A propos de la réforme des lycées professionnels
Par Travailleur Alpin
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Le réseau école a tenu une conférence de presse pour faire connaître ses analyses.
Le réseau école du PCF Isère a travaillé sur les contenus du projet gouvernemental concernant la formation initiale professionnelle. Un appauvrissement planifié des contenus et des savoirs mis à la disposition des jeunes qui suivent cette filière de formation.
Le Réseau école du PCF 38 se restructure et a produit une réflexion collective qu’il souhaite mettre au débat afin de faire connaître la réforme du lycée professionnel. Le PCF s’oppose à cette réforme, les syndicats affichent une belle unité qui devrait attirer l’attention: l’enjeu de cette réforme est bien un enjeu de société, il nous concerne tous. Nous avons le devoir de détricoter le discours apaisant de la novlangue, qui voudrait laisser croire à la valorisation de la voie professionnelle en vantant des parcours d’excellence. Il n’en est rien. L’apprentissage est et doit rester le projet éducatif ambitieux de son origine. Cette réforme n’apporte rien en plus : un jeune peut déjà, dès 14 ans, par dérogation, faire le choix de l’apprentissage.
Cette réforme, va, dans les faits, organiser un cloisonnement entre les jeunesses lycéennes, au moment même où il faudrait redonner du sens à l’école de la République, qui n’a pas su répondre à la promesse d’égalité. Notre école publique est aujourd’hui attaquée de tous côtés. Nous devons, rappeler que la création du bac professionnel visait tout au contraire à décloisonner l’enseignement professionnel, afin d’offrir de nouveaux parcours de formation : cette création participait des 80 % d’une classe d’âge au niveau bac et l’objectif poursuivi était bien d’amener le plus grand nombre de lycéens vers des diplômes de l’enseignement supérieur. Tout élève qui, à 14 ans, fait le choix de l’apprentissage, peut aujourd’hui repartir vers une formation initiale.
Au moment même où nous devrions avoir l’ambition collective d’affirmer le principe d’égalité d’accès à la formation professionnelle, en faisant le choix de l’élévation du niveau de connaissance et de l’accès de tous les lycéens à une culture commune quelque que soit la filière choisie, c’est le choix de réduire les horaires d’enseignement général et d’augmenter le temps de formation en entreprise qui est acté dans ce projet de réforme, sous couvert de modernisation pédagogique. Comment ne pas penser que ce sont les classes populaires qui sont dans le viseur du gouvernement ? Au risque d’employer des gros mots, dénoncer cette réforme et agir pour que ce projet soit abandonné relève du combat de classe ! Penser que « ce n’est pas grave » que les enfants d’ouvriers aient moins l’occasion de faire du théâtre, de découvrir un auteur ou d’apprendre, avec leurs enseignants à réfléchir et à développer leur sens critique, ne témoignerait pas d’un mépris de classe ?
Prendre le temps du doute, il ne s’agit pas de « bouffer du patron » ! Devant le démantèlement, voire la disparition de notre école publique, qui, demain, ne sera plus en mesure de garantir l’obtention de diplômes nationaux qui, seuls, ouvrent des droits, y compris dans le monde du travail, il est de notre devoir de détricoter un discours qui peut sembler séduisant. Des parcours d’excellence sont donnés en exemple. A contrario, nous allons entrer dans une nouvelle ère : celle de certifications sur des formations non pérennes, puisque soumises aux besoins des entreprises. Au-delà du placement sous tutelle des formations professionnelles, ce sera bien la fin des diplômes nationaux, seuls garants de l’égalité républicaine. Dans le même temps, sera actée la fin du recrutement des enseignants par concours, avec une multiplication des statuts et des recrutements sur des missions ponctuelles, sans plus aucune égalité, selon les territoires. Notre école est menacée de tous côtés : dérives libérales, réactionnaires mais aussi obscurantistes. C’est un modèle de société qui est remis en question dans un contexte peu favorable aux idées progressistes et humanistes. C’est pourtant, dans la plus grande indifférence que la volonté politique d’assigner les enfants des milieux populaires à la domination sociale en limitant leur formation aux enjeux de l’employabilité, chemine. Nous ne voulons pas croire que la voie progressiste, les voix progressistes, relèveront demain des livres d’histoire, car si plus aucune page de ces livres ne devait s’ouvrir, les réseaux sociaux ne suffiront pas à éclairer le débat dans un contexte de fracture numérique, sociale et démocratique, qui ne laisse que peu de place au combat des idées. Il faudrait en effet, donner une place aux savoirs pratiques et techniques aux côtés des savoirs théoriques, il faudrait substituer à l’évaluation classement et sélection, une évaluation formative et progressive, il faudrait supprimer le palier orientation de troisième et lui préférer une orientation continue jusqu’au baccalauréat en prolongeant la scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans. Il faudrait mener ensemble ce combat, en ne cédant ni à l’indifférence, ni à la fatalité : qui peut penser que les entreprises n’auraient pas besoin de citoyens éclairés et que la place de notre jeunesse ne serait pas à l’école ?