L’Oiseau de feu. © Olivier Houeix
Jeudi 30 novembre 2023 – Salle pleine encore pour une soirée consacrée à deux chefs d’œuvre qui inspirent les chorégraphes depuis plus d’un siècle : L’Oiseau de feu et le Sacre du printemps. Thierry Malandain et Martin Harriague lancent la compagnie dans une danse d’une énergie folle, portée par la puissante musique de Stravinsky.
Thierry Malandain propose sa propre version de l’Oiseau de feu qui lança la carrière de Stravinski, jeune compositeur de 27 ans, en 1910.
Fort du succès de sa compagnie des ballets russes à Paris dès sa première saison, Serge Diaghilev cherche un nouveau sujet. Ce sera l’Oiseau de feu, oiseau légendaire du folklore russo-ukrainien : « Ivan Tsarévitch voit un jour un oiseau merveilleux, tout d’or et de flammes ; il le poursuit sans pouvoir s’en emparer, et ne réussit qu’à lui arracher une de ses plumes scintillantes. »
Nombreux sont les chorégraphes qui ont signé leur propre vision du célèbre ballet : Béjart en 1970, Preljocaj en 1995, Gallotta en 2013-14 … Thierry Malandain – qui dansa pour Béjart -en propose une lecture épurée, élégante, en suivant la suite de concert de 1945, choisie par George Balanchine.
Géométrie des lignes, refus du superflu. On pense au constructivisme né au début du 20ème s. en Russie. Vêtu·es de longues robes fluides noires, beige, jaunes, blanches…les 22 danseurs et danseuses exaltent la beauté des mouvements collectifs. Mention spéciale à Jorge Gallardo, créateur des costumes.
L’Oiseau de feu.
© Olivier Houeix
Le jeune chorégraphe Martin Harriague s’empare du Sacre du Printemps
Stravinsky eut l’idée du Sacre alors qu’il travaillait encore sur L’Oiseau de feu. « J’entrevis dans mon imagination le spectacle d’un grand rite sacral païen : les vieux sages, assis en cercle, et observant la danse à la mort d’une jeune fille, qu’ils sacrifient pour leur rendre propice le dieu du printemps. » Le projet séduit Diaghilev. La première a lieu le 29 mai 1913 au théâtre des Champs Elysées à Paris avec une chorégraphie de Nijinski. Scandale ! On se bat presque dans la salle. Certain ose parler de « massacre du printemps ! » Le public n’était pas prêt à recevoir une œuvre fondée sur le rythme et l’énergie. Stravinsky tombe malade et passera six semaines dans une maison de santé. Il faudra une petite année au public – en avril 1914 – pour faire un triomphe au compositeur porté à bout de bras dans les rues de Paris après une audition en concert.
Jeudi et vendredi soir, à La Rampe, le public s’est laissé emporter par le martèlement rythmique caractéristique de l’œuvre, son énergie, sa puissance. Trente minutes de communion avec le groupe sur scène qui glorifie la nature dans un grand mouvement d’allégresse. Mais une inquiétude qui grandit lorsque le sacrifice de la jeune fille se fait de plus en plus évident, pour ranimer la flamme de l’ancêtre. Le ballet reflète un rituel païen, primitif, certes. Mais une jeune fille est sacrifiée !
Le Sacre du printemps.
© Olivier Houeix
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