© Julia Gat, fille du chorégraphe

Vendredi 12 mai 2023 – Le programme annonçait une « comédie musicale contemporaine » sur des tubes de Tears for fears. Le public a reçu un choc esthétique devant tant de beauté plastique. Treize danseur·ses éblouissant·es, en costumes chatoyants, pour un train d’amour qu’on voudrait ne plus quitter. Magique !

Des grappes de danseurs et danseuses qui font et se défont

Cinq femmes, huit hommes entrent sur scène par des ouvertures étroites pratiquées dans le mur de fond de scène. On les avait vu passer derrière ces fentes verticales, silhouettes estompées par des volutes de fumée. Se faisant désirer. Enfin ils et elles entrent sur le plateau, seul·es ou par groupes de deux, trois… Leurs costumes aux larges plis éblouissent.  

Pas de symétrie dans cette danse-là mais des figures évolutives. Au début, peu de contact entre les danseur·ses puis, au cours du train d’amour, les contacts s’esquissent et s’intensifient, entre hommes et femmes, entre femmes, entre hommes.

Thomas Bradley – danseur et concepteur des costumes – nous donne des pistes sur la méthode de travail qui conduit à tant de fantaisie. « Nous travaillons directement avec Emanuel. Il n’y pas d’intermédiaire. Notre grande force, c’est d’être soudé. Après nous avoir donné quelques recommandations, il nous laisse nous exprimer. C’est un vrai travail de plateau et d’improvisation. C’est très rafraîchissant ce sentiment d’autonomie. De son regard de chef d’orchestre, il revient vers nous pour ciseler l’ensemble, lui donner une cohérence. Le processus créatif est pour Emanuel de l’ordre de la dualité, entre obsession et réflexion. Je trouve cela fascinant. » 

© Julia Gat

Métissage pictural et chorégraphique, entre pop et baroque

Les références picturales viennent de l’Orient et de l’Occident. Certains tableaux, certains gestes, rappellent des bas-reliefs de temples indiens ou cambodgiens quand certains drapés nous ramènent à la peinture baroque

Thomas Bradley les a conçus « comme une ode à l’élégance, au volume et à la forme ». Les couleurs sont éclatantes, évoquent les soies asiatiques, jaunes, violettes, bleues, vieux-rose… Les étoffes, épaisses mais fluides, amplifient les déplacements, leur donnent de la majesté.

Aux tubes pop succèdent des plages de silence. Aux ombres, des lumières verticales ou latérales, souvent nimbées du sfumato créé par les fumigènes. La surprise est constante.

Emanuel Gat, chorégraphe et créateur des lumières

© Wendyd

Le chorégraphe israélien est né en 1969. Il découvre la danse à l’âge de 23 ans et commence à travailler comme chorégraphe indépendant dès 1994. Pendant dix ans, il développe son esthétique et fonde sa compagnie – Emanuel Gat Dance – à tel Aviv en 2004. Ses premières pièces créations sont remarquées à l’étranger. « Winter Voyage » sur la musique de Franz Schubert. « Le Sacre du printemps », distingué par le Bessy Award de la meilleure chorégraphie.

En 2007, il décide de s’installer en France, à la Maison intercommunale de la danse à Istres. Sa réputation internationale est établie et son style unique connaît un grand succès critique.

En 2013, Emanuel Gat est nommé artiste associé au Festival Montpellier-Danse.

En 2018, il est nommé artiste associé à Chaillot – Théâtre national de la Danse à Paris ; il présente « Story Water » – avec le prestigieux Ensemble Modern de Francfort – pour la Cour d’Honneur du Palais des Papes au Festival d’Avignon.

Parallèlement à son travail chorégraphique, Gat conçoit les lumières pour toutes ses œuvres, partie intégrante de son style.

Jeudi soir, il accompagnait sa troupe et il est venu, en veste rouge, saluer le public heureux, enthousiaste. Merci l’artiste !

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