Métropole de Grenoble. La privatisation du logement social ne passe pas

Par Edouard Schoene

/

Image principale
De gauche à droite, Jean François Lapierre, porte-parole du collectif contre la privatisation d’Actis, Patricia Ospelt DAL 38, Bruno Delescure, Julie Martin CSF 38.

Lors d’une conférence de presse le 3 décembre, le collectif contre la privatisation d’Actis (*) a indiqué son opposition à la dissolution de l’office HLM, projet évoqué par Christophe Ferrari, président de Grenoble Alpes métropole. Le collectif appelle à deux rassemblements les 15 et 17 décembre, devant le siège d’Actis puis de celui de la métropole.

Les repré­sen­tants du col­lec­tif ont déplo­ré, avec un vif mécon­ten­te­ment, l’annonce faite par le pré­sident de la métro­pole le 25 novembre de la pos­si­bi­li­té d’une dis­so­lu­tion de l’office public Actis et la créa­tion d’une « grande socié­té d’économie mixte », autour de Gre­noble Habi­tat. « Les sala­riés, pré­cise Jean-Fran­çois Lapierre, n’en ont même pas été infor­més ! » « C’est le retour, qua­si à l’i­den­tique, du pro­jet repous­sé en 2019 après la mobi­li­sa­tion des loca­taires et de leurs asso­cia­tions (la CSF 38, la CNL Isère, la CLCV 38, la CGL 38, DAL 38, Inde­co­sa-CGT 38), des béné­fi­ciaires du RSA au sein de RSA 38, des sala­riés et de leurs syn­di­cats CGT et CFDT, et de citoyens. »

ACTIS

Jean-Fran­çois Lapierre et Julie Mar­tin.

Une socié­té d’économie mixte, c’est une socié­té contrô­lée à terme par des action­naires pri­vés. C’est ce que dit Emma­nuelle Cosse, pré­si­dente de l’U­nion sociale pour l’habitat — porte-parole du mou­ve­ment HLM -, ministre du Loge­ment de 2016 à 2017, secré­taire natio­nale d’EELV de 2013 à 2016. Elle appelle à «  expli­quer aux élus que “non”, quit­ter le sta­tut public pour se trans­for­mer en SEM, ce n’est pas rien, et ça ne per­met pas de conser­ver le contrôle » sur les loge­ments sociaux, puisque le conseil d’ad­mi­nis­tra­tion inclut des acteurs pri­vés qui acquièrent un droit de regard sur les comptes. « Beau­coup ont été sol­li­ci­tés, char­més, mais trom­pés aus­si », ajoute-t-elle.

ACTIS

Patri­cia Ospelt.

La SEM est un jeu de dupes pour les loca­taires et les sala­riés. Le col­lec­tif a lis­té les consé­quences qu’aurait ce chan­ge­ment de sta­tut : « une repré­sen­ta­tion des loca­taires réduite (deux à Gre­noble habi­tat contre cinq actuel­le­ment à Actis) avec une voix consul­ta­tive sur bien des sujets, aucune repré­sen­ta­tion des syn­di­cats, aucune repré­sen­ta­tion des asso­cia­tions d’in­ser­tion, aucune repré­sen­ta­tion de la socié­té civile (CAF, UDAF, per­sonnes qua­li­fiées), des sala­riés rat­ta­chés à la conven­tion col­lec­tive du sec­teur de l’im­mo­bi­lier, la pos­si­bi­li­té de dis­tri­buer des divi­dendes aux action­naires et une une atten­tion prio­ri­taire por­tée à la pro­mo­tion pri­vée (qui doit rap­por­ter de l’argent) plu­tôt qu’à la qua­li­té de ser­vice offerte aux loca­taires ».

En s’appuyant sur une étude réa­li­sée par Séma­phores en 2019, les membres du col­lec­tif rap­pellent en outre que « ce pro­jet n’est pas un choix fait en faveur du loge­ment social : les études faites en 2019 par la ville de Gre­noble et la métro­pole ont mon­tré que la SEM ne per­met­tait pas de construire un seul loge­ment sup­plé­men­taire ». Le pro­jet du pré­sident de la métro­pole, « au contraire, en contrai­gnant la métro à ache­ter à prix d’or les actions de Gre­noble habi­tat, va assé­cher le bud­get que la métro­pole consa­cré à la construc­tion et à la réha­bi­li­ta­tion de loge­ments sociaux (envi­ron 5 mil­lions d’eu­ros) ou obli­ger la métro­pole à revendre un maxi­mum d’ac­tions à des par­te­naires pri­vés… si elles en trouvent » pour se rem­bour­ser de la dépense du rachat des actions de Gre­noble habi­tat. Et consti­tuer une SEM où la part des action­naires pri­vés serait accrue d’autant.

ACTIS

Bru­no Deles­cure, Patri­cia Ospelt, Jean Fran­çois Lapierre et Julie Mar­tin.

La déli­bé­ra­tion du mois de mai à la métro­pole avait pour­tant déci­dé, pour satis­faire aux exi­gences légales impo­sées par la loi Elan, de regrou­per en une SAC (socié­té ano­nyme de coor­di­na­tion Gre­noble Habi­tat (4000 loge­ments) et Actis (11 000 loge­ments). C’était une pro­po­si­tion défen­due par Nico­las Beron Per­ez, vice-pré­sident com­mu­niste de la métro­pole, char­gé du loge­ment. « Le pré­sident de la métro­pole accré­dite ce que nous affir­mions depuis le début : la SAC avec la SEM Gre­noble habi­tat n’é­tait qu’une étape pour la fusion des deux struc­tures dans une socié­té pri­vée », affirme cepen­dant le col­lec­tif.

