Les cinq jeunes Kanaks accompagnés des responsables du Secours populaire lors de leur passage à la Bastille, à Grenoble.

Cinq jeunes Kanaks ont été accueillis en France par le Secours populaire du 4 au 19 août. Ils comptaient parmi les quatre cents jeunes venus du monde entier à l’invitation du Secours pour assister à des épreuves des Jeux olympiques. Ils ont séjourné huit jours en Isère.

Les œufs mollets. Qui aurait dit que cette recette serait celle qui aurait marqué un jeune Kanak, lors de sa découverte de la France ? Découverte que l’on doit au Secours populaire et aux liens tissés avec une association de Nouvelle-Calédonie, Ngere K, que l’on peut traduire par Pensée kanake.

Cinq jeunes Kanaks étaient reçus à Grenoble du 11 au 19 août par la fédération iséroise du Secours. Ce séjour se déroulait dans le cadre d’un tour de France – Mulhouse, Clermont, Blois, Bourges… – organisé à l’occasion des Jeux olympiques. Les jeunes Kanaks, accompagnés par la secrétaire de l’association, Rachel Aucher, ont ainsi pu assister à la petite finale du tournoi de foot féminin – l’Allemagne l’a emporté sur l’Espagne 1 à 0 à Lyon.

Car, pour les JO, le Secours populaire a mis les petits plats dans les grands. « Nous avons permis à plus de quatre mille enfants et adolescents dont quatre cents venus de l’étranger d’assister à des rencontres sportives dans toute la France, se réjouit Nabil Chetouf, secrétaire général de la fédération iséroise, notre ambition de contribuer à l’élargissement des pratiques sportives chez les jeunes, toute l’année ».

Des barrages, toujours

Le voyage de la délégation kanake avait encore bien d’autres objectifs et d’abord celui de permettre à des jeunes d’échapper à leur quotidien. « Il y a toujours des barrages en Kanakie, explique Rachel Aucher, des restrictions de circulation imposées par des loyalistes [ainsi nomme-t-on les partisans du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans l’État français, ndlr] ; ils ont peur de nous et il nous font peur. » Les événements dramatiques de ces derniers mois – onze personnes ont perdu la vie – ne doivent rien au hasard. « Trop de jeunes ont perdu l’espoir ; ce qui me désole, c’est de voir nombre d’entre eux décider d’abandonner leurs études : on leur a raconté une belle histoire, celle de l’ascenseur social, du mérite, des études qui permettraient d’accéder à des responsabilités… la réalité de ce qu’ils voient de leurs aînés est tout autre, les Kanaks diplômés restent au chômage et les emplois qualifiés leur échappent. » Et Rachel Augerd’ajouter : « c’est dans la province Sud, celle de Nouméa, qu’il y a tout ». La province loyaliste, les deux autres étant kanakes.

La difficulté, c’est aussi le choc des cultures. « Pour les Kanaks, et pour les Océaniens plus largement, la vie sociale est basée sur la solidarité, l’entraide, le groupe social que constitue la tribu ; la confrontation avec l’Occident ne va pas de soi, notre mode de vie est écorché, explique Rachel Auger, nous voulons au contraire montrer la richesse de la différence culturelle, construire une Kanakie d’aujourd’hui dans le respect des valeurs qui sont les siennes ; ce n’est pas aux Français que nous nous opposons, mais à un système discriminatoire sans avenir. »

Un système discriminatoire

Richesse de la différence, c’est ce que le Secours populaire fait vivre au quotidien. Des valeurs qui ont conduit le Secours populaire de jeunes étrangers aux JO, grâce aux liens établis avec des associations dans le monde entier, note Corinne Makowski, membre du secrétariat national du Secours populaire. Des liens très concrets, par ensemble avec le soutien apportée à Ngere K pour aider les familles au chômage à la suite des journées de violence en Nouvelle-Calédonie, les familles dont l’un des leur est aujourd’hui emprisonné en France.

Des valeurs de solidarité que le Secours populaire fait vivre sous toutes leurs formes : les bénévoles isérois organisent le 20 août une journée au parc Walabi pour les « oubliés des vacances », la rentrée scolaire s’organise avec une aide au fourniture scolaire et au paiement des licences sportives… sans oublier l’aide alimentaire, à acquisition de vêtements, le père Noël vert…

2025, le 80e anniversaire du Secours populaire français

Et une perspective pour tous les bénévoles, le 80e anniversaire de la création du Secours populaire : ce sera l’année prochaine, en 2025, avec le rassemblement à Paris de 80 000 jeunes venus du monde entier.

Les cinq jeunes Kanaks et leur accompagnatrice rejoindront le 19 août leur pays à l’autre bout du monde. Avec des souvenirs plein les yeux, ces longues journées estivales – eux qui viennent d’une latitude où la variation saisonnière de la durée du jour est plus réduite –, ces montagnes, ces paysages de vignes et de prairie, ces fromages… et puis, et peut-être surtout, ces soirées partagées avec de jeunes Français et ces chants kanaks entonnés d’une même voix.

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