La Rampe — Échirolles – Le Ballet de Lorraine. Éblouissant !
Par Régine Hausermann
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Static Shot, entre défilé de mode et collage cinématographique
Dans Static Shot, le mouvement ne s’arrête jamais. Entré·es sur scène, moitié à cour et moitié à jardin, les danseurs et danseuses saisissent par la variété et l’originalité de leurs costumes — signés Christelle Kocher — et l’ordonnancement de leurs évolutions.

Les deux groupes se croisent dans deux diagonales impeccables avant de longer les côtés et de repartir dans les diagonales au rythme d’une musique électro de la DJ Chloé Thévenin et du compositeur Pete Harden. Ça pulse mais sur un rythme assez lent.
Par moments, danseurs et danseuses sont aligné·es ou forment une ronde colorée, faces tournées vers le public. Toujours en interaction, s’attirant, se repoussant, s’entremêlant. Ensemble toujours.
Les vingt minutes de ce « shot » constituent un seul plan fixe créé à partir de données filmographiques éclectiques. Le programme crédite Miracle en Alabama d’Arthur Penn, Possession de Zulawski, Chorus Line de Bob Fosse, Série noire d’Alain Corneau, Beau travail de Claire Denis, Homecoming de Beyoncé, et d’autres encore. C’est à partir de ces matériaux que Maud Le Pladec a réalisé un montage, qui donne les grandes lignes dramaturgiques du ballet. Difficile d’identifier les sources. Peu importe, on se laisse emporter par l’énergie et la cohésion du groupe.
A Folia, rencontre entre danse d’antan et d’aujourd’hui

D’emblée, on est frappé par les ressemblances entre les deux ballets : les couleurs des costumes qui semblent sortir du même atelier, la présence constante du groupe de vingt danseur·ses et leur énergie. Mais l’inspiration est bien différente. Le Portugais Marco da Silva Ferreira s’appuie sur La Folia, une danse portugaise d’origine populaire, née au XVIe siècle, où toutes les excentricités étaient permises. Bergers et bergères dansaient avec vivacité dans une atmosphère de transe collective, en portant sur leurs épaules des hommes habillés en femmes. Désir de transgression, de folie, lors de fêtes liées à la fécondité. La Folia ancienne se mue en une série de défis entre les participant·es, une sorte de battle, applaudie par celles et ceux qui les encerclent avant de prendre le relais.
La danse s’affirme comme exutoire et force de rassemblement. L’envie nous prend d’entrer dans le mouvement sur la musique de Luis Pestana, inspirée du compositeur baroque Arcangelo Corelli, dont la Sonate pour violon et basse continue en ré mineur nous ravit. Envie de danser ensemble, de souffler ensemble, pour lutter.

Le ballet Carcass, que nous avons applaudi en avril 2024 à la MC2, était plus explicitement politique. Sur le tapis blanc redressé, devenant mur de scène, s’inscrivait la traduction de paroles en français et en anglais où il était question de travailleuses et de travailleurs, d’exploitation, de bourgeoisie possédante. Marco da Silva Ferreira danse et fait danser pour « rompre avec un passé autoritaire, totalitaire et paternaliste ».