Rives. La sécurité publique passe par l’efficacité des politiques de l’État

Par Luc Renaud

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Jérémie Giono, secrétaire départemental du PCF Isère ; Fabrice Morand, ancien officier de police et consultant auprès des collectivités locales ; Anthony Caillé, secrétaire général de la CGT-police ; et Jérôme Barbieri, élu d’opposition à Rives.

Le PCF organisait le 22 mars un débat sur l’efficacité de l’action pour la sécurité publique. Qui passe par le respect des missions de la police judiciaire et par des moyens pour la prévention et l’action de proximité. Et certainement pas par les caméras et des polices municipales de substitution à l’État.

« Nous sommes allés por­ter plainte à la suite d’un cam­brio­lage, à Fon­taine. Le poli­cier qui nous a reçu nous a expli­qué que le maire com­mu­niste de la ville refu­sait de mettre des camé­ras et que ça fac­to­ri­sait les cam­brio­lages. Ça fait trois ans que le maire n’est pas com­mu­niste et que la ville est pas­sée à droite. » Témoi­gnage enten­du le 22 mars der­nier à Rives, lors d’une ren­contre débat orga­ni­sée par la sec­tion com­mu­niste locale. Outre le défaut d’information — grave — d’un fonc­tion­naire de police, l’anecdote témoigne d’un mythe et d’un dis­cours offi­ciel : pour vivre tran­quille, pas besoin de moyens humains, la camé­ra peut tout.

Antho­ny Caillé, secré­taire géné­ral du syn­di­cat CGT police, le démon­tait d’un constat : « le taux d’élucidation grâce aux camé­ras est proche de zéro ». Ce qui pose une ques­tion : la lutte contre l’insécurité, est-ce mon­trer au public que l’on fait quelque chose, ou est-ce empê­cher la com­mis­sion d’actes délic­tueux ?

Stups, cher­cher les grammes ou les tonnes ?

L’efficacité en la matière, c’est déjà la mise en cause des auteurs. Par exemple dans le domaine du tra­fic de drogue. « Pour cela, il faut des enquê­teurs qui puissent tra­vailler sur le temps long pour remon­ter et déman­te­ler des filières », explique Antho­ny Caillé, qui a tra­vaillé aux stups au cours de sa car­rière. Avec des sai­sies de plu­sieurs cen­taines de kilos à plu­sieurs tonnes, à com­pa­rer avec les dizaines de grammes dont les actuelles opé­ra­tions « places nettes » se pré­valent aujourd’hui. « Les récentes réformes de la police judi­ciaire limitent les moyens d’enquête », note Antho­ny Caillé. D’où la reven­di­ca­tion de la CGT de rat­ta­cher une police judi­ciaire au minis­tère de la Jus­tice pour en accroître l’efficacité. La demande éga­le­ment de per­mettre aux doua­niers de faire leur métier : « le contrôle des opé­ra­tions com­mer­ciales, alors qu’on leur demande de se consa­crer presque exclu­si­ve­ment au contrôle des étran­gers ».

Des moyens pour assé­cher les tra­fics, des moyens pour la sanc­tion, qui vont de pair avec une néces­saire pré­ven­tion. « La poli­tique du chiffre consiste à mul­ti­plier les arres­ta­tions dans la petite délin­quance ; ce n’est pas effi­cace, ça non plus », constate Fabrice Morand, ancien offi­cier de police et aujourd’hui for­ma­teur au Centre natio­nal de la fonc­tion publique ter­ri­to­riale. Les pri­sons n’ont jamais été aus­si sur­peu­plées et tous les obser­va­teurs s’accordent à recon­naître qu’elles sont des écoles de la réci­dive, des lieux de pas­sage de la petite à la grande délin­quance. D’autant que rare sont les col­lec­ti­vi­tés à mettre en œuvre des pro­grammes de réin­ser­tion, pour lut­ter contre les réci­dives, jus­te­ment.

La proxi­mi­té des ser­vices publics, dont la police

Face à cette réa­li­té, tous les inter­ve­nants s’accordaient à sou­li­gner que la sécu­ri­té publique est un pro­blème de socié­té qui concerne glo­ba­le­ment le lien social dans le vil­lage, le quar­tier, la rue… Tout comme l’Education natio­nale, les asso­cia­tions qui font vivre l’éducation popu­laire, les col­lec­ti­vi­tés locales, la poli­tique de la ville, l’accès à la san­té et plus géné­ra­le­ment aux ser­vices publics de proxi­mi­té…

Ser­vices publics de proxi­mi­té dont font par­tie les com­mis­sa­riats et gen­dar­me­ries. « L’État ferme les com­mis­sa­riats et les gen­dar­me­rie et les pré­fets sont char­gés d’inciter les élus à déve­lop­per les polices muni­ci­pales », dénonce Fabrice Morand. Tan­dis qu’au déve­lop­pe­ment des polices muni­ci­pales cor­res­pond le recul des polices natio­nales.

Or, leurs mis­sions ne se recoupent pas, la lutte contre la délin­quance ne relève pas des polices muni­ci­pales qui n’en ont pas les outils, les com­pé­tence, la for­ma­tion. Tan­dis que l’éloignement du ter­rain des fonc­tion­naires de police se tra­duit, aus­si, par l’assèchement du ren­sei­gne­ment indis­pen­sable à l’efficacité du tra­vail des enquê­teurs.

Des argu­ments contre les thèses racistes

Le débat s’engageait à ce sujet avec Laurent Lavost, pre­mier adjoint de la muni­ci­pa­li­té de droite de Rives, char­gé de la sécu­ri­té publique, échange qui met­tait au jour l’écart des points de vue.

Une soi­rée de réflexion qui nour­rit d’arguments un sujet que la sphère média­tique domi­nante limite trop sou­vent à des thèses racistes et sécu­ri­taires.

Une vidéo à retrouver sur cette soirée

La soi­rée a été fil­mée. On en trou­ve­ra ici la vidéo.

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