Isère rhodanienne. Face à la désertification médicale, la CGT veut promouvoir les centres de santé

Par Luc Renaud

/

Image principale
Deux heures d’échanges pour un tour d’horizon sur une proposition et les moyens de la mettre en oeuvre.

Une soirée débat a réuni une centaine de personnes, le 15 avril à Saint-Maurice-l’Exil, à l’invitation de l’union locale CGT de Roussillon Beaurepaire. Christophe Prudhomme et Eric May ont pu exposer l’intérêt des centres de santé comme réponse à un besoin, celui de l’accès à la santé pour tous, dans un contexte de crise majeure de la médecine libérale et hospitalière.

« Trouver un cardiologue en urgence, c’est maintenant l’obligation de monter à Lyon et de payer des dépassements d’honoraire exorbitants. » Constat livré par Antony Martinez, secrétaire de l’union locale CGT de Roussillon-Beaurepaire. Il intervenait en conclusion du débat organisé par le syndicat le 15 avril à Saint-Maurice-l’Exil. Car la préoccupation de l’accès à la santé dans ce qu’il est convenu d’appeler un désert médical est devenue majeure pour trop d’habitants de l’Isère rhodanienne.

Christophe-Prudhomme/

Christophe Prudhomme, médecin au SAMU 93, porte-parole des médecins urgentistes et hospitaliers de France,
et responsable national de la CGT santé.

La CGT propose une solution : la création de centres de santé. Car la désertification médicale ne va pas se résoudre d’elle-même. Christophe Prudhomme, médecin au SAMU 93, porte-parole des médecins urgentistes et hospitaliers de France et responsable de la CGT santé, en donnait la raison : depuis des décennies, la France ne forme pas assez de médecins. Jusqu’à la caricature : « à Orléans, il a fallu que l’université ouvre une antenne de l’université de médecine de Zagreb pour qu’une filière médicale puisse être ouverte dans cette fac ». Et les récentes annonces d’assouplissement de la limitation du nombre de places en médecine nous ramènent… au chiffre atteint en 1975. Sans compter l’hémorragie des personnels soignants qui jettent l’éponge, épuisés par la dégradation de leurs conditions de travail.

Face à cette situation, les initiatives locales se multiplient. Denis Chambon, maire communiste de Saint-Alban-sur-Rhône, en donnait une illustration avec la création d’une maison de santé dans sa commune. Un effort concret pour lutter contre la désertification médicale.

Salle/

Un débat suivi par une centaine de personnes dans la grande salle Aragon de Saint-Maurice-l’Exil.

« Tout repose sur le volontariat local », notait Christophe Prudhomme en saluant l’engagement des élus et militants qui font aboutir des projets. Un volontariat qui a cependant ses limites : « le système libéral ne s’auto-organise pas tout comme le marché ne s’auto-régule pas », disait-il. Et les maisons de santé restent soumises au bon vouloir des praticiens libéraux.

D’où la proposition de constituer des réseaux de centres de santé. Centres de santé dont Eric May, médecin généraliste, directeur du centre municipal de santé de Malakoff, et vice-président de l’Union des médecins de centres de santé, donnait un aperçu.

Eric

Eric May, médecin généraliste, directeur du centre municipal de santé de Malakoff,
et vice-président de l’Union des médecins de centres de santé.

Dans ces centres, les personnels – médecins, secrétaires, infirmiers, travailleurs sociaux éventuellement… – sont salariés. C’est l’une des différences avec les maisons de santé ou pôles médicaux dans lesquels des collectivités publiques installent des cabinets libéraux. Seconde différence – essentielle aux yeux d’Eric May –, l’élaboration d’un projet de santé publique pour que la constitution et le fonctionnement du centre correspondent aux besoins d’un territoire et de ses populations. Concrètement, le centre est géré par une collectivité – ce peut être une commune, plus souvent une intercommunalité, voire un département ou une région – qui emploie les salariés d’un ou plusieurs centres de santé. Cette collectivité reçoit en contrepartie le paiement par la Sécurité sociale des actes médicaux réalisés ainsi qu’une enveloppe pour régler les frais de structure et notamment le travail de coordination pluridisciplinaire – l’un des atouts des centres de santé.

Denis-Chambon/

Denis Chambon, maire de Saint-Alban-sur-Rhône.

« L’expérience montre que la gestion des centres de santé parvient à l’équilibre quelques mois après leur ouverture », témoigne Eric May qui s’appuie sur l’expérience d’une récente ouverture à Bergerac. Ce statut comporte des obligations comme l’interdiction des dépassements d’honoraire ou l’implication dans les services de garde du territoire concerné. Et correspond aux aspirations de jeunes médecins qui souhaitent se consacrer à la médecine plutôt qu’à la gestion d’un cabinet et veulent pouvoir s’appuyer sur une équipe, ce qui permet l’échange, la possibilité de jours de congé et celle d’une vie personnelle.

Nicolas-Benoit/

Nicolas Benoit, secrétaire de l’union départementale CGT de l’Isère.

De quoi ouvrir des perspectives à l’engagement pour l’accès à la santé pour tous. Nicolas Benoit, secrétaire de l’union départementale CGT de l’Isère, relevait ainsi l’intérêt de l’expérience du département de la Saône-et-Loire. Le conseil départemental y a créé un réseau de trente-cinq centres de santé qui emploie soixante-dix médecins. Exemple à suivre en Isère ? Eric Hours, conseiller régional communiste, soulignait combien l’accès à la santé comme à l’ensemble des services publics est aujourd’hui décisive en terme d’aménagement du territoire.

Anthony-Martinez/

Anthony Martinez, secrétaire de l’union locale CGT Roussillon-Beaurepaire.

En Isère rhodanienne, la CGT est décidée à mettre sur la place publique la proposition d’un maillage du territoire par des centres de santé. Anthony Martinez, secrétaire de l’union locale CGT, s’adressait ainsi directement aux élus de la communauté de communes Entre Bièvre et Rhône : « nous ne laisserons pas cette soirée tomber aux oubliettes et je vous propose une rencontre avant l’été pour que nous puissions échanger sur l’avancée de votre réflexion sur la création de centres de santé et sur une politique de santé locale plus audacieuse, ambitieuse et solidaire qui réponde aux besoins de tous ».

Eric-Hours/

Eric Hours, conseiller régional PCF.

Partager cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

2 Commentaires