La Tronche. Kaarina Kaikkonen déploie ses fripes fastueuses au musée Hébert
Par Jean-Claude Lamarche
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Kaarina Kaikkonen est une Finlandaise qui s’est découverte artiste après des études scientifiques et de médecine. Une découverte bénéfique qui a débouché sur un exercice très inspiré de récupération de vêtements, chaussures, accessoires vestimentaire usagés, pour créer des œuvres textiles ressemblant à des peintures, des sculptures, des architectures, des installations éphémères…
Le musée Hébert, à La Tronche, est hébergé dans ce qui était la maison de campagne du peintre Ernest Hébert (1817–1908). C’est aujourd’hui un musée départemental, gratuit comme tous les musées départementaux de l’Isère. Kaarina Kaikkonen y a été invitée pour exposer quelques-unes de ses œuvres et en installer de nouvelles en s’appropriant et en transformant les lieux.

Le résultat est vraiment remarquable en tous points : création et invention des formes, subtilité et finesse de la couleur, occupation de l’espace, suggestion de la présence humaine, de ceux qui ont porté ces vieux vêtements… Mais aussi évocation de vestiaires aussi différents que les « salles des pendus » des anciens bâtiments sur les carreaux des mines de charbon, ou les monceaux de vêtements abandonnés, devant les chambres à gaz des camps d’extermination, par les juifs déportés. Impossible de ne pas y penser.
Même si l’artiste n’a pas produit intentionnellement cet effet sur le visiteur, nous avons ici la confirmation d’un constat que Kaarina Kaikkonen fait elle-même dans un petit film qui accompagne l’exposition : l’œuvre dit toujours plus que l’intention première de son auteur.

Le souvenir chiffonné
Il n’est pas inutile de rappeler que la Finlande a eu une histoire tourmentée, entre la Suède et le Russie, deux puissances qui ont accaparé son territoire alternativement au fil des siècles. Ce n’est qu’au troisième tiers du XIXe siècle que la Finlande a conquis son indépendance. Elle a combattu aux côtés des Allemands contre les révolutionnaires russes en 1917–1918, et pendant la Seconde Guerre mondiale comme alliée de Hitler, contre l’URSS, jusqu’à la capitulation en septembre 1944. Un passé mouvementé et contradictoire qui laisse forcément une forte empreinte dans la mentalité nationale.

Ce « souvenir » de la déportation des juifs est d’ailleurs ce sur quoi repose la création similaire d’un artiste comme Christian Boltanski qui a, lui aussi, installé des accumulations de vieux vêtements auxquelles cette exposition fait écho. Une exposition qui se situe donc incontestablement dans le temps de la commémoration de la libération des camps d’extermination nazis.
Parcours au parc
Pour conclure, en recommandant chaudement la visite, redisons que le lieu est plein de charme, son parc séduisant et qu’il ne faut pas manquer de le parcourir après le tour de l’exposition. Et ce, d’autant que s’y trouvent toujours les objets géants de Lilian Bourgeat qui ne manqueront pas de réjouir les plus jeunes.

C’est jusqu’au 1er septembre 2025, musée Hébert, chemin Hébert, à La Tronche. Entrez, c’est gratuit !