Voiron. Etre artiste exigeant… dans la mondialisation du marché de l’art
Par Edouard Schoene
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François Germain, artiste, responsable de la galerie TEC à Voiron, accueillait dimanche 3 juin un artiste de renom, Grégory Watin, pour une rencontre publique.
Grégory Watin est un habitué des foires internationales d’art contemporain. Comme le signale la présentation de l’exposition qui se tient jusqu’au 8 juillet, les œuvres de Watin ont été présentées notamment à Madrid, Bruxelles, New York, Londres Hong-Kong, Bâle.
La galerie Théorie des espaces courbes se dit honorée que Grégory Watin ait répondu à un appel d’offre pour exposer à Voiron.
C’est pour l’artiste une façon de travailler une autre forme d’exposition, de mise en scène de son travail le plus récent. Les propos de l’artiste sont d’une très grande sincérité, d’une fine analyse de la dynamique de mondialisation du marché de l’art contemporain.
Un élément central de son engagement tient en une formule: « sortir de la zone de confort ». Ainsi lance-t-il régulièrement un défi en recherchant une voie dans un domaine qui lui semble très difficile. Récemment ce fut le corps, un travail avec des modèles et des photos intégrées dans des œuvres quasi abstraites. « Cela n’a pas de sens de faire le métier d’artiste si l’on ne prend pas de risques. Faire ce qui se vend c’est mourir à petit feu. »
Cohérent, Grégory Watin bouscule les galeries qui l’exposent, par exemple en refusant de reproduire une forme réclamée par le marché : « je n’en referai qu’un par an, malgré la demande ».
« Beaucoup d’artistes, précise Grégory Watin, disent ne pas vouloir rentrer dans le système des foires internationales car le système est trop pourri. Moi je veux travailler pour l’œuvre, pas pour moi. Oui il y a une mondialisation de l’art contemporain, un public d’acheteurs qui est le même, partout. Ce système impose une ligne de prix, voire des biais par lesquels de grosses fortunes trichent pour maintenir les artistes qu’ils soutiennent (et qui font leur fortune) à leur « cote ». En même temps il faut reconnaître que le coût de présentation des œuvres, pour les galeries, est énorme. Une galerie peut disparaître si elle ne vend rien au cours de deux expositions consécutives. On dit que les œuvres sont chères ? Une œuvre de 30 cm par 30 cm, pour ce qui me concerne, ne peut pas être vendue en dessous de 750€.
Les artistes qui ne vendent pas ou vendent bon marché disparaissent. Sans doute le marché de l’art va-t-il se transformer et la vente en direct se développer, via les réseaux sociaux ».
Revenant sur l’audace artistique, Grégory Watin réaffirme « rester dans une zone de confort, c’est un piège. Or le modèle économique est tel que c’est l’artiste qui prend tous les risques. Les galeries ne se mouillent pas ».
« Ma grande inquiétude, c’est que le côté marchandise prenne le dessus. On observe un phénomène où un certain nombre de riches se font artistes… et vendent. J’espère qu’on arrivera au bout de cela et que l’amateur achètera une œuvre qui lui ressemble, non un produit standardisé ».