4, « dou­dounes bleues » spé­cia­le­ment conçues pour l’occasion, vidéos live sur inter­net… Cette opé­ra­tion aux objec­tifs et aux moyens nau­séa­bonds a pu se dérou­ler sans encombre dans une zone par­ti­cu­liè­re­ment mili­ta­ri­sée et sur­veillée, dans laquelle les migrant.es sont pour­chas­sés et en dan­ger de mort quo­ti­dien­ne­ment. Après un wee­kend qui s’apparentait à une grande opé­ra­tion de com­mu­ni­ca­tion, les iden­ti­taires sont res­tés dans la région de Brian­çon où durant plu­sieurs semaines ils ont recher­ché, pour­sui­vi et arrê­té des exilé.es avant de les remettre à la Police aux Fron­tières (PAF). Les iden­ti­taires sont allés jusqu’à se mettre eux-mêmes en scène en train de jouer les flics. Les accoin­tances entre la PAF et les mili­tants d’extrême droite ne font aucun doute, la PAF accep­tant tota­le­ment le fait que des sub­sti­tuts non asser­men­tés fassent leur tra­vail. Il a fal­lu une mobi­li­sa­tion des militant.es soli­daires pour que l’Etat fran­çais, via le pro­cu­reur de la Répu­blique, finisse par pour­suivre les iden­ti­taires. En pre­mière ins­tance trois mili­tants iden­ti­taires ont été condam­nés à 6 mois de pri­son ferme (sans man­dat de dépôt), 2000 euros d’amende et à la pri­va­tion de leurs droits civiques, civils et de famille pour 5 ans.  L’association Géné­ra­tion Iden­ti­taire a éco­pé de 75000 euros d’amende. Ces mili­tants n’ont été pour­sui­vis que pour avoir « exer­cé des acti­vi­tés dans des condi­tions de nature à créer dans l’esprit public une confu­sion avec l’exercice d’une fonc­tion publique. »  

Les chefs d’accusation d’incitation à la haine raciale et mise en dan­ger de la vie d’autrui n’ont pas été rete­nus pour le pro­cès en appel qui a eu lieu le 21 octobre devant la cour d’ap­pel de Gre­noble.

A l’is­sue des débats, l’a­vo­cat géné­ral requé­rait une peine de six mois de pri­son avec un sur­sis pro­ba­toire de trois ans, deman­dait à la cour de rééva­luer — de réduire, somme toute — la durée de la pri­va­tion des droits civiques et de confir­mer l’a­mende de 75000 euros infli­gée au mou­ve­ment Géné­ra­tion iden­ti­taire. Le juge­ment sera ren­du le 15 décembre. Les trois pré­ve­nus avaient été condam­né à six mois ferme, en pre­mière ins­tance par le tri­bu­nal judi­ciaire de Gap.

En soi­rée, six cents per­sonnes ont par­ti­ci­pé à un ras­sem­ble­ment (*) et ont défi­lé de la place Félix Pou­lat jus­qu’au musée de Gre­noble pour dénon­cer les menées de l’ex­trême-droite.

Reste une ques­tion à l’is­sue de cette jour­née. Fal­lait-il que ce pro­cès se tienne sous les aus­pices exclu­sifs de l’u­sur­pa­tion des mis­sions dévo­lues à la police de la Répu­blique — pen­dant plus d’un mois, les membres de Géné­ra­tion iden­ti­taire se sont auto-attri­bué le rôle de la police des fron­tières — avec héli­co­ptères, véhi­cules tout ter­rain aux appa­rences offi­cielles, ano­raks bleus façon gen­darmes… -? Car d’autres lois existent, celles qui excluent le racisme et l’in­ci­ta­tion à la haine dans la sphère de la Répu­blique. Peut-on consi­dé­rer que la « chasse au migrants » telle qu’elle s’est pra­ti­quée dans les envi­rons du col de l’E­chelle ne rele­vait pas du racisme et de l’in­ci­ta­tion à la haine ? Et n’a­vait-il pas matière à pour­suivre sur ces chefs délic­tueux ?

La pré­si­dente de la cour a vou­lu, dès l’ou­ver­ture de l’au­dience, rap­pe­ler que la poli­tique n’a­vait pas droit de cité dans l’en­ceinte d’un tri­bu­nal.

Les lois anti­ra­cistes relèvent bien du Code pénal. Pas de la poli­tique.

(*) Les signa­taires de ce ras­sem­ble­ment étaient : RLF — Réseau de luttes contre le fas­cisme, SUD–Solidaires 38, CGT, CNT 38, NPA 38, UNEF, UCL, UEC, UNL, Anti­rep CAR 38, Bri­gades de Soli­da­ri­té Popu­laire, Col­lec­tif des sans-papiers 38,…

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