La résistance, patrimoine de Fontaine

Par Edouard Schoene

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Le président Serge Chaléon lors de la présentation du parcours historique.
Dans le contexte des journées du patrimoine, l'association fontainoise Mémoires a organisé un parcours en car pour découvrir l'histoire de la Résistance à Fontaine et de ceux qui y ont participé, trop souvent en y laissant la vie.

L’association Mémoires (Fon­taine) orga­ni­sait au cours des jour­nées du patri­moine un par­cours mémo­riel sur le che­min des résis­tants (39–45). Deux groupes ont sui­vi un par­cours en auto­car pen­dant deux heures trente, pour sept arrêts au cours des­quels les res­pon­sables de Mémoires ont pré­sen­té l’histoire. Le pré­sident, Serge Cha­léon intro­dui­sait la visite same­di 17 sep­tembre ain­si :

« Cette jour­née qui s’ins­crit sans aucun doute dans l’es­prit des jour­nées du patri­moine, seul évé­ne­ment local pou­vant s’ins­crire dans cette lignée. Fon­taine n’a pas eu de pas­sé médié­val (*), pas de châ­teau féo­dal, pas de com­bats d’es­crime, le seul com­bat étant celui mené contre le Dra­gon, nom don­né au Drac, qui jus­qu’à son endi­gue­ment qui lui don­ne­ra un lit rec­ti­ligne et confor­table, inon­dait et rui­nait les espoirs des pay­sans de notre petit bourg réfu­gié aux points hauts de la com­mune, La Poya ou les Bois de Vouillants.

C’est cela que nous allons vous faire décou­vrir, par quelques exemples choi­sis, et nous évo­que­rons aus­si au gré de notre che­mi­ne­ment quelques autres faits de résis­tance ou le nom de cer­tains qui auront mar­qué notre his­toire. Nous allons prendre la chro­no­lo­gie des faits des plus récents au plus anciens. Fon­taine a été libé­ré le 22 août 1944. Nous allons com­men­cer notre ren­contre avec l’his­toire le 2 août 1944 par un évé­ne­ment oublié jus­qu’aux années 1988 où à l’oc­ca­sion de la venue d’une délé­ga­tion de jeunes étu­diants de notre ville jumelle, Schmal­kal­den, (le mur n’é­tait pas encore tom­bé) qui par­ti­ci­pait au fleu­ris­se­ment de la tombe des jeunes du Centre Bayard morts pour la France, des ques­tions sur la résis­tance ont fusé. Le gar­dien fac­to­tum, mon­sieur Vil­la, de cet éta­blis­se­ment deve­nu lycée Jacques Pré­vert, m’a dit, je vais vous faire voir quelque chose qui va vous inté­res­ser et les inté­res­ser. Et de m’emmener à tra­vers un sen­tier peu acces­sible jus­qu’à une plaque fixée dans la paroi de la falaise proche , et une tombe creu­sée dans le sol et flan­quée d’une petite bois en croix. Avaient été enfouis- là trois corps de maqui­sards. Ce sera le début de notre visite. »

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Square André Her­mitte, du nom du résis­tant fon­tai­nois mort en dépor­ta­tion.

Puis les visi­teurs ont été au lycée Pré­vert, reçus par le pro­vi­seur, au cime­tière, puis devant les stèles de plu­sieurs résis­tants dont Jean Bocq, Paul Val­lier, Antoine Polot­ti, le com­man­dant Lenoir, André Her­mitte…

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Le monu­ment qui témoigne de l’as­sas­si­nat de Paul Gari­bol­dy, dit Val­lier, le 24 mars 1944, par les hommes de la Milice et des Waf­fen SS à Fon­taine. Paul Gari­bol­dy était le chef du groupe franc du mou­ve­ment ”Com­bat”.

Devant le monu­ment de l’abbé Vincent, M. Serge Huet a évo­qué le grand résis­tant que fut cette per­son­na­li­té fon­tai­noise.
«  Curé de Cor­ren­çon, ren­tré dans la résis­tance dès 1941 (32 ans), a méri­té par son acti­vi­té le sur­nom de « curé ter­ro­riste », dont la tête fut mise à prix à un mil­lion par les Alle­mands. Il par­ti­ci­pa à l’or­ga­ni­sa­tion du camp Col­lomb, et des ser­vices de ren­sei­gne­ments de toute la région. En avril 1943 sauve par son sang-froid le chef du C2 des F.T.P.F. des Ravières et ses hommes cer­nés par les Ita­liens.

Aumô­nier en 1939 dans un régi­ment d’in­fan­te­rie alpine il est démo­bi­li­sé après la défaite de 1940. Nom­mé curé de Cor­ren­çon, il intègre le mou­ve­ment Com­bat. La cure de Cor­ren­çon ser­vait de boîte à lettre aux jeunes réfrac­taires au STO. L’ab­bé Vincent assure le ravi­taille­ment et la liai­son avec les pre­miers camps du Ver­cors. Lors de l’i­nau­gu­ra­tion de cette stèle, le maire, Yan­nick Bou­lard, rap­pelle un épi­sode :  » un jour de 1943, bré­viaire en main, il a inter­dit l’en­trée de son église aux occu­pants alors que des FTP étaient cachés dans un pla­card de sa sacris­tie. »

En 1977, l’ab­bé Vincent a été accueilli au sein des Justes à Jéru­sa­lem. Un arbre, à son nom, a été plan­té sur l’es­pla­nade de l’ho­lo­causte. La com­mu­nau­té juive de Gre­noble et de Fon­taine y fut pré­sente en sou­ve­nir des 155 juifs qui échap­pèrent à la dépor­ta­tion et à la mort, grâce à l’ab­bé Vincent. Début 1942, il orga­nise les pre­miers camps de camou­flage des juifs. « Comme j’é­tais à la fois curé et secré­taire de la mai­rie de Cor­ren­çon, dit-il, je pou­vais éta­blir très faci­le­ment faux extraits de bap­tême et faux états-civils que le pré­fet du moment, qui était Frank, signait sans sour­ciller. Il fai­sait confiance au maire ». 

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A la mémoire de l’ab­bé Joannes Vincent.

En fin d’une visite riche en évo­ca­tions his­to­riques, très sen­sible, l’association Mémoires a remis aux par­ti­ci­pants une pla­quette douze pages pré­sen­tant les résis­tants de Fon­taine les noms des rues et équi­pe­ments publics liés à la résis­tance et à la dépor­ta­tion.

Fontaine, le Moyen-Âge et la Résistance

Nombre de visi­teurs ont été cho­qués par l’absence des élus de la nou­velle majo­ri­té muni­ci­pale de droite, enga­gés dans la fête muni­ci­pale autour du Moyen-Âge, à l’ex­cep­tion dans l’a­près-midi de Suzette Ros­set, conseillère muni­ci­pale délé­guée au patri­moine, et par ailleurs membre du conseil d’ad­mi­nis­tra­tion de Mémoires.
La muni­ci­pa­li­té avait en outre reti­ré son enga­ge­ment finan­cier pour le car assu­rant le par­cours des che­mins de la Résis­tance. Elle l’ex­pli­quait en ces termes : « La Ville de Fon­taine est enga­gée dans une démarche ver­tueuse en matière envi­ron­ne­men­tale et agit quo­ti­dien­ne­ment pour limi­ter les dépla­ce­ments en véhi­cules ther­miques à Fon­taine ». Les ser­vices ont sug­gé­ré qu’en l’absence de car, la visite se fasse par covoi­tu­rages.

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