La disparition de Marie Tranchant, résistante, militante

Par Luc Renaud

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Marie Tranchant.

Marie Tranchant, résistante en Maurienne, militante communiste après guerre, nous a quittés le 8 janvier dernier. Ses obsèques auront lieu le 16 janvier à 10h aux PFI de la Tronche.

La famille de Marie Tran­chant nous a fait par­ve­nir un texte que nous publions ici dans son inté­gra­li­té.
En ce début d’année du 80e anni­ver­saire de la libé­ra­tion du ter­ri­toire natio­nal, c’est avec émo­tion que nous vous fai­sons part du décès à 96 ans de Marie Tran­chant née Geof­froy, ce 8 jan­vier à Echi­rolles (Isère). Marie Tran­chant, Geof­froy à l’époque, est entrée offi­ciel­le­ment dans la résis­tance fran­çaise en mars 1943, quelques semaines avant ses 16 ans, en pro­fi­tant du pré­texte qu’offrait le mariage de sa sœur pour ren­con­trer à la gare de Cham­bé­ry le com­man­dant Planche dit « Bou­vier », chef de l’Armée secrète de Savoie et plus tard des FFI (Forces fran­çaises de l’intérieur) de Savoie. Marie rejoi­gnait ain­si son père et son grand frère dans l’engagement clan­des­tin. Marie Geof­froy Tran­chant devint agent de liai­son des uni­tés de l’Armée secrète (AS) de Basse-Mau­rienne (du Capi­taine Mor­de­ley dit « David ») qui devient en jan­vier 1944 le 2e bataillon AS de Savoie. Elle par­cou­rut les routes de Savoie, de jour comme de nuit, à pied, en vélo ou en car, d’Albertville à Saint-Pierre‑d’Albigny, de Mont­mé­lian à Aigue­belle, etc. Les mes­sages de l’état-major ou à des­ti­na­tion des maquis seront d’abord cachés dans ses chi­gnons sous un filet noir, puis appris par cœur avec le temps.
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La carte de com­bat­tante volon­taire de la résis­tance de Marie Tran­chant.

La Mau­rienne était alors un axe de liai­son vital pour les Alle­mands en pleine bataille d’Italie, ame­nant Marie à devoir régu­liè­re­ment tra­ver­ser les bar­rages de contrôle de l’occupant des ponts sur l’Isère et sur l’Arc. Pré­ve­nue une fois d’un bom­bar­de­ment ciblé des Anglais sur l’un de ces ponts, elle le pas­sa tout de même au der­nier moment afin de s’assurer de la conduite de sa mis­sion. À une autre occa­sion, elle y croi­sa notam­ment une uni­té de l’Afrikakorps ain­si qu’un bataillon de Pan­zer SS se repliant sur la Mau­rienne alors qu’elle fai­sait par­ve­nir les plans d’attaques des maquis des Bauges. Outre les mes­sages, ses mis­sions furent mul­tiples et diverses. Le convoyage de résis­tants tra­qués ou de poten­tiels can­di­dats au maquis en fai­sait par­tie, comme ce jour qui aurait pu être funeste où le ser­gent d’une patrouille alle­mande à vélo s’arrêta quelques ins­tants à son niveau alors qu’elle ame­nait vers le maquis un jeune homme, ce der­nier lui révé­lant seule­ment quelques ins­tants aupa­ra­vant être armé d’un revol­ver.
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En 1997, Marie Tran­chant a reçue des mains de Denise Meu­nier la croix de Com­bat­tant volon­taire de la résis­tance et la médaille de la Résis­tance.

Marie Geof­froy Tran­chant par­ti­ci­pa éga­le­ment à la récep­tion de nom­breux para­chu­tages cru­ciaux dans le mas­sif des Hur­tières, et se char­geait de trans­por­ter l’argent livré dans ces para­chu­tages vers les maquis des Bauges et de Mau­rienne, impor­tants pour leurs sub­sis­tances. D’autres types d’actions ciblées eurent aus­si lieu au gré des ordres et des cir­cons­tances. Puis ce sera la bataille de Mau­rienne avec en par­ti­cu­lier les com­bats du 22 au 26 août 1944. L’agent de liai­son devient alors le lien essen­tiel entre les dif­fé­rentes uni­tés de résis­tants enga­gés, et sera même char­gée par l’état-major d’aller à la ren­contre des forces amé­ri­caines sta­tion­nées à Alle­vard pour leur deman­der un appui d’artillerie. Marie pren­dra direc­te­ment part à des attaques les armes à la main dans les sec­teurs d’Aiguebelle, de Cha­moux et de Mal­ta­verne. Après la libé­ra­tion de la Mau­rienne, Marie Geof­froy Tran­chant sui­vra son uni­té pour prendre part à des com­bats en Taren­taise où les Alle­mands tenaient soli­de­ment la crête de la fron­tière ita­lienne. Son bataillon ne sera dis­sous que fin sep­tembre 1944, c’est ain­si en octobre 1944 qu’elle ren­tra chez elle. Elle avait alors 17 ans et demi.
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Marie Tran­chant et ses cama­rades de l’A­na­cr de Savoie.

Après la guerre, Marie don­ne­ra une conti­nui­té à son enga­ge­ment sous d’autres formes : mili­tante pour la mise en œuvre du CNR (Conseil natio­nal de la résis­tance), res­pon­sable de l’ANACR de Savoie (Asso­cia­tion natio­nale des anciens com­bat­tants de la résis­tance) de 1970 à 1985, mili­tante com­mu­niste, acti­viste pour le Secours popu­laire fran­çais, huma­niste, etc. Elle tra­vailla éga­le­ment long­temps en biblio­thèque, lui per­met­tant de mettre en œuvre la trans­mis­sion de la mémoire des vic­times de cette période et des valeurs paci­fistes qui en découlent, inter­ve­nant notam­ment dans des nom­breuses écoles et col­lèges à par­tir des années 1980. Marie Geof­froy Tran­chant fut déco­rée en 1997 de la croix de Com­bat­tant volon­taire de la résis­tance ain­si que de la médaille de la Résis­tance fran­çaise. Elle nous invite à pré­sent à la mémoire et la pour­suite de ses com­bats.
Les obsèques de Marie Tran­chant auront lieu le mar­di 16 jan­vier 2024 à 10h au centre funé­raire de La Tronche (Isère), sui­vies de l’inhumation au cime­tière de la Croix-de-la-Rochette (Savoie) à 14h30. A ses enfants, Jan­ny, Claire et Rémy, à sa famille et à ses proches, notre jour­nal pré­sente ses sin­cères condo­léances.
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