Amandine Demore lors d’une prise de parole dans le quartier du Village II, à Échirolles.

L’information n’était pas une surprise, le passage de relai se préparait depuis quelques temps. A la suite de Renzo Sulli, Amandine Demore sera élue maire d’Échirolles lors d’un conseil municipal extraordinaire le samedi 28 octobre.

Renzo Sulli fait figure de monument du paysage politique isérois. Et pour cause : celui qu’on surnomme aujourd’hui « le vieux sage » dans les couloirs de la Métro prend la suite de Gilbert Biessy en 1993 en tant que conseiller général d’Echirolles, puis en 1999 comme premier magistrat de la commune. Il est réélu maire en 2001, 2008, 2014 et 2020.

Fils d’immigrés italiens, cadre territorial spécialiste de l’aménagement, Renzo Sulli symbolise une époque : celle des maires bâtisseurs, qui donneront aux communes de la « ceinture rouge » leur visage actuel. Une époque où des quartiers entiers sortent de terre « en plein champ », où il faut penser les interconnexions et les lieux de centralités. Une des plus grandes réussites échirolloise restera le centre-ville, autour de la place des Cinq-fontaines, une réalisation prise en exemple pour bien des communes de périphéries urbaines.

Aux côtés de ses homologues de Fontaine, Saint-Martin-d’Hères et Pont-de-Claix, Renzo Sulli sera aussi un des pionniers de l’intercommunalité. Alors que les communistes critiquent dès l’origine les dynamiques de recentralisation qui éloignent les lieux de décisions politiques des citoyens, cette critique se traduit souvent par un désintérêt pour les coopérations intercommunales. En Isère les élus du PCF tracent une voie originale : celle d’une intercommunalité choisie, respectueuse des communes. Un héritage qui marque aujourd’hui la cuvette grenobloise.

Un passage de témoin historique

Après 24 ans de mandat de maire, Renzo Sulli aspirait à passer la main. C’est sa plus grande réussite de ces dernières années : avoir su créer les conditions pour qu’émerge une nouvelle génération d’élus communistes, dynamiques et en phase avec les problématiques d’aujourd’hui.
Amandine Demore d’abord. Première adjointe depuis 2020, elle est pour la première fois candidate en 2008, puis devient adjointe à la vie associative de 2014 à 2020. Aujourd’hui en charge des finances et de la tranquillité publique, elle a acquis une maîtrise des dossiers et une autorité qui la positionne comme candidate naturelle. Elle deviendra ainsi la première femme à exercer le mandat de maire d’Échirolles.

Si l’on devait mentionner deux faits marquants de son ascension, il faudrait commencer par évoquer son élection en 2021 comme conseillère départementale de l’Isère. Dans un contexte difficile de division de la gauche, de montée en puissance de la droite dopée par la locomotive Laurent Wauquiez, et de persistance de la pandémie de Covid, c’est la première élection où elle se présente sur son nom devant les électeurs échirollois. Elle arrive en tête du premier tour et remporte le scrutin au second.

On évoquera également sa gestion exemplaire des émeutes de juillet dernier, le lien qu’elle aura su tisser avec les acteurs associatifs des différents quartiers et sa pratique du dialogue avec les habitants, qui auront ainsi permis d’éviter le pire dans une commune qui aurait autrement pu s’embraser. Nous y consacrions un dossier,  à retrouver ici.

Porteuse d’une vision unitaire de la politique, elle se porte volontaire en mai 2022 pour intégrer le « Parlement de la NUPES », instance nationale qui était alors censé coordonner les actions de la coalition de gauche crée à l’occasion des élections législatives. Une instance malheureusement mise en sommeil par la direction de la France Insoumise…

Amandine Demore incarne cette nouvelle génération d’élus progressistes, qui attache une importance particulière aux sujets liés à l’environnement et à la démocratie participative. Sur ce dernier thème, elle aura notamment impulsé l’émergence de la « Fabrique citoyenne », vaste ensemble de dispositifs de consultations et de co-construction, afin de favoriser l’implication des habitants à tous les niveaux.

Une nouvelle génération

Autour d’Amandine Demore, c’est toute une génération qui monte progressivement en responsabilité.
On pense à Pierre Labriet, adjoint aux sports, à la jeunesse et aux politiques de la ville, ainsi que conseiller délégué à la Métropole en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche. Quarantenaire, il s’est fait connaître lors de la préparation des élections législatives. Faisant preuve d’un sens des responsabilités trop rare de nos jours en retirant sa candidature après six mois de campagne qui l’avait pourtant installé comme personnalité incontournable sur la seconde circonscription, il permet ainsi à la candidature NUPES de battre le député sortant LREM.

Plus jeunes, Aurélien Farge et Maxime Favier sont tous deux issus des mobilisations lycéennes des années 2000. Le premier, ancien secrétaire départemental du Mouvement des jeunes communistes, a cofondé une agence de communication visuelle après un passage au cabinet du maire de Saint-Martin-d’Hères, David Queiros. Il a aujourd’hui en charge les dossiers relatifs au numérique. Maxime Favier est quant à lui a eu des responsabilités à l’association « Contre-Courant » de Science Po Grenoble, militant aux côtés de jeunes des autres forces de gauche. Jeune professeur en lycée professionnel, il a actuellement en charge des projets jeunesse auprès de Pierre Labriet.

Une nouvelle page de l’histoire d’Echirolles

Alors que les questions liées au passage de relai – envisagés ou supposés – de Renzo Sulli auront été le principal moteur des dissidences et oppositions municipales depuis au moins 2014, c’est une page qui se tourne. Laurent Berthet (divers gauche) en 2014 comme Alban Rosa (LFI) en 2020 avaient fait de la longévité au pouvoir de Renzo Sulli un argument de campagne, prônant tous deux le « renouveau »… un renouveau dans la continuité qu’incarne désormais Amandine Demore.

Au moment où la gauche métropolitaine est à la recherche d’un nouveau souffle et que les élus communistes y sont les artisans de la recherche d’une unité dans l’action au service des populations, l’émergence d’une nouvelle génération d’élus communistes apparaît pour beaucoup comme l’occasion de retrouver le sens de l’intérêt général.

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