Bernard Friot à la Machinerie de Grenoble

Par Edouard Schoene

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A la Villeneuve, la salle avait fait le plein.
La Machinerie, tiers-lieu situé à la Villeneuve de Grenoble, accueillait, mardi 13 mai, le sociologue Bernard Friot, sur le thème "Le travail autrement ?".

La salle de ce lieu pro­duit par la régie de quar­tier était comble. Le public était diver­si­fié — ce qui, sou­vent, est loin d’être le cas de ren­contres de cette nature. La série de ques­tions de l’animateur, très au fait des tra­vaux de l’invité, a per­mis un démar­rage dyna­mique de la soi­rée.

Ber­nard Friot com­mence son inter­ven­tion en pré­ci­sant plu­sieurs termes de voca­bu­laire. « Le tra­vail, pour le capi­ta­lisme n’est que ce qui génère de la valeur. Ain­si il défi­nit comme dépenses le tra­vail pour la san­té, l’éducation, les ser­vices publics… Les ensei­gnants seraient des gens utiles mais pas pro­duc­tifs. Nous avons été caté­chi­sés par la « reli­gion capi­ta­liste ». Il n’y a pas de sépa­ra­tion entre la reli­gion capi­ta­liste et l’Etat. »

Ques­tions à Ber­nard Friot.

Le média­teur inter­roge alors : « Com­ment défi­nis­sez vous une autre façon de consi­dé­rer le tra­vail ? »

« Tout n’est pas tra­vail », répond Ber­nard Friot. « J’ai un tas d’activités qui ne relèvent pas du tra­vail, les loi­sirs notam­ment. Nous ne sommes pas une espèce comme les autres. Les humains ont un rap­port réflexif avec les autres humains. Assu­mons cette res­pon­sa­bi­li­té. Nous allons, ensemble, humains sor­tir de l’entropie, d’une sorte de fini­tude.  La pla­nète est finie mais il y a un tra­vail infi­ni pour trou­ver une rela­tion nou­velle avec l’autre vivant. »

Reve­nant lon­gue­ment sur l’assassinat de Nahel et les évé­ne­ments qui s’en sont sui­vis, Ber­nard Friot insiste sur l’importance d’enrichir la notion de citoyen­ne­té par le « droit au tra­vail ».

Il regrette que la gauche (il res­treint la gauche à PCF-LFI-NPA, NDLR) soit socia­liste, pas com­mu­niste. « Pour­quoi la gauche n’est pas capable de mobi­li­ser l’effervescence com­mu­niste, le com­mu­nisme qui se construit au quo­ti­dien ? La classe domi­nante orga­nise le tra­vail ; elle ne fait pas que d’exploiter le tra­vail. Nous sommes dépos­sé­dés du tra­vail par les capi­ta­listes. Les sala­riés ne décident de rien. Le lieu de pou­voir, disait Marx, c’est le des­po­tisme de fabrique. » Ber­nard Friot en conclut que ce qui est déci­sif c’est la prise de pou­voir au tra­vail. Il énonce : « Il faut sor­tir le tra­vail de l’étrangeté à nous. Nous devons deve­nir fiers de notre tra­vail, celui où nous serons acteurs et pas fiers de gagner l’argent au tra­vail. »

Puis il ana­lyse les pro­po­si­tions de cette gauche, défi­nie pré­cé­dem­ment, qui ne fait que récla­mer la conti­nui­té du salaire. Il en vient à énon­cer ses pro­po­si­tions. Tout résident en France à 18 ans aurait trois droits :

  • Salaire jusqu’à 60 ans, au titre de sala­rié res­pon­sable du tra­vail
  • Pro­prié­té de l’outil de tra­vail
  • Déci­sion sur le tra­vail

Dans le débat riche qui a sui­vi, Ber­nard Friot a noté que les fonc­tion­naires, avec le sta­tut qui est le leur, sont en droit, seraient en devoir, ayant un salaire à vie, sans contrat, d’investir for­te­ment le droit à faire le tra­vail tel qu’ils l’entendent col­lec­ti­ve­ment, au ser­vice des citoyens, du pays et non du pou­voir.

Ber­nard Friot.

Des ques­tions por­taient sur Bour­dieu et d’autres pen­seurs fran­çais, sur l’intérêt d’exercer notre droit de vote.

Ber­nard Friot : « Nous avons besoin de conquêtes élec­to­rales. Je suis membre du PCF et mili­tant. Mais il nous faut avant les vic­toires élec­to­rales des conquis préa­lables sur le tra­vail. »

Un inter­ve­nant inter­roge : « pour­quoi votre colère M. Friot ? » « J’ai la tris­tesse de consta­ter une céci­té assez géné­ra­li­sée sur le déjà là com­mu­niste. 17 mil­lions de per­sonnes (fonc­tion­naires…) ont un salaire com­mu­niste ! »

La soi­rée s’est ter­mi­née par le pro­lon­ge­ment des débats autour d’un buf­fet, la vente de livres et des échanges avec le « réseau sala­riat » qui était pré­sent .

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