Vallée du Grésivaudan. 158 suppressions d’emploi annoncées dans la fabrication de matériel médical

Par Pierre-Jean Crespeau

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A Montbonnot, dans la vallée du Grésivaudan, on avait rarement vu un cortège de deux cents personnes. Une manifestation pour la défense de l’emploi chez Tornier.

Mercredi 13 janvier, le site de Tornier, fabricant de matériel orthopédique en Grésivaudan, était en grève. En cause, la volonté du groupe Stryker, récent acquéreur de l’entreprise, de supprimer un tiers des emplois, soit 158 postes de travail.

En novembre der­nier, la socié­té Tor­nier (groupe Wright) a été rache­tée par Stry­ker, un poids lourd mon­dial de tech­no­lo­gies médi­cales. Le 7 jan­vier 2021, la direc­tion a annon­cée la sup­pres­sion de 158 postes (ce qui repré­sente à peu près le tiers des effec­tifs). Les sala­rié-e‑s qui n’ont pas été dupes des consé­quences de ce rachat sont néan­moins cho­qué-e‑s par l’ampleur inat­ten­due du PSE (plan de sau­ve­garde de l’emploi).

L’intersyndicale com­po­sée des deux syn­di­cats de l’entreprise, la CFDT et la CGT, a dénon­cé cette déci­sion et reven­dique le main­tien de tous les emplois. Elle a appe­lé à la grève le mer­cre­di 13 jan­vier 2021 et à un ras­sem­ble­ment le même jour à par­tir de 10h devant le site à Mont­bon­not-Saint-Mar­tin.

« Tor­nier est allé cher­cher une place de lea­der mon­dial de l’épaule avec ses hommes, là où Stry­ker est allé la cher­cher avec ses dol­lars ! », peut-on lire sur les tracts. Et des dol­lars il y en a : 5,4 mil­liards de dol­lars pour s’offrir Tor­nier, lea­der de l’orthopédie. « Le savoir-faire, il est ici ! », peut-on entendre au micro pen­dant le ras­sem­ble­ment qui a réuni envi­ron deux cents per­sonnes de l’entreprise et des sou­tiens exté­rieurs.

On sent bien que les sala­rié-e‑s sont atta­ché-e‑s à leur entre­prise et sont fiers de leur tra­vail. 

« On se bat pour nos emplois, on veut les gar­der ici à Tor­nier », déclare Emma­nuelle Per­ez, délé­guée syn­di­cale CGT. Et si la direc­tion per­siste dans sa déci­sion « Ne comp­tez pas de nous un PSE au rabais, on se bat­tra pour le maxi­mum, et on est tous ici pour le maxi­mum !  On ne va pas se lais­ser faire ! À Tor­nier on est une famille, on est tous soli­daires ».
 Marie-Pierre Pilon délé­guée syn­di­cale CFDT, 31 ans de boîte s’indigne de la déci­sion qui a été prise, «  la honte ! », s’exclame-t-elle. «  C’est la pre­mière fois qu’il y a un mou­ve­ment, mais on ira jusqu’au bout. »

En effet, c’est la pre­mière grève depuis des années nous confirme Emma­nuelle Per­ez. « Chez Tor­nier cela fait quinze ans qu’on n’est jamais sor­ti, les sala­rié-e‑s trou­vaient que les condi­tions de tra­vail étaient bonnes. Et puis Stry­ker arrive… » Elle déve­loppe : « Quand on nous dit que nos chiffres sont pré­oc­cu­pants alors que pen­dant les 5 der­nières années nous avions tou­jours eu des aug­men­ta­tions, des gra­ti­fi­ca­tions. Aucun de nos diri­geants nous a dit que nos chiffres étaient pré­oc­cu­pants. On a été un des mieux loti dans la métal­lur­gie Isère en terme d’augmentations. Donc aujourd’hui quand on nous dit que les chiffres sont pré­oc­cu­pants alors que les chiffres étaient bons, c’est contra­dic­toire. »

 Le ras­sem­ble­ment s’est mué en cor­tège en direc­tion du bâti­ment de la logis­tique.

La logis­tique sinis­trée

Sté­phane Mad­da­lon, le direc­teur de la logis­tique nous explique : « On a inves­ti plus d’un mil­lion d’euro en 2018, année où nous avons inau­gu­ré ce nou­veau bâti­ment. Il y a 45 per­sonnes qui tra­vaillent ici. Il y a eu beau­coup de trans­for­ma­tions et chan­ge­ments ces deux der­nières années. L’investissement n’empêche pas la fer­me­ture et le licen­cie­ment. Ce n’est abso­lu­ment pas une garan­tie. Même pour les autres où il y a un cer­tains nombre d’investissement on ne sait pas de quoi demain sera fait avec la stra­té­gie d’optimisation qu’a Stry­ker ». Il ajoute : « Ce qu’ils ont pro­po­sé aux sala­rié-e‑s n’est pas res­pec­tueux, ce n’est pas en phase avec leurs capa­ci­tés finan­cières. Aujourd’hui on est face à une entre­prise riche à mil­lions, ultra-béné­fi­ciaire, qui fait des crois­sances à deux chiffres depuis trente ans, et qui der­rière n’a pas le cou­rage d’assumer jusqu’au bout leurs déci­sions. Ils arrivent avec une dyna­mique extrê­me­ment finan­cière où ce n’est pas l’homme qui compte, ce n’est pas le busi­ness qui compte, c’est pas le patient qui compte, c’est la pro­fi­ta­bi­li­té de l’entreprise. »

 « La crise a bon dos », lâche Sté­phane Mad­da­lon. 100% de la logis­tique est tou­chée.



CICE, aides de la région… Le Par­ti com­mu­niste, venu sou­te­nir les sala­rié-e‑s en grève, exige que les aides publiques et les allè­ge­ments de coti­sa­tions ou impôts en direc­tion des grandes entre­prises soient condi­tion­nés à des objec­tifs pré­cis et un contrôle strict en matière de résul­tats pour l’emploi, les salaires et la tran­si­tion éner­gé­tique. Émi­lie Marche élue régio­nale (FI) pré­sente ce jour-là ne man­que­ra pas d’interpeller le conseil régio­nal.


 

5.4 milliards

c’est la somme qu’a débour­sée Stry­ker pour se payer Tor­nier. Trois mois plus tard, c’est aux sala­riés qu’est pré­sen­tée la note.

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Emmanuelle_Perez

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