La grève le jour du bac, pourquoi

Par Luc Renaud

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Les syndicats de l’Education nationale sont mobilisés pour défendre l’école de la République. Ils appellent à la grève lundi 17 juin, premier jour des épreuves du bac.

« Ce sont des bobards dis­til­lés par un ven­ti­la­teur d’an­goisse ». C’est là l’un des com­men­taires dont le ministre Blan­quer affuble les parents, ensei­gnants et élèves qui dénoncent le conte­nu de ses pro­jets.  » Pro­jets que nous appre­nons par les édi­teurs de livres sco­laires avant même qu’ils soient enté­ri­nés par décrets », sou­ligne Alexandre Majews­ki, secré­taire du SNES-FSU.

Alexandre Majews­ki, secré­taire du SNEP-FSU

Ce sera donc la grève. Et la grève le pre­mier jour du dérou­le­ment des épreuves du bac, le 17 juin. « Il ne s’a­git en aucune façon de blo­quer les épreuves, sou­ligne Alexandre Majews­ki, mais sim­ple­ment d’ob­te­nir l’ou­ver­ture de négo­cia­tions que nous récla­mons depuis six mois sans résul­tat : aujourd’­hui, la balle est dans le camp du ministre ». Et c’est bien pour­quoi la grève concerne tout le second degré, du col­lège au lycée éga­le­ment impac­tés par les choix gou­ver­ne­men­taux.

Selon que vous serez banlieusards ou citadins

Ce que refusent les ensei­gnants (sou­te­nus par les parents de la FCPE ou encore les lycéens de l’UNL), c’est l’é­mer­gence d’une école de la ségré­ga­tion sociale. Pre­nons l’exemple des ensei­gne­ments dits de spé­cia­li­tés — des heures sup­plé­men­taires que l’é­lève choi­sit pour tra­vailler une matière de façon plus appro­fon­die. « A Cham­pol­lion, en plein centre de Gre­noble, les lycéens auront le choix entre onze spé­cia­li­tés pos­sibles (langues, his­toire, phi­lo, maths…) contre sept en moyenne, et par­fois quatre », constate Béa­trice Vincent, de FO ensei­gne­ment. A Bour­goin-Jailleu ou Voi­ron, les lycéens devront chan­ger d’é­ta­blis­se­ment s’ils veulent suivre un ensei­gne­ment non dis­pen­sé dans le leur.

L’un des articles de la loi Blan­quer impose un « devoir de réserve aux ensei­gnants ». Une atteinte à la liber­té d’ex­pres­sion que dénonce Sud édu­ca­tion par le port d’un masque sym­bo­lique.

« C’est une véri­table dis­cri­mi­na­tion ter­ri­to­riale, explique Ben­ja­min Mois­set (Sud Edu­ca­tion), plus on s’é­loigne des centres ville, plus l’ac­cès à la for­ma­tion est res­treint ». Une sélec­tion sociale, ajoute Alexandre Majews­ki : « pour s’en sor­tir dans une école de plus en plus frag­men­tée, avec des ensei­gne­ments qui sont de moins en moins iden­tiques au niveau natio­nal, avec l’o­bli­ga­tion de la construc­tion dès la seconde d’un bon dos­sier Par­cour­sup, ce sont les parents qui maî­trisent les codes de l’é­du­ca­tion, dans les caté­go­ries sociales dites supé­rieures, qui peuvent aider leurs enfants à pas­ser entre les mailles du filet ; plus ques­tion d’as­cen­seur social ».

Ana­lyses que par­tage le col­lec­tif de défense du ser­vice public de l’é­du­ca­tion, « consti­tué pour regrou­per des parents, des ensei­gnants, des élèves… que toute la stra­té­gie gou­ver­ne­men­tale consiste à divi­ser », explique Xavier Lecoq, l’un de ses ani­ma­teurs.

Augmentation du temps de travail, obligatoire et sous-payée

Ces dis­po­si­tions s’accompagnent de mesures qui touchent les ensei­gnants et leur pou­voir d’a­chat. Une des illus­tra­tions de ce pro­ces­sus, c’est l’heure sup­plé­men­taire impo­sée. Par­mi les mesures prises, l’o­bli­ga­tion pour les ensei­gnants d’ef­fec­tuer deux heures sup­plé­men­taires lorsque la direc­tion de l’é­ta­blis­se­ment le leur demande. Deux heures de cours, c’est-à-dire quatre à cinq heures de tra­vail heb­do­ma­daires en plus. De 35 à 40 heures, en somme. Or ces heures sup­plé­men­taires sont payées au tarif « quatre ans d’an­cien­ne­té » : elle est payée à un tarif infé­rieur à celui de l’heure de tra­vail de la plu­part des profs. « En fait, impo­ser des heures sup­plé­men­taires pour ne pas créer de postes revient à payer moins chère des heures de prof », explique Corinne Baf­fert, secré­taire aca­dé­mique du SNES. L’un des aspects des déci­sions gou­ver­ne­men­tales qui en met au jour les moti­va­tions : faire des éco­no­mies sur la for­ma­tion des jeunes géné­ra­tions.

Alexandre Majews­ki (SNEP-FSU) et Jean-Fran­çois Michel (CGT édu­ca­tion).

Ségré­ga­tion sociale et aus­té­ri­té bud­gé­taire tou­jours lorsque « les élèves de la voie pro­fes­sion­nelle, quelles que soient leurs qua­li­té, n’ont plus accès à l’en­sei­gne­ment supé­rieur », comme le sou­ligne Jean-Fran­çois Michel, de la CGT éduc’ac­tion.

17 juin : 7 heures à Champollion, midi devant le rectorat

Lun­di 17 juin, un ras­sem­ble­ment est pré­vu à 7 heures devant le lycée Cham­pol­lion à Gre­noble et une assem­blée géné­rale des gré­viste se dérou­le­ra à midi devant le rec­to­rat, place Bir-Hakeim à Gre­noble.

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