La Rampe-Echirolles – Last Work. Une œuvre puissante
Par Régine Hausermann
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Le rideau s’ouvre sur une femme en robe bleue, de profil, en fond de scène. Elle court sans avancer, sur un tapis en mouvement. Elle courra pendant l’heure que dure le spectacle, sans interaction avec les danseur·ses qui entrent et sortent, chacun·e conservant son individualité mais élément du groupe. Selon la technique « gaga » prônée par Ohad Naharin, priorité à la liberté d’expression. Le corps est tantôt pesant, jouant avec la densité corporelle. Tantôt il se contorsionne, ondule, accélère, ralentit, sans souci de faire beau. L’impression d’ensemble est celle d’une énergie explosive, d’une danse très contrastée, dans des costumes sobres aux couleurs douces.
La dernière séquence surprend. Un homme astique une mitraillette tandis que les autres danseur·ses sont relié·es les un·es aux autres par un des leurs qui les relie à distance au moyen d’un ruban adhésif brun. Lui-même finit par s’attacher avec les autres. Irruption de la violence mortifère qui interrompt tout mouvement et conduit à la mort.
Last Work peut alors se lire comme la pièce ultime, celle à laquelle on ne survivra pas, qui rend compte de la tragédie des hommes et des femmes de pays en guerre dont l’énergie est paralysée, dont la liberté est entravée, dont la vie est sacrifiée. Mais l’énergie vitale indestructible, symbolisée par la coureuse de fond en robe bleue et la puissance de la danse fait de Last Work un manifeste en faveur de la paix, de la vie. Malgré tout !
Ohad Naharin est Israélien, né en 1952 au kibboutz de Mizra. Après des études d’architecture interrompues par la guerre du Kippour en 1973, il se dirige vers la danse. À Haïfa d’abord, puis à la Batsheva Dance Company de Tel Aviv. Il travaille ensuite avec Martha Graham à New-York, avec Béjart à Lausanne… En 1990, Ohad Naharin retourne en Israël et prend la direction de Batsheva Dance Company.