La Tronche. Kaarina Kaikkonen déploie ses fripes fastueuses au musée Hébert

Par Jean-Claude Lamarche

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Kaarina Kaikkonen expose ses œuvres au musée Hébert, grâce à une carte blanche dans le cadre de la saison culturelle "Des habits et nous".
Kaarina Kaikkonen s'est installée depuis le 23 janvier au musée Hébert, à La Tronche. L'artiste finlandaise y présente sa somptueuse exposition d'installations textiles, baptisée "Ne m'oublie pas", jusqu'au 1er septembre.

Kaa­ri­na Kaik­ko­nen est une Fin­lan­daise qui s’est décou­verte artiste après des études scien­ti­fiques et de méde­cine. Une décou­verte béné­fique qui a débou­ché sur un exer­cice très ins­pi­ré de récu­pé­ra­tion de vête­ments, chaus­sures, acces­soires ves­ti­men­taire usa­gés, pour créer des œuvres tex­tiles res­sem­blant à des pein­tures, des sculp­tures, des archi­tec­tures, des ins­tal­la­tions éphé­mères…

Le musée Hébert, à La Tronche, est héber­gé dans ce qui était la mai­son de cam­pagne du peintre Ernest Hébert (1817–1908). C’est aujourd’hui un musée dépar­te­men­tal, gra­tuit comme tous les musées dépar­te­men­taux de l’Isère. Kaa­ri­na Kaik­ko­nen y a été invi­tée pour expo­ser quelques-unes de ses œuvres et en ins­tal­ler de nou­velles en s’appropriant et en trans­for­mant les lieux.

« J’ai ten­té d’organiser ma vie ».

Le résul­tat est vrai­ment remar­quable en tous points : créa­tion et inven­tion des formes, sub­ti­li­té et finesse de la cou­leur, occu­pa­tion de l’espace, sug­ges­tion de la pré­sence humaine, de ceux qui ont por­té ces vieux vête­ments… Mais aus­si évo­ca­tion de ves­tiaires aus­si dif­fé­rents que les « salles des pen­dus » des anciens bâti­ments sur les car­reaux des mines de char­bon, ou les mon­ceaux de vête­ments aban­don­nés, devant les chambres à gaz des camps d’extermination, par les juifs dépor­tés. Impos­sible de ne pas y pen­ser.

Même si l’artiste n’a pas pro­duit inten­tion­nel­le­ment cet effet sur le visi­teur, nous avons ici la confir­ma­tion d’un constat que Kaa­ri­na Kaik­ko­nen fait elle-même dans un petit film qui accom­pagne l’exposition : l’œuvre dit tou­jours plus que l’intention pre­mière de son auteur.

« La Reine de la nuit », détail.

Le souvenir chiffonné

Il n’est pas inutile de rap­pe­ler que la Fin­lande a eu une his­toire tour­men­tée, entre la Suède et le Rus­sie, deux puis­sances qui ont acca­pa­ré son ter­ri­toire alter­na­ti­ve­ment au fil des siècles. Ce n’est qu’au troi­sième tiers du XIXe siècle que la Fin­lande a conquis son indé­pen­dance. Elle a com­bat­tu aux côtés des Alle­mands contre les révo­lu­tion­naires russes en 1917–1918, et pen­dant la Seconde Guerre mon­diale comme alliée de Hit­ler, contre l’URSS, jusqu’à la capi­tu­la­tion en sep­tembre 1944. Un pas­sé mou­ve­men­té et contra­dic­toire qui laisse for­cé­ment une forte empreinte dans la men­ta­li­té natio­nale.

Ce « sou­ve­nir » de la dépor­ta­tion des juifs est d’ailleurs ce sur quoi repose la créa­tion simi­laire d’un artiste comme Chris­tian Bol­tans­ki qui a, lui aus­si, ins­tal­lé des accu­mu­la­tions de vieux vête­ments aux­quelles cette expo­si­tion fait écho. Une expo­si­tion qui se situe donc incon­tes­ta­ble­ment dans le temps de la com­mé­mo­ra­tion de la libé­ra­tion des camps d’extermination nazis.

Parcours au parc

Pour conclure, en recom­man­dant chau­de­ment la visite, redi­sons que le lieu est plein de charme, son parc sédui­sant et qu’il ne faut pas man­quer de le par­cou­rir après le tour de l’exposition. Et ce, d’autant que s’y trouvent tou­jours les objets géants de Lilian Bour­geat qui ne man­que­ront pas de réjouir les plus jeunes.

C’est jusqu’au 1er sep­tembre 2025, musée Hébert, che­min Hébert, à La Tronche. Entrez, c’est gra­tuit !

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