Reste que le col­lec­tif dénonce ce choix du pré­sident, s’étonnant qu’il soit inter­ve­nu contre l’avis du vice pré­sident Nico­las Beron Per­ez, qui a publi­que­ment et à plu­sieurs reprises pris posi­tion contre la fusion sous le sta­tut d’une SEM.

Le col­lec­tif insiste sur le fait que des solu­tions alter­na­tives ont été pro­po­sées, notam­ment le 8 octobre der­nier lors d’une réunion publique à la Vil­le­neuve. Au nombre de trois : Actis peut rache­ter des loge­ments à d’autres bailleurs sociaux (Loge­ment du pays vizillois, une socié­té d’économie mixte dont l’ac­tion­naire public est la ville de Vizille ; Alpes Isère habi­tant, l’office du dépar­te­ment ; Plu­ra­lis ou Gre­noble habi­tat). Actis peut rejoindre une autre socié­té ano­nyme de coor­di­na­tion : la Sce­rea (Socié­té de coor­di­na­tion entre Rhône et Alpes, créée par Alpes Isère habi­tant et Advi­vo, l’office HLM de Vienne). Ou encore Actis peut créer une nou­velle SAC avec le LPV. La créa­tion de SAC fait donc bien par­tie des solu­tions per­met­tant de pré­ser­ver le carac­tère public d’Actis.

ACTIS

Les dif­fé­rentes orga­ni­sa­tions membres du col­lec­tif contre la pri­va­ti­sa­tion d’Ac­tis.

A mini­ma le col­lec­tif demande un débat public sur le loge­ment et que des déci­sions soient prises pour garan­tir le carac­tère public de l’organisme.
Dans l’immédiat, le col­lec­tif demande à la métro­pole de renon­cer à la dis­so­lu­tion d’Actis. Il s’adresse à la pré­si­dente d’Actis, Eli­sa Mar­tin, et au vice-pré­sident métro­po­li­tain à l’habitat, Nico­las Beron Per­ez : « Madame la pré­si­dente, Mon­sieur le vice-pré­sident, le moment est venu de mettre vos actions et vos actes en cohé­rence avec vos « paroles ». Nous vous deman­dons donc : d’ex­pri­mer haut et fort votre forte oppo­si­tion à toute déli­bé­ra­tion ou motion de la Métro qui vise­rait à la dis­so­lu­tion d’Ac­tis ; de sou­mettre au conseil d’administration d’Actis du 15 décembre la déli­bé­ra­tion pro­po­sée par les asso­cia­tions de loca­taires qui confir­me­ra le sta­tut public d’Ac­tis et le refus de toute dis­so­lu­tion au pro­fit d’une SEM (la dis­so­lu­tion d’Ac­tis doit obli­ga­toi­re­ment être votée par son conseil d’ad­mi­nis­tra­tion). »

Cette confé­rence de presse a eu lieu le 3 décembre. Le 30 novembre, le groupe des élus com­mu­nistes et appa­ren­tés de la métro­pole – dont Nico­las Beron Per­ez est membre — publiait un com­mu­ni­qué dans lequel on pou­vait notam­ment lire : « loin de la dis­soudre dans une opé­ra­tion finan­cière, la métro­pole doit au contraire confor­ter son office 100 % public pour en faire le pilier d’une poli­tique ambi­tieuse du loge­ment public sur notre ter­ri­toire ». Et les élus com­mu­nistes d’appeler la métro­pole à renon­cer dans ces condi­tions au rachat des actions de Gre­noble habi­tat.

Le 30 novembre éga­le­ment, les com­mu­nistes gre­no­blois fai­saient part de leurs pro­po­si­tions pour une ges­tion publique du loge­ment per­met­tant de répondre aux besoins de loge­ments dans l’agglomération.

Le col­lec­tif appelle à deux ras­sem­ble­ments. Le pre­mier lors de la réunion du conseil d’ad­mi­nis­tra­tion d’Ac­tis le 15 décembre à 16h30 devant le siège d’Ac­tis (25 ave­nue de Constan­tine, 2e étage). Le second aura lieu à l’occasion de la réunion du conseil métro­po­li­tain le 17 décembre à par­tir de 9h30 devant le siège de la Métro­pole (le Forum, 3 rue Mala­koff).

* La CSF 38, La CNL Isère, La CLCV 38, la CGL 38, DAL 38, Indecosa-CGT 38, la CGT 38, RSA 38 et des citoyens

Partager cet article

Avant de partir

Votre soutien compte pour nous

Le Travailleur alpin vit depuis 1928 grâce à l’engagement de ses lecteurs. Aujourd’hui encore, ce média propose un autre regard sur vos espoirs, vos luttes, vos aspirations. Une voix unique dans la presse d’information départementale.

Pour protéger l’indépendance du Travailleur alpin, assurer son développement, vos dons nous sont précieux – nous assurons leur traitement en partenariat avec la fondation l’Humanité en partage.

Merci d’avance.

Faire un don défiscalisé maintenant

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *