Grenoble. À la mémoire des Algériens massacrés le 17 octobre 1961

Par Maryvonne Mathéoud

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Banderole déployée par les manifestants, dans le quartier Très-Cloîtres, vendredi 17 octobre 2025.
Algérie au cœur, Amal, l'Association nationale des pieds noirs progressistes et de leurs amis (ANPNPA), l'Association de solidarité des Algériens de l'Isère (ASALI), le Comité de soutien aux réfugiés algériens (CSRA), Coup de soleil Auvergne - Rhône-Alpes, la Libre Pensée et le Mouvement de la paix – Isère appelaient à un rassemblement, vendredi 17 octobre, à Grenoble, avec le soutien d'une cinquantaine d'organisations, pour commémorer le massacre des manifestants algériens, le 17 octobre 1961, en plein cœur de Paris.

C’est une foule tou­jours plus nom­breuse d’an­née en année, qui se réunit sur la place Edmond-Arnaud, dans le quar­tier Très-Cloîtres, pour hono­rer la mémoire des vic­times algé­riennes de ce mas­sacre colo­nial. Une mobi­li­sa­tion à laquelle par­ti­cipent de nom­breux élus et per­son­na­li­tés.

Une foule nom­breuse pour cette com­mé­mo­ra­tion.

Les prises de parole d’I­sa­belle Peters, pre­mière adjointe au maire de Gre­noble, et de Ned­j­ma Ben­diab, pré­si­dente de l’as­so­cia­tion Algé­rie au cœur inter­ve­nant au nom du col­lec­tif du 17 octobre 1961, ont été sui­vies des dépôts de gerbes par le col­lec­tif du 17 octobre 1961, le consu­lat d’Al­gé­rie, la ville de Gre­noble, les par­le­men­taires, Gre­noble Alpes Métro­pole. Puis les mani­fes­tants ont défi­lé vers la pas­se­relle Saint-Laurent où ils ont jeté une fleur dans l’I­sère.

Les mani­fes­tants ont pu jeter une fleur dans l’I­sère du haut de la pas­se­relle Saint-Laurent.

« Se sou­ve­nir, c’est recon­naître ; recon­naître, c’est avan­cer. La mémoire du 17 octobre 1961 nous oblige à regar­der notre his­toire en face, avec luci­di­té et cou­rage, pour construire une socié­té véri­ta­ble­ment fra­ter­nelle et res­pec­tueuse des droits humains. Le devoir de mémoire ne consiste pas uni­que­ment à évo­quer le pas­sé : il engage notre pré­sent. Il nous rap­pelle la néces­si­té contante de défendre la digni­té humaine, de com­battre les dis­cri­mi­na­tions et de pro­mou­voir la paix », a sou­li­gné Isa­belle Peters dans son allo­cu­tion.

« Le sommet de l’État est aussi en cause »

Ned­j­ma Ben­diab a rap­pe­lé quant à elle les faits de ce jour sombre. « Le 17 octobre 1961, des dizaines de mil­liers de tra­vailleurs algé­riens et leurs familles ont mani­fes­té paci­fi­que­ment à Paris pour le droit à l’indépendance de l’Al­gé­rie, pour leur droit à l’égalité et à la digni­té, contre le couvre-feu raciste qui leur était impo­sé », a racon­té la mili­tante asso­cia­tive.

Ned­j­ma Ben­diab, pré­si­dente de l’as­so­cia­tion Algé­rie au cœur, a lon­gue­ment pris la parole au nom du col­lec­tif du 17 octobre 1961.

« Alors que la mani­fes­ta­tion était paci­fique, la répres­sion s’est abat­tue sur les mani­fes­tants avec une grande vio­lence, des mil­liers d’arrestations, des cen­taines de morts ou dis­pa­rus, a‑t-elle pour­sui­vi. Le pré­fet de police de Paris qui condui­sait les opé­ra­tions était Mau­rice Papon, condam­né en 1998 pour com­pli­ci­té de crimes contre l’hu­ma­ni­té pour des actes com­mis entre 1942 et 1944. »

Par­mi les élues pré­sentes, la pre­mière adjointe Isa­belle Peters, entou­rée des dépu­tées de l’I­sère Éli­sa Mar­tin et San­drine Nos­bé, ou encore l’ad­jointe Khei­ra Cap­de­pon.

Tou­te­fois, « Mau­rice Papon n’est pas le seul à por­ter la res­pon­sa­bi­li­té de ce mas­sacre, le som­met de l’État est aus­si en cause », a insis­té Ned­j­ma Ben­diab. En effet, « le ministre de l’Intérieur, Roger Frey, et le Pre­mier ministre, Michel Debré, étaient for­cé­ment infor­més. Nous savons aujourd’hui que Charles de Gaulle, alors le pré­sident de la Répu­blique, était au cou­rant. »

Ouvrir les archives de la guerre d’Algérie

Dans son inter­ven­tion, la pré­si­dente d’Al­gé­rie au cœur a éga­le­ment évo­qué la pleine soli­da­ri­té avec le peuple pales­ti­nien ain­si que la libé­ra­tion des per­sonnes empri­son­nées — encore deux cents à ce jour — à la suite du Hirak en Algé­rie. Ned­j­ma a détaillé en outre les reven­di­ca­tions des mani­fes­tants :

  • exi­ger de l’É­tat fran­çais qu’il recon­naisse offi­ciel­le­ment sa res­pon­sa­bi­li­té dans les mas­sacres liés à la colo­ni­sa­tion
  • exi­ger la recon­nais­sance des mas­sacres du 17 octobre comme crime d’État
  • récla­mer l’ou­ver­ture des archives de la guerre d’Al­gé­rie et de la colo­ni­sa­tion aux cher­cheurs fran­çais et étran­gers, sans res­tric­tions, ni exclu­sives
  • refu­ser les dis­cours xéno­phobes, racistes, colo­nia­listes
Les mani­fes­tants écou­tant les prises de parole.
Plu­sieurs gerbes de fleurs ont été dépo­sées.
La plaque com­mé­mo­ra­tive, place Edmond-Arnaud.

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