La Rampe-Echirolles. La Vie et la mort de Jacques Chirac, roi des Français. Décapant !

Par Régine Hausermann

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Julien Campani dans le rôle de Jacques Chirac. ©Simon Loiseau
Mardi 18 novembre – Devant le public laissé d’abord en pleine lumière, deux comédiens viennent dire leur fascination pour Jacques Chirac lorsqu’ils l’ont rencontré à Verdun dans leur enfance. Mais le temps a passé et l’image du « grand homme » s’est ternie. Changement d’ambiance, la salle s’éteint, les calicots du RPR cèdent la place à une loge d’acteur. La tragi-comédie peut commencer.

Une saga des huit présidents de la cinquième en huit épisodes et six spectacles

Pré­ci­sons d’abord que cette pièce est le pre­mier épi­sode d’une série de huit, consa­crée aux « Huit rois, nos pré­si­dents » de la 5ème Répu­blique, de Charles De Gaulle à Emma­nuel Macron. Elle est coécrite par l’acteur Julien Cam­pa­ni qui inter­prète le rôle de Jacques Chi­rac et le met­teur en scène Léo Cohen-Paper­man.

Ont déjà été repré­sen­tés, sans sou­ci de la chro­no­lo­gie, Le Dîner chez les Fran­çais de Valé­ry Gis­card d’Estaing, Géné­ra­tion Mit­ter­rand, Sar­kHol­lande , les épi­sodes 4 et 5 pro­gram­més à La Rampe le 25 novembre.

Le tra­vail est en cours d’écriture pour les por­traits De Gaulle-Pom­pi­dou et Macron avec l’objectif de ter­mi­ner en 2027 pour la fin du second man­dat macro­nien. Julien Cam­pa­ni explique pour­quoi la créa­tion n’a pas été chro­no­lo­gique : « Tout est par­ti de Jacques Chi­rac, le pré­sident de notre enfance et de notre éveil à la poli­tique, avec les mani­fes­ta­tions contre la guerre en Irak et l’effroi du score du Front natio­nal à la pré­si­den­tielle de 2002. L’idée de la série est venue après. »

Chirac intime vu par son chauffeur

Mathieu Métral inter­prète Jacques Lau­mond, chauf­feur de Jacques Chi­rac (1932–2019) depuis ses débuts au minis­tère de l’Agriculture en 1972 et pen­dant vingt-cinq ans, jusqu’au début du sep­ten­nat 1995–2007. Le récit du chauf­feur — qui a sui­vi l’ascension d’un « jeune loup » de 40 ans jusqu’à son élec­tion comme pré­sident de la Répu­blique à 63 ans – a per­mis aux auteurs d’approcher le Chi­rac intime. Les nom­breuses séquences qui mettent « le chef » en rela­tion avec son chauf­feur donnent accès à l’envers du décor et à un Chi­rac intime : ado­les­cent mal dans sa peau, volon­taire pen­dant la guerre d’Algérie, reçu à l’ENA par miracle, pré­sident du RPR, dépu­té de Cor­rèze, maire de Paris. Un Chi­rac sans trop d’ossature poli­tique, navi­guant au gré des oppor­tu­ni­tés.

Chirac et ses conseillers

Le spec­tacle en retient deux, inter­pré­tés par Mathieu Métral : Pierre Juillet, le conseiller de l’ombre et Charles Pas­qua, ministre de l’Intérieur à l’accent corse et au verbe haut. Tous deux ne mâchent pas leurs mots devant un Chi­rac hési­tant, lui enjoi­gnant de prendre telle direc­tion ou telle déci­sion. Les séquences se suc­cèdent à un rythme enle­vé, avec chan­ge­ment de cos­tume à vue. Chi­rac en slip, en cos­tume croi­sé, se regar­dant dans le miroir, répé­tant ses inter­ven­tions à la façon d’un acteur, révé­lant au fil du temps la comé­die du pou­voir.

Jacques Chi­rac et Pierre Juillet. ©Simon Loi­seau

Revue de l’histoire politique de la France

Le public jeune découvre, le public ancien révise, les épi­sodes mar­quants des années Chi­rac : Chi­rac pre­mier ministre de coha­bi­ta­tion sous Fran­çois Mit­ter­rand, Chi­rac et Bal­la­dur, les ten­ta­tives ratées à la pré­si­den­tielle, le dis­cours de 1991 où il parle de « bruit et d’odeur » pour stig­ma­ti­ser les immi­grés en France et concur­ren­cer le Front natio­nal, la vic­toire de 1995 où il réus­sit à se pla­cer devant Bal­la­dur au pre­mier tour et à battre Jos­pin au second, la réélec­tion mira­cu­leuse de 2002 face à Jean-Marie Le Pen au second tour.

Le portait nuancé mais sévère d’un opportuniste

Ecart entre les mots et les actes, comme le fameux concept de lutte contre « la frac­ture sociale », thème de cam­pagne de 1995 res­té sans len­de­main. Une car­rière chao­tique, faite de hauts et de bas avec pour ambi­tion ultime la conquête du pou­voir. Mais avec quelles valeurs et pour quels objec­tifs ? Au moment des adieux, son chauf­feur s’interroge sur ce qui l’a ani­mé pen­dant sa car­rière : quel truc en ‑iste était sa bous­sole. Ques­tion sans réponse. Juste le pou­voir à tout prix et pour ce faire, la comé­die, l’hypocrisie.

On rit beau­coup. Julien Cam­pa­ni se glisse dans les cos­tumes et les chaus­sures de Chi­rac avec aisance et brio, capte ses atti­tudes, ses mimiques, ses tics de lan­gage, nous emporte en com­pa­gnie de Mathieu Métral, vers une réflexion sur la démo­cra­tie. Bra­vo !

Pour celles et ceux qui veulent prolonger leur immersion en politique

Les figures politiques françaises au Pathé Échirolles

Lun­di 01.12 à 19h30 – Per­sonne n’y com­prend rien

Lun­di 08.12 à 19h30 – Pré­si­dents

Une exposition de Morgan Navarro, dessinateur et auteur de BD, sur le thème de politique du quotidien

Du mar­di 18.11 au jeu­di 18.12 à la Rampe

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