Grenoble. À la mémoire des Algériens massacrés le 17 octobre 1961
Par Maryvonne Mathéoud
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C’est une foule toujours plus nombreuse d’année en année, qui se réunit sur la place Edmond-Arnaud, dans le quartier Très-Cloîtres, pour honorer la mémoire des victimes algériennes de ce massacre colonial. Une mobilisation à laquelle participent de nombreux élus et personnalités.

Les prises de parole d’Isabelle Peters, première adjointe au maire de Grenoble, et de Nedjma Bendiab, présidente de l’association Algérie au cœur intervenant au nom du collectif du 17 octobre 1961, ont été suivies des dépôts de gerbes par le collectif du 17 octobre 1961, le consulat d’Algérie, la ville de Grenoble, les parlementaires, Grenoble Alpes Métropole. Puis les manifestants ont défilé vers la passerelle Saint-Laurent où ils ont jeté une fleur dans l’Isère.

« Se souvenir, c’est reconnaître ; reconnaître, c’est avancer. La mémoire du 17 octobre 1961 nous oblige à regarder notre histoire en face, avec lucidité et courage, pour construire une société véritablement fraternelle et respectueuse des droits humains. Le devoir de mémoire ne consiste pas uniquement à évoquer le passé : il engage notre présent. Il nous rappelle la nécessité contante de défendre la dignité humaine, de combattre les discriminations et de promouvoir la paix », a souligné Isabelle Peters dans son allocution.
« Le sommet de l’État est aussi en cause »
Nedjma Bendiab a rappelé quant à elle les faits de ce jour sombre. « Le 17 octobre 1961, des dizaines de milliers de travailleurs algériens et leurs familles ont manifesté pacifiquement à Paris pour le droit à l’indépendance de l’Algérie, pour leur droit à l’égalité et à la dignité, contre le couvre-feu raciste qui leur était imposé », a raconté la militante associative.

« Alors que la manifestation était pacifique, la répression s’est abattue sur les manifestants avec une grande violence, des milliers d’arrestations, des centaines de morts ou disparus, a‑t-elle poursuivi. Le préfet de police de Paris qui conduisait les opérations était Maurice Papon, condamné en 1998 pour complicité de crimes contre l’humanité pour des actes commis entre 1942 et 1944. »

Toutefois, « Maurice Papon n’est pas le seul à porter la responsabilité de ce massacre, le sommet de l’État est aussi en cause », a insisté Nedjma Bendiab. En effet, « le ministre de l’Intérieur, Roger Frey, et le Premier ministre, Michel Debré, étaient forcément informés. Nous savons aujourd’hui que Charles de Gaulle, alors le président de la République, était au courant. »
Ouvrir les archives de la guerre d’Algérie
Dans son intervention, la présidente d’Algérie au cœur a également évoqué la pleine solidarité avec le peuple palestinien ainsi que la libération des personnes emprisonnées — encore deux cents à ce jour — à la suite du Hirak en Algérie. Nedjma a détaillé en outre les revendications des manifestants :
- exiger de l’État français qu’il reconnaisse officiellement sa responsabilité dans les massacres liés à la colonisation
- exiger la reconnaissance des massacres du 17 octobre comme crime d’État
- réclamer l’ouverture des archives de la guerre d’Algérie et de la colonisation aux chercheurs français et étrangers, sans restrictions, ni exclusives
- refuser les discours xénophobes, racistes, colonialistes


