Terre labourée.
Le musée de Grenoble propose une exposition exceptionnelle, jusqu’au 21 juillet. A ne pas manquer.
On peut dire que les Grenoblois et habitants de la région grenobloise, les Isérois et au-delà, ont de la chance : le musée de Grenoble leur offre à voir une exposition intitulée Miró, un brasier de signes, regroupant plus de 130 oeuvres de l’artiste catalan provenant des collections du Musée national d’art moderne-Centre Pompidou pour les plus nombreuses, ainsi que du musée de Grenoble et de la fondation Miró de Barcelone. De quoi découvrir ou redécouvrir l’oeuvre dans la quasi-totalité de ses aspects, en dépassant le premier abord trompeur d’une peinture qui peut sembler « abstraite » et hermétique mais qui est en réalité poétique, humoristique, hiéroglyphique, calligraphique, guillerette (René Char), mirobolante (Robert Desnos) …
Pour Miró, la peinture et la poésie sont une seule et même chose. Il a lui-même écrit des poèmes, connu de près l’avant-garde littéraire, et beaucoup de poètes ont écrit sur lui ou réalisé des recueils avec lui : Pierre Reverdy, Tristan Tzara, Max Jacob, René Char, Eluard, Prévert, Aragon, Queneau, André Frénaud, Michel Leiris, André Breton, Shuzo Takiguchi, Georges Bataille …
André Breton a dit de lui : « Il peut être considéré comme le plus surréaliste de nous tous », mais cette reconnaissance par le « pape » du mouvement n’empêche pas qu’il affirmait lui-même qu’il était surréaliste « tout à fait par hasard », qu’il s’agissait donc là d’une coïncidence non préméditée. Cette constatation exprime ce qui fut sans doute la plus grande qualité de Miró, cette aptitude qui était la sienne de sentir, de voir, de découvrir, d’absorber, de faire sien ce qui dans l’art l’avait précédé, ce qui surgissait sous ses yeux et ce qui allait advenir. Sans jamais relever de la copie, du plagiat, de l’imitation servile, son art provient aussi bien de la peinture pariétale, de la peinture romane catalane, de la grande peinture flamande, de Jérôme Bosch, de Hans Arp, de la calligraphie et des estampes extrême-orientales, de Gaudi, de Fernand Léger, de la céramique rustique et des arts populaires de Catalogne, de Braque, d’André Masson, de Calder, de la peinture moderne états-unienne, des vitraux du Moyen Âge… Un art où le mouvement, le geste sont toujours présents, où la couleur est toujours exaltée. L’art de Miró, c’est aussi un foisonnement de signes qu’il crée pour se constituer un répertoire dans lequel il puisera pour inventer ses créations, comme on dit qu’est inventeur celui qui découvre un trésor, met à jour un vestige archéologique.
Le sourire de l’aile flamboyante.
Il n’est pas nécessaire, pour autant, de procéder au déchiffrage de la peinture de Miró pour l’apprécier et l’aimer. Même si la totalité de son contenu reste étrangère au spectateur, elle n’en est pas moins la matière qui explique le plaisir, le bonheur même d’être face à une œuvre de ce « frère voyant », reflet des métamorphoses qui modifient et refont le monde chaque matin.
L’exposition sera visible jusqu’au 21 juillet 2024, tous les jours sauf le mardi, de 10 h à 18 h 30 et le jeudi jusqu’à 21 h. Plein tarif 14 €. Tarif réduit : 7 € (en particulier pour les Grenoblois, sur présentation d’un justificatif de domicile). Gratuit pour les moins de 26 ans et pour toutes et tous le premier dimanche du mois. L’accès aux collections permanentes du musée est gratuit tous les jours.
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